mercredi 13 août 2008

Le phénomène Gassant ou la nécessité d’une révolution humaniste/personnaliste en Haïti.


Par Cyrus Sibert

Le lundi 11 Août 2008, le commissaire du gouvernement près le parquet du tribunal civil de Port-au-Prince, Claudy Gassant, impliqué dans des incidents en cascade ayant empoisonné les relations entre la justice et la Police Nationale, a présenté lundi sa démission aux autorités compétentes. Par une décision de sagesse, Me Claudy Gassant ouvre la voie à une meilleure collaboration entre la police et la justice. Car, son altercation avec le commissaire de police de Pétion-Ville, suivie d’une plainte judiciaire pour voie de fait sur la personne d’un officier de police dans l’exercice de ses fonctions, avaient intensifié ce climat de tension qui existait entre les deux entités de l’appareil répressif de l’Etat.

Le passage de Me Claudy Gassant à la tête du parquet de Port-au-prince (zone métropolitaine) est marqué par plusieurs incidents : Mandats d’arrêt contre des officiers de police, mandat de comparution contre Gary Pierre Paul Charles journaliste de Radio Signal FM pour des critiques à son endroit, mandat d’amener contre le Directeur de l’aéroport International de Port-au-prince, sans compter tous les spectacles et scandales qui entourent ces initiatives. Même quand souvent il agissait dans ces droits, le Magistrat se comportait comme un ‘‘petit chef’’. [‘‘petit chef’’ parce que les dirigeants les plus arrogants sont protégés par une ambassade de puissance étrangère ; de plus l’arrogance diminue le Chef.] Avec un ton rancunier et méprisable, il instrumentait. Derrière sa science juridique, il s’imposait dans une capitale corrompue, il ne ratait aucune occasion pour envoyer en tôle n’importe qui, dans des cas ou l’emprisonnement pourrait être ajourné. Même quand on salue les réformes qu’il a opérées au sein du Parquet de Port-au-prince, il déçoit plus d’un. Me Claudy Gassant symbolisait tellement la justice, on n’arrive pas à comprendre ses dérives. On souffre à l’entendre dans les médias faire des dossiers publics une affaire personnelle de règlement de compte. Nous avons dit justice, vu qu’entre le Juste et le Droit il y a une grande différence. La justice étant basée sur des valeurs universelles, humanistes et personnalistes. L’homme juste est supposé sage. Il sévit avec rigueur, sans discrimination, en utilisant la sagesse du Roi Salomon.

La maladie d’être ‘‘chef’’ est un problème sérieux en Haïti. Elle discrédite le leadership national. Il suffit de placer quelqu’un au pouvoir pour découvrir sa vraie nature : arrogance, intransigeance, autosuffisance, rancœur, etc. La majorité des haïtiens sont de vrais schizophrènes, des névrosés capables de tout, quand ils sont au pouvoir. On se souvient de l’histoire de ces généraux africains que les services secrets occidents poussaient au putsch seulement en envoyant un agent provocateur ou un diplomate murmurer à leurs oreilles : vous feriez un bon Chef d’Etat. Comme une étincelle dans une poudrière, cette petite phrase suffisait pour pousser l’officier sous-développé à la trahison, créant ainsi des troubles politiques dans la patrie qu’il est supposé défendre.

On se demande si l’esclavage ne fait pas de nous des psychopathes conditionnés à l’autodestruction ; des ‘‘petits chefs’’ qu’une once de pouvoir peut transformer en des être méconnus et méconnaissables, disposés à détruire nos frères, à les réduire en victimes, en flatteurs, en rampeurs, en soumis… Et comme ces caractères psychologiques prédisposent à la trahison - car l’aigri qui cherche à paraître est prêt à tout - nos leaders sont facilement recrutés par les services secrets étrangers. Finalement, ils ne sont que des espions au service d’intérêts étrangers. On se souvient encore de l’image de ce petit-prêtre-des-pauvres, anti-américain sans pareil, au Pentagone (le ministère de la défense des Etats-Unis) pour superviser l’invasion du sol national par les troupes américaines. Aujourd’hui il est dénoncé par une journaliste américaine pour détournement de fonds publics. Ses copains américains qui l’ont aidé à piller Haïti, le pays le plus pauvre de l’Amérique, ont été condamnés aux Etats-Unis : un révolutionnaire devenu voleur.

S’il y a une chose à faire dans ce pays, c’est la révolution humaniste/personnaliste. Nous devons apprendre à traiter toute personne en humain, que nous soyons des Chefs ou pas. Seule en abordant nos semblables en humain digne de respect nous pourrons mettre un terme à ces pratiques sociales rétrogrades comme les enfants en domesticité (Restavek), la violence contre les femmes, la zombification (sous toute ses formes), la violation du droit de propriété, le mépris dans les bureaux publics, l’absence de services de base, le non-respect des abonnées, le non-respect des promesses électorales, l’entassement des prisonniers comme dans des camps de concentration, l’emprisonnement abusif, le bastonnade, l’abus de pouvoir, l’intolérance dans les débats publics, le non-respect des travailleurs, le renvoi sans solde des militaires haïtiens et autres fonctionnaires, etc. Le respect de l’autre, parce qu’il est humain, parce qu’il est une personne, apportera la paix et la stabilité.

Sans être un idéaliste-utopiste, nous disons que les rapports entre personnes dans ce pays sont un facteur déterminant de paix social. Souvent nous provoquons des situations historiques regrettables à cause de nos préjugés. Des aigris en quête de reconnaissance sont isolés et se livrent à des manœuvres antinationales pour se venger d’un groupe social qui l’humiliait. Ils adoptent des comportements arrogants en signe de puissance, de pouvoir et de réussite : sirène, armes à feu, vitre teinté, des paroles bruyantes,…

Point besoin de séance de thérapie comme ‘‘Dialogue national’’ ou ‘‘Contrat social’’, le sentiment de respect de l’humain c’est qui nous manque. Cultivons le, on ne sera plus déçu de nos comportements. Institutionnalisons ces valeurs à travers une CHARTE HAITIENNE DE DROITS DE LA PERSONNE. Elle créera l’espace nécessaire à cette civilisation de l’homme. Elle nous affranchira idéologiquement du totalitarisme de l’Etat prédateur et répressif d’Haïti et de tous les ‘‘petits chefs’’ qui nous asservissent en son nom.

Cyrus Sibert
13 Août 2008
Cap-Haïtien, Haïti

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