lundi 24 décembre 2007

BILAN DE L’ANNEE 2007


Par Michel Soukar
Soumis à Réseau Citadelle le 22 décembre 2007
www.reseaucitadelle.blogspot.com



2007 : une année caractérisée par la confusion, la propension au conflit et au scandale. Ce bilan analyse le comportement des institutions et des acteurs clés de la vie nationale. Celui de l’année 2007 est mitigé.

1. Sur le plan politique : le bilan est mitigé

Selon la revue américaine « Politique Etrangère » et l’organisation dénommée Fonds pour la Paix, Haïti occupe la huitième place au classement des États faillis. Notre pays vient juste après la Côte d’Ivoire, le Soudan, la République Démocratique du Congo, l’Iraq et la Somalie. Trois indices et douze critères déterminent ce classement. Il s’agit des indices de perception de la corruption, de compétitivité et de développement humain.

Les critères sont notamment : la pression démographique, le phénomène des réfugiés et des personnes déplacées, les rivalités et querelles entre groupes sociaux, l’exode des cerveaux et la fuite des élites locales, les inégalités de développement, le déclin économique, la disparition de la légitimité de l’État, l’absence ou l’insuffisance de services publics, le respect des droits humains, le maintien de la sécurité des citoyens, les querelles entre les élites et l’intervention de pays étrangers. Le décor est planté.

L’année 2007 débute et se termine dans la confusion. Le premier Jour de l’An correspond à la Célébration de l’indépendance d’Haïti. Le Président de la République, René Garcia Préval, rate son message à la nation, prononcé sur la Place d’Armes des Gonaïves. Des individus non identifiés endommagent la génératrice et affectent le système de sonorisation. Le Président a du le terminer au Palais National.

a. Pouvoir exécutif


Le chef du Pouvoir Exécutif débute mal l’année 2007. Il ne dispose pas d’un agenda clair. Il place l’année 2007 sous le signe de la lutte contre la corruption et de la stabilisation du pays. Monsieur Préval a tout l’air d’un équilibriste.

Il multiplie les rencontres avec les dirigeants de partis politiques représentés au Parlement, les parlementaires, les gens d’affaires et certains syndicalistes. Il forme des commissions pour réfléchir sur les grandes questions d’intérêt commun. En diplomatie, il essaie de tirer parti des tensions et contradictions existant entre les Etats-Unis, Cuba et le Venezuela.

Le Président Préval voyage beaucoup. Il participe aux réunions aussi bien de la Caricom que de celles de l’Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA) qui regroupe le Venezuela, Cuba, le Nicaragua, la Bolivie et l’Équateur. Il accueille le Programme PetroCaribe de vente de pétrole a des conditions de faveur au même titre que la proposition américaine de transformer Haïti en pays producteur d’Éthanol. Cette dernière proposition est soutenue également par le Président brésilien Luiz Ignacio Lula Da Silva.

Sous la présidence de Preval, Haïti est membre, observateur ou invité spécial dans plusieurs regroupements : Caricom, ACP-UE, pays non-alignés, ALBA, etc. Il flirte aussi bien avec Taiwan qu’avec la Chine continentale. ALBA promet de financer la construction d’une raffinerie de pétrole et de deux centrales électriques, une aux Gonaives et l’autre au Cap-Haïtien. Pourtant, la diplomatie haïtienne n’arrive pas à transformer ces promesses en projets, susceptibles de changer les conditions de vie de la population.

De plus, comme c’est le cas au Venezuela, en Bolivie et en Équateur, le Président Préval désire modifier, amender ou changer la Constitution de 1987. Cette constitution, déclare-t-il, est une source d’instabilité. Il a confié la mission d’évaluer ses forces, faiblesses et contradictions à l’historien Claude Moïse et au politologue Cary Hector. Ces derniers ont déjà remis leur rapport. Cependant, les opinions divergent quant à l’opportunité, l’urgence et la pertinence d’une telle réforme. Ignorant les intentions réelles du Président, les politiciens disent oui, mais recommandent qu’elle suive la procédure tracée dans cette constitution.

En outre, le Programme d’Apaisement Social (PAS), évoqué dans la Déclaration de Politique Générale du Premier Ministre Jacques Edouard Alexis n’a pas fait recette. Il est mis aux oubliettes. Maintenant, le Premier Ministre et son gouvernement gèrent les urgences. Il vit sous la menace constante d’un vote de censure du Parlement.

Le mandat du tiers (1/3) du Sénat arrive à expiration. Des élections pour son renouvellement auraient du être organisées a la fin de l’année 2007. L’Exécutif choisit de faire passer le temps pour au moins trois raisons : l’incertitude des résultats, la mise en place des assemblées territoriales et la formation du Conseil Électoral Permanent.

L’Exécutif semble craindre les résultats des élections pour le renouvellement du tiers du sénat et le remplacement du sénateur Noël Emmanuel Limage de l’Artibonite. Amputé de onze membres, il sera plus difficile au Sénat de censurer la politique du Gouvernement. Le gouvernement préfère avoir une loi régissant le fonctionnement des collectivités territoriales avant la formation des Assemblées. Ces dernières vont peser lourd sur le budget. Elles risquent d’ajouter à la confusion actuelle.

Selon la Constitution, le Conseil interdépartemental participe aux réunions au Conseil des Ministres et à l’élaboration du Budget de la République. Il joue un rôle important dans la Formation du Conseil Électoral Permanent. Ce dernier participe à la formation de la Commission de Conciliation.

L’Exécutif choisit la fuite en avant. Profitant des dissensions existant au sein du Conseil Électoral Provisoire, présidé par Max Mathurin, le Président Préval entame des discussions avec de nombreux secteurs et organisations dont celle des handicapés et le secteur populaire. Un nouveau Conseil Électoral Provisoire est formé avec le mandat d’organiser les élections pour le renouvellement du tiers du sénat, le remplacement du sénateur Limage ainsi que les élections indirectes pour la formation d’assemblées territoriales.

Les observateurs constatent que l’Arrêté de nomination ne conditionne pas la fin du mandat de ce énième conseil Électoral Provisoire à la formation de celui permanent. Rappelons que la Constitution de 1987 prévoit dans ses dispositions transitoires l’existence d’un seul Conseil Électoral Provisoire (CEP). Le Commissaire du Gouvernement près le tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, Me Claudy Gassant s’est même arrogé le droit de convoquer 3 des conseillers électoraux au Parquet de ce ressort. Selon lui, seuls les conseillers permanents sont passibles de la Haute Cour de Justice.

Le Président Préval fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille pour l’année 2007. D’anciens administrateurs de la SOCABANK, soupçonnés de malversations ayant conduit à la faillite frauduleuse de cette banque, sont jetés en prison. Parmi eux, se trouve le PDG de la Haitel, Franck Ciné. Quelques mois plus tard, le Commissaire du Gouvernement près du Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince, Claudy Gassant convoque Fritz et son fils David Brandt au Parquet. Après leur interrogatoire, il les envoie au Pénitencier national et défère l’affaire au Cabinet d’instruction. Ils sont suspectés de commission de faux et usage de faux au préjudice de l’Administration Générale des Douanes.

Une histoire de commande et de livraison d’un camion pour le compte d’un certain Larco est à la base de cette arrestation. Des fonctionnaires de douane et des employés de la Compagnie haïtienne des Moteurs sont placés également derrière les barreaux. Après trois mois d’instruction, délai rarement respecté, le juge émet une ordonnance de non lieu en faveur de Fritz Brandt. Les indices sont insuffisants pour le retenir. Par contre, David est retenu. Ses avocats interjettent appel. Il est libéré sous caution. Les autres co-inculpés sont maintenus en prison. D’autres commerçants sont également convoqués au Parquet. Parmi eux, Réginald Boulos a passé la journée au Parquet à attendre le Commissaire du gouvernement.

Maintenant, le Parquet de Port-au-Prince loge dans un coquet bâtiment à Lalue. Ce qui cadre mieux avec les blindés de notre commissaire Ce dernier est en conflit avec la moitié de la ville. Il a eu maille à partir avec Michaël Lucius, le juge Jean Carves, le juge de Paix de Carrefour, l’ancien juge de Paix Hériveaux, Mario Andrésol et Garry Pierre-Paul Charles sans mentionner un autre journaliste qu’il fait placer en garde à vue au sous-commissariat de Delmas 60. Son refus de répondre à une invitation du sénat a failli coûter leur poste au Ministre de la Justice voire au Premier Ministre.

b. Le pouvoir législatif

La rentrée parlementaire s’est effectuée, sur fond de tension, en présence du Président de la République et du Premier Ministre. Selon la Constitution, le Pouvoir Législatif fait des lois sur des objets d’intérêt public. L’initiative en appartient à chacun des deux (2) chambres ainsi qu’au pouvoir exécutif. La performance du Parlement se mesure par le nombre de séances tenues, le nombre de lois votées, le nombre de traités, d’accords et de conventions ratifiés ainsi que par la qualité des débats. Sur ce point, le bilan du parlement en 2007 est maigre.

Quand le parlement n’est pas lui-même source de conflit, il passe le plus clair de son temps à en rechercher ailleurs. La chambre des députés sanctionne la gestion du Ministre de la Culture Daniel Elie et le destitue, sous prétexte de gabegie administrative et de présomption de détournement de fonds. Daniel Elie, qui a reçu jusqu’au bout le soutien de son ami René Préval a été blanchi par l’enquête de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCA) sur sa gestion pendant son passage à la tête du Ministère.

La vraie raison du renvoi de Monsieur Elie en est qu’il n’a pas voulu répartir les cent millions de gourdes prévus dans le budget pour l’organisation et le financement du carnaval entre les dix départements géographiques du Pays. Comme d’habitude, le carnaval s’est déroulé à Jacmel et à Port-au-Prince. Daniel Elie sait mieux que les parlementaires que la réussite du Carnaval, comme produit touristique, réside dans sa concentration et non dans sa dispersion. Au Brésil, il est organise à Rio de Janeiro ; en Allemagne, à Cologne ; en Italie, à Venise. A Trinidad, le carnaval se déroule à Port of Spain.

Ce qui a peut être choqué le Député Steven Benoît de Pétion-Ville c’est la rapidité avec laquelle la CSCA a rendu son rapport. Il attend depuis longtemps un arrêt de débet sur le scandale des fonds détournés au Ministre des Affaires Étrangères. Par contre, son vacarme autour de la vente de pseudo matériels et équipements du Centre National d’Équipements a porté fruit. Le Directeur du CNE, Monsieur Alex Lorquet est en prison. Le Ministre des TPTC, Frantz Verella qui a perçu des honoraires comme consultant au CNE a essuyé les salves du sénateur Youri Latortue. Il a tenu bon en faisant publier dans les colonnes de quotidiens à grand tirage le sommaire de son rapport de mission.

Puis, le Député Benoît questionne la gestion du Bureau de la chambre basse. Il est à couteaux tirés avec le Questeur. Quant au Sénat, il a voté quatre (4) résolutions douteuses : une pour empêcher la cession d’actifs et passifs de la Socabank à la BNC, une deuxième pour bloquer la convocation de Réginald Boulos, la troisième pour interpeller le Premier Ministre et la quatrième pour menacer le Premier Ministre de renvoi si le Commissaire du Gouvernement, Me Claudy Gassant n’obtempère à son invitation

La première résolution, votée à la lueur des réverbérations de téléphones cellulaires, est dénoncée par le sénateur Jean Gabriel Fortuné. Ce dernier crie au scandale. Il en profite pour accuser certains parlementaires de corruption, de trafic de drogue et de trafic de visas. Ces déclarations fracassantes ont causé beaucoup d’émoi au Sénat. Le grand corps forme une Commission d’enquête, composée de 3 membres : les Sénateurs Edmonde Supplice Beauzile (Centre), Yvon Buissereth (Sud) et Francois Fouchard Bergome (Artibonite).

Le troisième sénateur du Sud n’a pu apporter les preuves pour corroborer ses dires. La Commission présente un rapport de carence. L’assemblée rejette sa recommandation d’introduire l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC) dans l’affaire. Le Parlement est un pouvoir indépendant qui ne saurait tolérer l’intervention d’un bras de l’Exécutif. Ce faisant, le Sénat rate l’occasion de laver une souillure.

La saga des scandales s’est poursuivie avec l’affaire de Tiburon. Le Président du Sénat, Joseph Lambert, est accusé de posséder un navire. Ce dernier aurait fait naufrage au large de Tiburon alors que se déchargeait une cargaison de drogue sur une piste d’atterrissage clandestine. La principale victime de ce scandale est son père qui en a payé de sa vie. Le sénateur Lambert a profité des funérailles émouvantes à la Cathédrale Saint Jacques et Saint Philippe de Jacmel pour dénoncer des adversaires politiques qui, dit-il, veulent salir son image.

Enfin, il est scandaleux de rappeler que les parlementaires ont accepte de recevoir des fonds de l’Exécutif, en échange du vote du budget rectificatif 2006-2007. A la fin de l’année 2007, le député de Jérémie dit se mettre à couvert par suites de menaces de mort, pretend-il.

c. Le pouvoir judiciaire


Ce Pouvoir franchit en 2007 un pas sur le long et difficile parcours conduisant à son indépendance et à sa séparation de l’Exécutif. Trois (3) projets de loi : un sur le Conseil Supérieure du Pourvoir Judiciaire, un deuxième sur le statut de la Magistrature et le troisième sur le statut de l’École de la Magistrature, sont votés par le Parlement. Parallèlement l’Exécutif multiplie des gestes de bonne volonté en faveur de l’amélioration des conditions de travail des Magistrats. Apres avoir commandité la formation d’une Commission sur la réforme de la justice et une sur détention préventive prolongée, le Président de la République a visite deux fois en un mois le Palais de Justice.

Les deux commissions ont remis leur rapport. Des décisions sont prises par de nombreux parquets dans plusieurs juridictions en vue de libérer les détenus qui ont passé un temps supérieur à la durée de la peine s’ils étaient jugés et condamnés. A Port-au-Prince, des organisations de protection et de défense des droits humains critiquent cette façon de faire. Nous ne mentionnons pas le scandale des magistrats sur le payroll de l’UCREF.

De plus, le Président Préval a pris la responsabilité de relancer les procès des journalistes assassinés depuis des années. Une commission indépendante de journalistes, conduite par Guyler C. Delva, s’active pour que ces journalistes obtiennent justice. A date, deux des présumés assassins de Jacques Roche sont condamnés à la Prison à Vie. Il en est de même de deux des présumés assassins du journaliste Brignol Lindor. Des organisations de droits humains et des associations de journalistes voient le verre à moitié vide. Elles critiquent. Guyler C. Delva voit le verre à moitié plein. Il applaudit.

Cette commission tente de réanimer le dossier de Jean Dominique et de Jean Claude Toussaint, assassinés en avril 2000. Sept ans plus tard, ce dossier est comparable soit à un malade placé sous respiration artificielle, soit à une bouteille d’alcool restée ouverte ou à une bouteille de parfum restée ouverte. Et l’alcool et le parfum sont frelatés. Un arrêt de la cour de cassation infirmant en partie l’ordonnance de renvoi du juge Bernard Saint-Vil maintient ce dossier en vie artificiellement. Plusieurs juges d’instruction se sont dérobés. Actuellement, un juge d’instruction essaie de réaliser un miracle. Il tente de reconstituer le puzzle.

L’ancien Major et sénateur Dany Toussaint est invité à comparaître à titre de témoin. Un ancien chef de la Direction Centrale de la Police Judiciaire est écroué au Pénitencier National. La convocation du Directeur Général de la PNH, Mario Andrésol, fait couler beaucoup de salive. Ses avocats crient à la violation des procédures. C’est un grand fonctionnaire. Comme si Jean-Yves Noel, le Directeur Général de l’UCREF, envoyé en tôles par le magistrat Jean Peres Paul ne l’était pas.

En 2007, la République d’Haïti compte 18 juridictions de justice avec la mise en fonctionnement de juridictions de Miragoane et de la Croix-des-Bouquets. Il importe que ces juridictions soient bien pourvues en ressources humaines, matérielles et financières. Il importe également de mettre en place un inspectorat général indépendant pour superviser le travail des magistrats et évaluer leur performance annuelle, en termes de régularité au tribunal, de rédaction de jugement dans les délais requis, de nombre et de qualité de décisions rendues et infirmées.

d. Insécurité

L’année 2007 est aussi celle de l’insécurité. Très intense au début dans les quartiers de Cité Soleil, de Pelé, Fort tout Rond et Martissant, l’insécurité refait surface en fin d’année avec la recrudescence des actes d’enlèvement. Les victimes de l’insécurité se retrouvent dans toutes les de la société haïtienne. Quelques exemples pour illustrer :
· L’Architecte Nadim Hyppolite William, est tuée par balles à sa sortie de bureau à Pétion-Ville ;
· Henri Robert Laforest, responsable d’une compagnie de sécurité, est tué par balles à Pétion-Ville ;
· Alix Joseph, directeur d’une Station de Radio aux Gonaives, est tué par balles dans cette ville ;
· François Latour, acteur et publiciste est enlevé puis tué par ses ravisseurs à Delmas.

Le kidnapping cible maintenant les femmes et les enfants. Les libérations s’obtiennent à coups de rançon, suite à des négociations laborieuses impliquant de nos jours la MINUSTAH et la PNH. Plus d’un pensait que l’insécurité était sous contrôle avec la capture exceptionnelle des chefs de gangs de renom comme Evens Jeune dit ti Kouto, Pierre Belony et son adjoint Alain Cadet, Emmanuel Milord, alias Billy et la mort de Charles Junior dit yoyo piment, sans mentionner la prise de contrôle du fief d’Amaral Duclona à Cité Soleil par les troupes de la Minustah.

La question de l’armée refait surface chaque fois que l’on se rapproche du vote du Budget rectificatif provisoire. Finalement, l’Exécutif forme une commission composée de Patrick Elie, du professeur Roger Petit-Frère, Georges Michel, Suze Mathieu, Rodrigue Crevecoeur et Jodel Lessage. Elle a un an pour réfléchir et remettre son rapport. Les parlementaires favorables au retour de l’armée se calment (Pozé !).

e. MINUSTAH

Selon le Ministre des Affaires Étrangères du Pérou, la MINUSTAH doit atteindre tous ses objectifs avant de partir. Nous en doutons fortement, surtout en ce qui concerne l’UNPOL dont la majorité des membres, au gras salaire, ne parlent ni francais ni francais ni creole et qui donc n’apprennent rien à la PNH.

Au début de l’année 2007, un autre général brésilien, Carlos Alberto Dos Satnos Cruz, succède à José Elito Carvalho Siqueira aux commandes des forces militaires de la MINUSTAH. Son assistant uruguayen est rappelé pour avoir critiqué l’armée de son pays. Il risque la Cour Martiale. Le 15 février 2007, le mandat de la mission est renouvelé pour 8 mois.

Les visites de Secrétaire Général de l’ONU en Haïti sont devenues un rituel depuis plus d’une décennie. Après Boutros Boutros Ghali et Kofi Annan, c’est le tour de BAN KI MOON de visiter Haïti en 2007. Ces visites ont souvent lieu à la veille de la date d’expiration du Mandat de la MINUSTAH.

Depuis octobre, ce mandat est prorogé pour un an. Entre temps, le Diplomate guatémaltèque Edmond Mulet laisse sa place au diplomate tunisien, Heidi Annabi. Il s’agit d’une substitution de poste entre ces 2 diplomates. Mulet remplace Annabi comme Assistant Secrétaire Général des Nations-Unies pour la mission de maintien de la Paix.

De nombreux scandales sont susceptibles d’affecter l’image de la Mission. Quand ce ne sont pas des soldats qui agressent des femmes et des filles haïtiennes, c’est le Washington Post qui dénonce la corruption au sein de cette Mission. Ce qui montre que la corruption est un phénomène de société qui transcende les frontières haïtiennes.

La MINUSTAH se dit prête à déloger les bandits de Cite Soleil et de Martissant. Il ne faut pas oublier non plus la lutte contre le trafic des stupéfiants menée conjointement avec la PNH. Cette année, il y a eu des saisies extraordinaires de drogue. Les arrestations qui en ont suivi impliquent aussi bien des civils que des policiers, aussi bien des haïtiens que des étrangers. Les trafiquants les plus notoires sont transférés aux Etats-Unis d’Amérique, conformément à l’Accord signé par le Président Préval avec la Secrétaire d’Etat, madame Madeleine Albright, lors de son précédent mandat.

f. La Communauté Internationale

Haïti reste un sujet de préoccupation pour la communauté internationale. En 2007, le pays a reçu la visite d’autres grands dignitaires étrangers. Le Président Hugo Chavez a mobilisé des foules lors de sa visite de quelques heures à Port-au-Prince, en compagnie du Vice-Président cubain. Le Premier Ministre canadien Stephen Harper est venu renouveler l’engagement du Canada à accompagner Haïti sur la voie du progrès, de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption.

A la fin de l’année 2007, l’ambassade d’Allemagne annule un concert qu’il organisait le 18 décembre à la salle Sainte Cécile de l’école Sainte Trinité pour des raisons de force majeure. On apprend qu’une citoyenne allemande, travaillant pour la Banque Mondiale, a été enlevée.

g. Les Partis Politiques

Les partis politiques ne sont pas passés inaperçus au cours de l’année 2007. Deux regroupements, la Convention et le Conseil National des partis politiques ont organisé des colloques dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince. L’ancien Président Leslie François Saint-Roc Manigat passe le maillet à sa femme, Mme Myrlande Hyppolite Manigat, à la tête du RNDP. Décision que certains analystes politiques jugent tardive.

Duvaliéristes et Lavalassiens se mettent à rêver du retour prochain de leur leader respectif. Jean-Claude Duvalier délivre un message à la nation depuis son exil parisien. Parallèlement, le gouvernement haïtien obtient la poursuite du gel de ses avoirs dans les banques suisses. Enfin, après le KID d’Evans Paul, c’est le MOCHRENA du Pasteur Luc Mésadieu qui est menacé d’implosion.

h. La société civile

Par contre, la société civile non marchande est en hibernation. Cette année, elle n’est même pas en mode réactif. Quid du contrat social et des fameuses propositions Haïti 20/20. Est-ce la déception ou la désillusion ?

2. Sur le plan économique, le bilan est mitigé.

Les institutions financières internationales gratifient le gouvernement d’une bonne note pour les excellents résultats de sa politique macro économique. Les indicateurs le prouvent. L’inflation est réduite à 8%. Le taux de change de la gourde par rapport au dollar s’est stabilisé dans la fourchette 36 gourdes 50- 38 gourdes pour un dollar américain. La gourde haïtienne s’est même appréciée par occasion. Les taux sur les bons BRH à 91 jours sont passés de 18% l’année dernière à 3.5% cette année. Une situation qui risque d’affecter négativement les résultats des banques commerciales de la Place.

Cependant, les bons résultats macroéconomiques ne semblent encourager ni la croissance ni l’emploi. L’économie haïtienne est en déclin. L’agriculture ne nourrit plus son homme. L’industrie d’assemblage connaît un regain d’activité. Haïti mise sur la loi Hope, adoptée au Etats-Unis, pour dynamiser la filière textile de l’assemblage et augmenter les emplois dans ce secteur. Le gouvernement forme une commission publique-privée de mise en œuvre de la loi Hope. Cette commission est présidée par la Secrétaire-Générale de la Primature Ronald Baudin.

Par contre, le gouvernement n’arrive pas à dépenser l’argent prévu dans son budget d’investissement. A six mois de la fin de l’année fiscale 2006-2007, moins de 20% du Budget était dépensé. C’est un paradoxe dans un pays où toutes les infrastructures sont défectueuses. Le Ministre de TPTC, l’ingénieur Frantz Vérélla, ne cesse de parler de maillage routier. Toutes les routes nationales sont en mauvais état. Celles conduisant au Cap-Haïtien et à Port-de-Paix sont exécrables.

L’EDH n’a pas même les moyens de payer le salaire de son personnel. La production de l’énergie électrique est confiée à des firmes privées qui gèrent les centrales thermiques et revendent le Kilowatt-heure de courant à prix fort à l’État. Les abonnés ne paient pas leur bordereau. Même Jacmel, présenté comme une histoire à succès, connaît le rationnement du courant électrique. Jusqu'à date, les gestionnaires de la centrale résistent à l’idée de répercuter le prix du carburant aux consommateurs. Il n’y a pas moyen de se réapprovisionner. Les recettes sont trop faibles.

Le secteur des Télécommunications figure parmi les plus dynamiques de l’économie. La Digicel dessert plus d’1 million d’abonnés en 1 an. La Téléco est à la traîne. Elle est sur le point d’être privatisée. Actuellement, elle subit une cure d’amaigrissement. Le personnel est renvoyé par millier. Grèves et manifestations bruyantes s’en suivent.

D’autres facteurs affectent la compétitivité de l’économie haïtienne. Citons par exemple, l’augmentation continue du prix du pétrole sur le marché international et les intempéries. Le prix du Baril de pétrole est passé de 53 dollars américains à près de 100 dollars. Il en est résulté des augmentations du prix de l’essence à la pompe. Pour produire des biens et services, les entreprises recourent à au moins 3 sources d’énergie : le solaire, la génératrice et les batteries d’inverter. Le coût de production de biens et services devient prohibitif.

Cette année, le pays est durement frappé par les intempéries. Dans le Sud, la plaine des Cayes et les communes environnantes sont inondées. Dans l’Ouest, la section communales des Orangers et une partie de la ville de Cabaret sont inondées. La tempête tropicale Noël n’a pas épargné la Plaine du Cul-de-Sac. Paradoxalement, au mois de décembre, la tempête tropicale Olga frappe le Nord du pays. Les eaux en furie emportent tout sur leur passage. Toutes ces catastrophes naturelles affectent durement l’économie paysanne.
En conséquence, les prix des produits de première nécessité s’en ressentent. Les promesses d’aide financière sont mirobolantes. Mais les guichets des bailleurs de fonds restent fermés. N’était-ce la diaspora haïtienne à l’étranger, la majorité des familles haïtiennes ne saurait à quel saint se vouer pour payer le loyer, l’écolage des enfants, se vêtir et se nourrir. Cette situation de marasme économique a d’énormes conséquences sur le plan social.

3. Sur le plan social : le bilan est négatif.

Malgré l’amélioration du score d’Haïti dans le rapport du Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD) sur l’indice de développement humain dans le monde, la population haïtienne boucle l’année 2007 dans l’angoisse, dans la peur, le dénuement et la misère.

Les intempéries ont fortement frappé le pays au cours de l’année 2007. La population a payé un lourd tribu, suite aux inondations résultant des tempêtes tropicales Dean, Noël et Olga.

Une bonne partie de cette population vit avec moins d’un dollar américain, soit moins de 36 gourdes 50, par jour. Plus de 60% de la population active sont au chômage. La vie chère la tenaille. Malgré les refoulements, déportations et rapatriements en masse, elle n’hésite pas à risquer sa vie en haute mer sur de frêles esquifs. Le rapport de la CNUCED estime à 80% le pourcentage de la fuite de cerveau en provenance d’Haïti.

Les réponses ne sont pas nombreuses et les tentatives de solution inadaptées. Le gouvernement a élaboré un document de stratégie pour la croissance et la réduction de la pauvreté. L’église catholique s’en remet à la Vierge. Sa procession mobilise plus de 100.000 fidèles. Wyclef Jean lui emmène Akon. Les deux offrent un concert au Champ-de- Mars. L’ambiance et la participation n’ont rien à envier au carnaval. La solution réside-t-elle dans le rap et la charité publique ?

CONCLUSION

Cette année, le Bilan innove en jetant les bases de la désignation de la Personnalité de l’Année 2007. Il y a un demi-siècle, ceux qui occupaient ce poste, se faisaient remarquer par leur compétence et leur érudition. Ils nous ont habitués à des envolées oratoires mémorables dans des procès tout aussi célèbres. Ce choix est basé sur la capacité du personnage à générer des conflits.

Notre personnalité est dépourvue du sens de l’exercice de l’autorité. Elle n’a de respect que pour le Président de la République. Avec elle, c’est la l’arrogance. D’aucuns prétendent que ce personnage n’a pas le temps pour étudier et préparer des dossiers. Il ne siége pas au tribunal ni pour donner compétence à celui-ci ni pour soutenir l’accusation au non de la société. C’est un grand fonctionnaire qui permet, par ses frasques, de reléguer au second rang les dossiers sérieux du pays. Ce qui fait les délices de la presse à sensation. Le lectorat et l’auditoire disposent de suffisamment d’indices pour proclamer cette personnalité de l’année 2007.

Pour 2008, souhaitons que l’haïtien puise dans ses réserves ce supplément de courage et de grandeur d’âme qui lui permettront de vaincre la peur et de se lancer vers la conquête de la liberté. Sinon, Haiti aura définitivement choisi la médiocrité pour destin.

Michel Soukar, décembre 2007.

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