mardi 15 avril 2014

La BRH donne la parole aux chiffres

Le Nouvelliste | Publié le : 14 avril 2014
En plein débat sur l'état des finances publiques après l'intervention du président Michel Martelly dans le Sud, la dernière note de conjoncture de mars 2014 de la BRH affiche la réalité de certains chiffres. Ce document analyse les développements récents observés dans l'économie haïtienne en mettant l'accent sur l'une des principales composantes de la politique économique : la politique monétaire. Il présente le cadre de la politique monétaire qui permet d'établir le lien entre les différents secteurs de l'économie et la sphère monétaire. Son objectif est de renseigner le public sur l'orientation de la politique monétaire, de rendre compte des dernières décisions prises par les autorités et de dégager les perspectives à court terme pour l'économie nationale. 





Avant-propos Ce document analyse les développements récents observés dans l'économie haïtienne en mettant l'accent sur l'une des principales composantes de la politique économique : la politique monétaire. Il présente le cadre de la politique monétaire qui permet de faire le lien entre les différents secteurs de l'économie et la sphère monétaire. Son objectif est de renseigner le public sur l'orientation de la politique monétaire, de rendre compte des dernières décisions prises par les autorités et de dégager les perspectives à court terme pour l'économie nationale.

I. VUE D'ENSEMBLE Au deuxième trimestre de l'exercice 2014, les autorités monétaires ont procédé à un changement d'orientation de la politique monétaire en décidant de resserrer les conditions monétaires par le relèvement des taux directeurs de deux points de pourcentage pour la première fois depuis quatre ans. Cette décision a été adoptée à cause des incertitudes qui entourent l'environnement économique national et international qui pourraient affecter les fondamentaux macroéconomiques.

Sur le plan international, le raffermissement de l'activité économique mondiale s'est poursuivi conjointement avec le ralentissement de l'inflation. Sur le plan national, la performance de l'activité économique réalisée en 2013 et au premier trimestre 2014 s'est consolidée au deuxième trimestre de cet exercice en raison du dynamisme du secteur de la construction et aux exportations de l'industrie de la sous-traitance. L'inflation a poursuivi sa tendance baissière malgré la volatilité enregistrée au niveau du taux de change à partir du deuxième trimestre après une longue période de stabilité. En dépit du ralentissement des importations de biens, le déficit de la balance commerciale s'est accentué, ce qui a contribué à la tension observée sur le marché des changes. De ce fait, en dépit des interventions à la vente de la BRH sur le marché des changes, le taux de change de la gourde par rapport au dollar a augmenté. En ce qui concerne les finances publiques, la situation financière de l'État s'est dégradée, conduisant à une augmentation du financement monétaire de 3,1 milliards de gourdes à la fin du mois de février 2014. La base monétaire au sens du programme a augmenté de 6,3 % et de 1 % au sens large. Les données préliminaires laissent entrevoir une baisse de 5,25 % de la masse monétaire M3 et d'une croissance du crédit au secteur privé. De son côté, le système bancaire est demeuré performant, sain et solide.

II. L'ENVIRONNEMENT ÉCONOMIQUE SOUS-JACENT À LA POLITIQUE MONÉTAIRE Les données disponibles indiquent une légère reprise de l'activité économique mondiale au cours de ce semestre comparativement à 2013. Cette évolution a été observée en particulier aux États-Unis d'Amérique où, selon les données préliminaires, on s'attend à une hausse de 2,6 % de l'activité économique au premier trimestre, alors que l'inflation est tombée à 1,10 % en février après avoir atteint 1,60 % en janvier. D'un autre côté, le taux de chômage qui a atteint 6,70 % en décembre 2013 et janvier 2014 est tombé à 6,60 % en février 2014. Par ailleurs, les taux d'intérêt sont restés inchangés à leurs bas niveaux historiques alors que la Fed poursuit sa politique de diminution graduelle de rachat des titres obligataires. En République Dominicaine, l'inflation poursuit également sa tendance à la baisse pour se porter à 2,82 % en février 2014 contre 2,84 % en janvie 2014. En outre, la Banque Centrale Dominicaine a gardé son principal taux directeur au même niveau, soit 6,25 %.

Sur le plan national, les principaux indicateurs de conjoncture publiés pour le premier trimestre et les projections réalisées pour le second trimestre ont fait état d'une embellie de l'activité économique. En effet, à l'exception de la production de l'énergie électrique qui a diminué de 13 %, tous les autres indicateurs sont orientés à la hausse. En effet, pour le trimestre en cours, l'indice de la production industrielle et celui de l'activité de construction auraient augmenté de 7,3% et 7,8 % respectivement. L'indice de l'activité commerciale devrait enregistrer une augmentation de 8,1 % en variation trimestrielle. L'inflation en glissement annuel, a poursuivi sa tendance à la baisse usqu'en février 2014. En effet, après avoir stagné à 3,4 % de novembre 2013 à janvier 2014, l'inflation a reculé de 20 points de base au mois de février pour se porter à 3,2 %. Quant à l'inflation sous-jacente, elle a baissé de 20 points de base à 3,54 % en février 2014 par rapport au mois précédent. Cette baisse de l'inflation en février résulte particulièrement de la relative stabilité des prix sur les marchés local et international. Sur le marché local, les prix sont restés relativement stables en raison de l'offre alimentaire qui a crû jusqu'en janvier 2014. Parallèlement, au début de ce trimestre, l'indice FAO des prix alimentaires a baissé en janvier 2014 (202,9) par rapport à décembre 2013(205,8) mais est remonté en février (208,1).

Au deuxième trimestre de l'exercice 2014, la situation du secteur externe de l'économie haïtienne s'est dégradée par rapport à la même période de l'exercice précédent. En effet, le déficit commercial s'est accentué, ce qui a contribué à une dépréciation de la gourde par rapport au dollar américain. D'octobre 2013 à décembre 2013, le déficit commercial s'est porté à 757,2 millions de dollars ÉU, soit une hausse de 1,36 % par rapport à la même période de l'exercice antérieur. Cette évolution s'explique par la baisse des exportations et la stagnation des importations. En effet, les exportations de biens et services pour le premier trimestre de cet exercice ont été estimées à 354,34 millions de dollars contre 364,29 millions au cours de la même période de 2012, ce qui correspond à une baisse de 2,7%. Les importations ont été chiffrées à 1,1 milliard de dollars soit le même montant de 2012 à pareille époque. En dépit de la forte croissance de 13,40% des transferts sans contreparties au cours des cinq premiers mois de l'exercice, la tension sur le marché des changes s'est accentuée au début du second trimestre. Ainsi, au 18 mars 2014, le taux de change de fin de période s'est établi à 44,53 gourdes pour un dollar ÉU, accusant ainsi une hausse de 1,48 % par rapport au 31 décembre 2013 et de 1,76 % par rapport au début de l'exercice 2014. Ces fluctuations enregistrées sur le marché des changes ont porté les autorités monétaires à intervenir afin d'augmenter l'offre de devises dans le but de lisser les fluctuations du taux de change. Elles ont procédé à des ventes nettes totalisant 16.5 millions de dollars ÉU au cours des mois de janvier et février 2014. Conséquemment, les réserves nettes de change sont passées de 1,12 milliard de dollars ÉU en décembre 2013 à 992,85 millions de dollars ÉU au 12 ars 2014, soit une baisse de 11,26 %.

Au niveau des finances publiques, les recettes fiscales cumulées pour les six premiers mois de l'exercice fiscal 2013-2014 ont été chiffrées à 23 288 MG de gourdes contre 22 007 MG de gourdes à la même période de 2012-2013, soit une hausse de 5,8 %. Toutefois, le rythme de progression des dépenses publiques a été plus prononcé, avec un taux de croissance de 13,5 % en s'établissant, en valeur cumulée d'octobre 2013 au 26 mars 2014 à 33 502 MG de gourdes contre 29 517 MG à la fin du mois de mars 2013. Cette évolution des dépenses publiques a entrainé une dégradation de la situation des finances publiques. En effet, le financement monétaire est évalué au 26 mars 2014 à 3,1 milliards de gourdes contre 335,7 millions en mars 2013.

III- LES DECISIONS DE POLITIQUE MONETAIRE AU DEUXIEME TRIMESTRE 2014 Le maintien de la stabilité des prix reste et demeure la préoccupation principale des autorités monétaires haïtiennes. Au cours du deuxième trimestre de l'exercice fiscal 2014, l'un des faits saillants ayant caractérisé la conjoncture économique nationale est la volatilité du taux de change dans un contexte de décélération continue de l'inflation. En effet, après une période d'accalmie pendant laquelle le taux de change de fin de période a affiché une remarquable stabilité en évoluant autour de 43,75 gourdes pour un dollar américain, au début du deuxième trimestre de cet exercice cette situation a été renversée. Le taux de change de fin de période a repris sa remontée en janvier 2014 pour atteindre 44,53 gourdes en mars 2014. Parallèlement, l'inflation a poursuivi l'orientation baissière amorcée depuis mai 2013 en s'inscrivant à 3,2 % en février 2014 après avoir stagné à 3,4 % pendant les trois derniers mois. Face à cette situation et compte tenu des incertitudes entourant l'environnement économique et financier national et international relatives à la nature et l'ampleur des chocs éventuels d'origine interne et externe qui pourraient surgir à court et moyen termes, il a été décidé de resserrer les conditions monétaires en relevant non seulement les taux des réserves obligatoires et les taux directeurs mais en modifiant aussi le mode de constitution des réserves obligatoires des passifs libellés en devises étrangères.

Cependant, l'exonération accordée aux banques depuis 2010 pour les prêts sains au logement est maintenue inchangée. Cette décision rentre dans le cadre des mesures préventives destinées à se prémunir contre le risque de reprise des tensions inflationnistes en cas de chocs macroéconomiques internes ou externes. Suite à cette décision, dès le premier avril 2011, les coefficients de réserve obligatoire sur les passifs en gourdes seront passés à 37 % pour les banques commerciales et les filiales non bancaires et 25,5 % pour les banques d'épargne et de logement. Ceux des passifs libellés en devises étrangères seront passés à 39 % pour les banques commerciales et les filiales non bancaires et 27,5 % pour les banques d'épargne et de logement. Le mode de constitution des réserves sur les passifs en monnaies étrangères qui ont été ramené à 100 % au cours de l'exercice 2012 sont actuellement de 10 % en gourdes et 90% en monnaies étrangères. Par ailleurs, à compter du 24 mars 2014, les taux d'intérêt nominaux sur les Bons BRH de toutes maturités ont été augmenté de deux points pour se fixer comme suit : 3 % pour les bons à 7 jours, 4 % pour les bons à 28 jours et 5 % pour les bons à 91 jours. En ce qui a trait à la gestion de la liquidité bancaire via l'adjudication des bons BRH, l'encours des bons BRH qui a légèrement augmenté en janvier 2014 par rapport au début de l'exercice, a graduellement diminué pour atteindre 5,26 milliards de gourdes au 12 mars 2014. Il importe de noter que l'encours des bons BRH a été modulé en tenant compte des émissions des Bons du Trésor de façon à favoriser la participation des banques commerciales et autres institutions financières aux adjudications. Notons que le Trésor Public a procédé à deux émissions de billets de trésorerie au cours du deuxième trimestre 2014 pour un montant total de 2 880 millions de gourdes. En outre, la Banque Centrale a fait des interventions sur le marché des change en réalisant des ventes nettes de 16.5 millions de dollars américains dans le but de conforter l'offre de devises sur ce marché. Cette vente de devises a permis à la banque centrale d'absorber un montant de liquidité équivalant à plus de 700 millions de gourdes. En ce qui concerne les agrégats monétaires, la dégradation de la situation des finances publiques ayant conduit à une augmentation de 28,7 % du financement de la BRH a affecté les créances sur le gouvernement central qui ont progressé de 38 %, un rythme toutefois moindre que celui du trimestre précédent (44,9%). Du côté des avoirs extérieurs nets, une baisse de 4,2% a été constatée suite aux interventions à la vente sur le marché des changes et aux paiements en devises réalisés. Ces deux principaux facteurs combinés ont contribué à des replis de 1,63% de la base monétaire telle que définie dans la FEC et de 2,39 % de la base monétaire au sens large1.

Au passif de la base monétaire, on notera que les réserves des banques sont reparties à la hausse (4,59 %) après avoir affiché une tendance baissière au cours de l'exercice précédent ainsi qu'au 1er trimestre. Quant à la monnaie en circulation, elle accuse une baisse de 10,02 %, suite au pic saisonnier qui la caractérise généralement en décembre. Cependant, quand on la compare à son niveau de novembre, une hausse de 6,17 % est observée.

Les dernières données disponibles sur la mase monétaire remontent au mois de décembre 2013. Toute fois, en supposant que le multiplicateur monétaire se maintienne autour de la moyenne observée durant les douze mois précédents (1,64), la masse monétaire M3 devrait se situer autour de 154 milliards de gourdes à la fin du mois de mars 2014, affichant ainsi une baisse de 5,25 % sur le trimestre. Cette diminution fait suite à une augmentation au 1er trimestre de 1,96 %, laquelle était particulièrement liée à une faible hausse du crédit au secteur privé (2,39 %) ainsi qu'une hausse des engagements extérieurs tant au niveau de la banque centrale que des banques commerciales, conduisant à une réduction de 6,31 % des avoirs extérieurs du système bancaire.

Les données disponibles jusqu'au 31 janvier 2014 indiquent que le système bancaire haïtien continue à afficher une très bonne performance. Les principaux indicateurs financiers témoignent d'un système relativement sain et solide. En effet, le bénéfice net cumulé pour les quatre premiers mois (octobre 2013-janvier 2014) de l'exercice 2013-2014 a atteint 771.4 millions de gourdes, soit une hausse de 10,7 % par rapport à la même période de l'exercice précédent. Cette évolution positive a été d'une part soutenue par les « Revenus d'intérêt » qui ont crû de 14, 0 %, à 1.9 milliards de gourdes et d'autre part par les « Revenus nets d'intérêt » qui ont augmenté de 11,5 %, à 1.7 milliards de gourdes. Ces deux postes combinés, ont permis au « Produit net bancaire » de s'accroître de 11 % sur la même période. Du côté du bilan du système bancaire établi à 175.9 milliards de gourdes en janvier 2014, une hausse de 2,2 % a été constatée par rapport au 1er trimestre de 2014. Cette situation est surtout due à la croissance des dépôts à vue du système qui sont passés de 69.5 milliards de gourdes en décembre 2013 à 72.4 milliards de gourdes un mois après. Par ailleurs, la part des prêts nets de même que celle des bons BRH dans l'actif total du système bancaire a baissé respectivement de 103 et de 30 points de base pour se fixer à 36.16 % et 3.59 % en janvier 2014. Cette situation serait provoquée par la réallocation des ressources du système bancaire dans d'autres activités beaucoup plus rentables. Concernant les ratios financiers, une détérioration du taux des improductifs a été constatée, passant de 3,53 % en janvier 2013 à 3,79 %, 12 mois plus tard (en glissement annuel). Ce résultat est surtout la conséquence du montant élevé des prêts accordés aux secteurs « Immobiliers résidentiels et commerciaux », « Hôtellerie » et « Bâtiments et Travaux Publics ». Cependant, en variation mensuelle, une amélioration du taux des improductifs de 48 points de base a été observée suite aux mesures prises par les Autorités monétaires afin d'assurer la bonne santé du système bancaire et d'éviter tout risque de surchauffe.

Quant aux ratios de rentabilité ROA et ROE, ils ont connu une évolution contrastée en glissement annuel, puisque le premier a gagné un point de base à 1,27 %, tandis que le second a perdu près de 3 points de pourcentage à 16,25 % en janvier 2014. Par ailleurs, en variation mensuelle, les deux ratios ont baissé respectivement de 24 points de base et de 3,22 %. Cette évolution est causée en grande partie par la baisse de l'actif du système par rapport aux hausses du bénéfice net et de l'avoir des actionnaires. Le graphique ci-dessus traduit dans une certaine mesure une légère détérioration des activités d'intermédiation bancaire. La part de crédit accordée aux agents économiques et aux entreprises rapportée aux dépôts du système a baissé pour atteindre 42,43 % en janvier 2014 contre 43,90 % un mois plus tôt. Cependant, en glissement annuel, une forte amélioration de ce ratio a été constatée.

IV- PERSPECTIVES Les perspectives à court et moyen termes de l'économie haïtienne demeurent bien orientées compte tenu de la poursuite des activités de construction sur le plan local et aussi des perspectives en termes de créations d'emplois et de croissance économique aux Etats-Unis. L'évolution haussière des envois des fonds des migrants vers Haïti devrait se maintenir normalement et conforter l'offre de devises sur le marché des changes haïtien. La stabilité des prix des produits de base sur les marchés internationaux devrait être favorable à l'évolution des prix à la consommation en Haïti. Toutefois, une diminution de la disponibilité de produits alimentaires, occasionnée par la période de sécheresse, pourrait être défavorable à l'évolution du prix de ces derniers. Dans un tel contexte, les autorités monétaires ont préféré être prudentes en adoptant une posture monétaire restrictive. Ces décisions vont permettre d'une part, de contenir l'inflation qui pourrait résulter de la dépréciation accélérée du taux de change. D'autre part, elle favorisera l'augmentation de la liquidité en devises des banques et conséquemment assouplir les conditions d'octroi des crédits en dollars, en soutenant l'offre de devises sur le marché des changes. Par ailleurs, la Banque Centrale, dans l'objectif de préserver la stabilité des prix et du cadre macroéconomique, continuera à être attentive en prenant les décisions nécessaires et appropriées aux développements de la conjoncture nationale et internationale.

http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/129854/La-BRH-donne-la-parole-aux-chiffres.html 

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RESEAU CITADELLE : LE COURAGE DE DIRE LAVERITE!!!
"You can fool some people sometimes, 
But you can't fool all the people all the time."
 (
Vous pouvez tromper quelques personnes, parfois, 
Mais vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps.
) dixit Abraham Lincoln.

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