samedi 29 mai 2010

Compte-rendu du Débat sur le PSSN à l'Université Paris VIII

Compte-rendu du Débat sur

Le Plan Stratégique de Sauvetage National (PSSN) à l'Université Paris VIII.

Le Conseiller Technique du Plan Stratégique de Sauvetage National, Guichard Doré, a été l'invité, ce vendredi 28 mai 2010, du Groupe de Réflexion sur Haïti de l'Université Paris VIII afin de présenter et d'animer un débat sur le Plan Stratégique de Sauvetage National (PSSN) avec les chercheurs et spécialistes travaillant sur Haïti et l'Amérique Latine. L'Intervenant dans un exposé de 45 minutes a présenté les points saillants des axes stratégiques de la première partie du PSSN : « Réformer l'Etat et mettre en place le processus de la décentralisation ». Dans un brillant exposé de facture technique remarquable bourrée de concepts de management public et d'ingénierie organisationnelle, Monsieur Doré a attiré l'attention des chercheurs et spécialistes présents sur l'impérieuse nécessité de moderniser et de renforcer les capacités organisationnelles de l'Etat haïtien et sur l'urgence de l'institutionnalisati on de la démocratie en Haïti. Il a mis l'accent sur la déconcentration, la décentralisation et la promotion des valeurs républicaines en Haïti. Le conférencier croit que « la mauvaise gouvernance et les assauts antidémocratiques constituent une menace sérieuse pour la stabilité républicaine et la coexistence pacifique en Haïti ». L'invité s'est prononcé « pour l'émergence d'une élite républicaine qui doit prendre en charge la dynamique historique de la nation et conduire le changement programmatique de la société ».


L'invité s'est prononcé contre l'occupation du pays et réclame la création d'une force armée de type militaire pour assurer la sécurité interne et externe de l'Etat haïtien. Doré affirme qu'il y a toujours « une commande publique de type militaire en Haïti depuis 1994. Il y a toujours des militaires en Haïti sauf qu'ils ne sont pas des Haïtiens. » Il croit que l'État ne peut pas se désengager des missions de souveraineté nationale. « La Nation doit se doter des moyens pour faire face aux différentes menaces et atteintes possibles à sa sécurité, qu'elles proviennent d'actions hostiles ou de catastrophes naturelles. La sécurisation des frontières et de l'espace territorial national est primordiale » Dénonçant que la sécurité extérieure de l'Ile d'Hispaniola est assurée depuis la dissolution de la FADH par l'armée dominicaine, il pense que « la dissolution de la FADH n'a fait que casser la colonne vertébrale de la société haïtienne. » L'armée dit-il fait partie de la formation sociale haïtienne. Il croit ce qu'il fallait faire en 1994 c'était la réforme de l'institution militaire et non sa dissolution. Pour lui, la sécurité nationale est totale « elle embrasse la sécurité intérieure et la sécurité extérieure d'Haïti. Elle mobilise les moyens militaires, les moyens civils, économiques et diplomatiques ». Pour lui, il n'y aura pas d'investissements importants en Haïti sans une force armée nationale pour assurer la sécurité intérieure et extérieure de l'Etat. Pour Doré, l'armée dominicaine est une garantie pour les investissements privés en RD. Croyant dans les valeurs républicaines, il s'est prononcé pour le respect de la Constitution de 1987 qui reconnaît deux forces armées en Haïti.


Doré s'est dit pour la professionnalisation de la police nationale, de la fonction publique d'Etat et de la fonction publique des Collectivités Territoriales. Il opte pour une meilleure gouvernance stratégique du pays. « Les élites caribéenne sont en compétition, les Haïtiens doivent comprendre cette réalité ». A ses yeux, « le PSSN doit être la voie intellectuelle à suivre pour construire un pays sociologiquement réconcilié avec le progrès afin de forger un destin humainement acceptable pour le peuple Haïtien ». Il s'est positionné pour la double nationalité et dit qu'il faut « utiliser la diaspora comme un instrument de politique de puissance et mettre la diplomatie haïtienne au service du développement économique du pays ».


Monsieur Doré qui conduit actuellement des recherches en économie de l'éducation et du développement, affirme qu'il faut : « assurer la diversification sociale du marché des élites en Haïti en donnant des bourses d'études d'excellence aux étudiants issus des familles socialement et économiquement défavorisées ayant des capitaux cognitifs supérieurs à la moyenne de leur groupe d'âge ». Il croit qu'il faut conduire une véritable politique d'éducation et de formation mais, a-t-il soutenu « la trappe à pauvreté conduit à une trappe éducative (….) la pression démographique induit une pression pour la scolarisation universelle » Affirmant qu'avant le séisme, il y avait 500.000 enfants d'âge scolarisables qui étaient exclus du système éducatifs, le conférencier croit que le déséquilibre entre la démographie et la croissance économique agit négativement sur le système éducatif haïtien. Il prône le développement des capacités d'adaptation du système éducatif et la pertinence des disciplines enseignées au regard des besoins présents et futurs de l'économie et du développement global de la société. Il a évalué à $100 millions par an la somme d'argent que les étudiants haïtiens paient pour leur formation en République Dominicaine.


Après l'exposé riche et éclairant qu'il a présenté avec conviction, les chercheurs, qui composaient l'assistance, étaient invités à établir un dialogue contradictoire avec le conseiller technique du PSSN. Dans un débat argumenté, intéressant et d'intérêt public, divers points et interrogations relatifs aux enjeux de la modernisation politique en Haïti ont été soulevés : les paramètres de la sécurité et la question militaire, la gouvernance administrative et politique, le rôle de la diaspora, la diplomatie haïtienne, la réforme de la justice, les enjeux de la décentralisation dans le contexte d'un Etat faible, la coopération internationale, le capital humain ect. Satisfait de cette première rencontre, l'auditoire a remercié Monsieur Doré pour son exposé et lui a demandé de présenter ses mots d'encouragement aux initiateurs du PSSN.


Le président du Groupe de Réflexion sur Haïti a chaleureusement remercié Monsieur Doré et l'a invité à venir présenter la deuxième partie du PSSN « libérer la croissance et promouvoir le développement socioéconomique. » au Groupe de Réflexion sur Haïti de l'Université Paris VIII le vendredi 2 juin 2010. Ce débat sera ouvert à d'autres groupes de spécialistes.


Par ailleurs pour permettre à l'ensemble de la communauté de bénéficier, de discuter et de partager avec les porteurs de ce projet de société remarquable pour Haïti, plusieurs organisations ont décidé d'inviter au mois de septembre 2010 les membres du Comité de Pilotage du PSSN et les acteurs européens du développement qui agissent sur le terrain en Haïti avant et après le séisme du 12 janvier dans un grand rassemblement à Paris autour du PSSN.

Paris le 29 mai 2010

Jean Emmanuel


Membre du Groupe de Réflexion sur Haïti de l'Université Paris VIII

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