jeudi 24 avril 2008

Préval veut bâillonner l’Assemblée Nationale


Par Eddy Pierre-Paul

Le président René Préval traîne les pieds pour ne pas nommer un nouveau premier ministre. Il veut laisser passer le temps pour que le groupe des 16 sénateurs qui a renvoyé le gouvernement d’Alexis se désagrège. 6 sénateurs seront en fin de mandat le 8 mai prochain, théoriquement après le vote de la loi électorale. Il restera donc 10 sénateurs qui n’auront pas la majorité pour agir.


En effet, le Sénat se compose de 30 membres. Si on tient compte des sénateurs morts et démissionnaires, il ne reste que 21 sénateurs. Devant la fermeté de l’opinion publique et des bailleurs de fonds, Préval se sent le dos au mur et essaie de faire passer ses idées pour la formation d’un gouvernement fort (dictatorial ?) avec le faux sourire de la concertation au Palais national. Il croit avoir tous les atouts pour chloroformer tout le monde, s’appliquant à consulter des gens pour lesquels il n’a aucun respect. Des observateurs crédibles pensent qu’il aurait voulu gouverner sans un nouveau premier ministre, comme il l’avait fait au cours de son premier mandat, après la démission du premier ministre Rosny Smart, en 1998. D’aucuns estiment que la situation calamiteuse de l’économie et de la politique nationale sous Préval II s’explique aussi par le silence de ce Premier ministre qui a caché les outrances les plus cavalières qu’il a dû subir sous ce gouvernement au nom de la solidarité idéologique.

L’État contre le peuple

Les résultats de l’administration Préval sont mauvais. La levée de boucliers du mois d’Avril 2008 a eu des répercussions internationales. La péjoration de l’effondrement de l’économie haïtienne est dangereuse. Après le prix du riz, ce sont ceux de l’huile de cuisine, des pois, de la farine, etc. qui grimpent dans tous les marchés. Le sac de mais importé se vend à 200 dollars, et est donc plus cher que celui du riz. Les mesures annoncées par le président Préval pour faire baisser le prix du riz sont appliquées de manière inégale, créant ainsi la confusion. Les employés de l’Electricité d’Haïti (EDH) rentrent en grève. Ils ne sont pas payés car l’Etat accapare 50% des recettes de la compagnie.


Pourtant, il faut le reconnaître, cette situation était programmée. Il faut le reconnaître. Avant même que les étoiles pâlissent dans le firmament politique et économique haïtien, Raoul Peck a eu de l’avance. Ayant été Ministre de la culture sous le premier gouvernement Préval, Raoul Peck a démissionné pour dire non à la politique de l’absurde. Son témoignage dans son très beau livre «Monsieur le Ministre ….Jusqu’au bout de la patience » garde toute sa pertinence aujourd’hui. L’abêtissement des citoyens orchestré par la dictature des Duvalier a contribué à un abaissement de la personnalité de la classe politique. Les citoyens ne sont plus eux-mêmes devant le président, le directeur, le patron, etc. Nombre de ceux qui ont refusé d’être des ombres (zombis) ont été tués ou sont partis en exil. Et les jeunes qui sont en majorité aujourd’hui sur le terrain politique n’ont pas reçu une formation adéquate pour faire face aux impératifs de l’heure.
Rares son ceux comme Raoul Peck qui ont refusé de rester au gouvernement pour le plaisir de la mystification. Il a constaté comment les responsables politiques et économiques font partie d’un réseau de relations où l’on se protège mutuellement. Cette machine de malheurs sous le contrôle du président de la république est une nuisance tant à l’économie qu’à la politique. La démission de Raoul Peck après 20 mois au gouvernement est une exception.


Depuis le renversement du gouvernement de Jacques Edouard Alexis par un vote de censure, Préval se démène pour trouver un Premier Ministre à travers de multiples consultations avec les partis politiques et la société civile dans le but de tromper tout le monde, fait-on remarquer dans les milieux politiques haïtiens. En effet, Préval déclare « Nou té chita ansamb, nou pat vanse ansamb » (on était assis ensemble mais on n’avançait pas ensemble) pour expliquer l’échec cuisant de son gouvernement sanctionné par les émeutes de la faim de la première semaine d’Avril 2008. Chaque ministre du cabinet Préval/Alexis ignorait ce que faisait l’Exécutif. C’est à la radio qu’il apprenait les décisions arrêtées par le gouvernement. Pour pouvoir gouverner sans un programme et sans des objectifs clairs et précis, M. Préval avait recouru à la tactique d’acheter les consciences des ministres mais aussi des dirigeants des autres partis politiques tels que Lespwa, Fusion, OPL, Pont, Alliance, etc. composant le gouvernement pluriel dirigé par Jacques Edouard Alexis. Le Président a donc donné à manger aux représentants de ces différents partis politiques et ayant la bouche pleine, ils n’ont pas pu parler contre cette politique qui a abouti à ces émeutes. Non seulement ils n’ont pas pu parler, mais les responsables des partis politiques alliés au pouvoir ont également accepté de jouer le jeu du président Préval en déclarant qu’Alexis est le responsable des émeutes de la faim.

L’impossible chirurgie reconstructive de l’État

Maintenant, Préval continue dans sa politique de supercherie. S’étant rendu compte que le parlement constitue un obstacle à sa politique de faillite, il prétend vouloir créer cette fois un gouvernement de coalition. Quelle mystification ! On n’a pas besoin d’être grand clerc pour reconstituer le fil des décisions qui ont mené à la débâcle des émeutes. Le budget du gouvernement haïtien a toujours rimé avec gâchis. Dans le budget 2007-2008, sur 257 millions de gourdes demandés par l’ODVA pour relancer la culture du riz dans la vallée de l’Artibonite, le gouvernement n’a donné que 30 millions de gourdes. Sur un budget total de 77 milliards de gourdes cela représente moins de 1 pour cent. C’est justement à ce niveau que Préval veut avoir les mains libres. Il veut un parlement qui ne soit qu’une chambre d’enregistrement de ses décisions. Un parlement bidon. Il demande aux formations politiques et aux parlementaires d’appuyer la politique de son gouvernement au Parlement avant de nommer un premier ministre. Pour ne pas avoir de contestation parmi les pères conscrits, il introduit la dictature du pouvoir exécutif par la petite porte. Le désordre qui existe au parlement est encouragé en sous main. Tout est fait pour ne pas prendre le balai et faire le ménage.


En effet, le problème fondamental est que Préval n’a aucune vision. Il s’isole dans un style de gouvernement où il met à côté de lui uniquement des gens sans caractère qui n’osent pas lui dire non, quand il avance des bêtises. Avec sa présence au timon des affaires pour prendre les décisions, le problème reste entier. Aucun exercice de chirurgie reconstructive de l’Etat et de son autorité n’est possible avec lui. S’il veut être roi, qu’il le soit, mais qu’il laisse d’autres gouverner. Or justement, c’est là que le bat blesse. Il veut contrôler les moindres détails. Et c’est ainsi qu’il se tire chaque fois une balle dans le pied. Que ce soit lors de la réception au Palais national des bandits et kidnappeurs qui recommencent leurs actions criminelles une fois qu’ils ont consommé l’argent que leur a donné le pouvoir pour rester tranquille. Que ce soit lors de l’arrestation d’entrepreneurs accusés de fraude. Que ce soit avec ses déclarations ou avec son silence. C’est attristant, même pour ceux qui, comme Marc Bazin, n’ont pas épargné leur peine pour que Préval ait du succès en lui indiquant la marche à suivre. La vérité est que le citoyen qui dirige les destinées du peuple haïtien n’a aucune connaissance spécifique ni de vue d’ensemble sur la voie à suivre pour le développement en Haïti. En équilibriste hétéroclite, il n’accepte pas de travail d’équipe et se préoccupe beaucoup plus de se venger des dirigeants plus expérimentés que lui parce qu’il les trouve plus dérangeants. C’est, en tous cas, la perception des observateurs.

Motion de censure et vote de ratification


Mais la lenteur calculée de Préval dans le choix d’un nouveau Premier Ministre a aussi pour objectif de semer la confusion sur les rapports existant entre motion de censure et vote de ratification. Ce sont deux choses différentes. Certains prétendent que le nouveau premier ministre qui sera choisi par le président Préval devra être accepté automatiquement par le Parlement, une fois ses documents vérifiés. Selon ces gens, étant donné que le gouvernement de Jacques Edouard Alexis a reçu un vote de censure le 12 avril 2008, le Parlement ne peut donner aucun autre vote de censure en une année, soit pas avant le 12 avril 2009. Guyler C. Delva qui fait la promotion de Préval, et qui fait figure de son homme lige, défend cette conception bizarre contre les points de vue exprimés par Micha Gaillard et Patrick Elie. La motion de censure est l’un des moyens de contrôle de l'Assemblée Nationale sur le Gouvernement, quand ce dernier ne fait pas le travail pour lequel il a été nommé. Auditions, commissions d’enquêtes et interpellations sont d’autres moyens que peut utiliser le Parlement pour assurer son contrôle de la politique menée par le pouvoir exécutif. Ceci n’a rien à voir avec le vote de ratification qui concerne les actions du parlement sur les décisions prises par le pouvoir exécutif. Ces actions peuvent concerner aussi bien l’acceptation du choix du Premier Ministre que des traités ou accords internationaux. Le Parlement est dans son droit de dénoncer ou d’autoriser un choix du pouvoir exécutif.

La recherche d’un nouveau bouc émissaire

Le gouvernement de coalition nationale que voudrait Préval est une farce. Il veut se dégager de sa responsabilité de chef d’Etat en demandant aux autres partis politiques de cautionner sa politique vide et creuse. Ayant constaté comment la classe politique est tombée dans son piège de «fusible » avec le renvoi de Jacques Edouard Alexis, il continue, persuadé qu’il n’aura pas de comptes à rendre. Dans son entendement, un premier Ministre est un raccourci qui lui évite de répondre de ses actes devant la justice et devant le peuple. Il se trompe grandement. Pour mettre fin à la politique de l’absurde qui prévaut en Haïti, il faut faire appel à la compétence. Raoul Peck termine le chapitre « les Silences du Palais » de son livre par la citation suivante : «C’est qu’un jour Aristide puisse sacrifier son marassa Préval sur l’autel de sa propre rédemption, en en faisant le bouc émissaire de sa propre rédemption.» (pages 64-65). Préval a appris à la bonne école. Après avoir sacrifié Jacques Edouard Alexis, la classe politique se prépare à lui donner une autre victime. La comédie continue.

Préval est démissionnaire


Jean Erich René
24 avril 08

Au cours de la deuxième moitié des années 1980, on assistait en Haïti à une véritable course vers l'idéal démocratique comme unique voie d'accès au développement économique et social. En effet, les révolutions socialistes étaient en perte de vitesse parce qu'elles n'ont pas pu apporter les germes d'espoir pour l'émancipation des peuples pauvres et opprimés. L'empire Soviétique s'est écroulé. Le mur de Berlin s'est effondré. Le nouvel ordre du jour c'était le pluralisme politique dont le corollaire obligé était la revendication d'élections libres. L'Eglise catholique avec sa doctrine sociale, le vent en poupe, a relayé avec succès les aspirations démocratiques pour chevaucher le pouvoir. Mais avec le temps, on s'est rendu compte que toutes ces démarches visaient à paver la voie à la mondialisation dont le menu est : le libre échange et la privatisation.

Une puissante machine politique internationale fut mise en marche. Développement économique et démocratie représentent les deux temps de cette nouvelle dynamique. L'implantation de la démocratie dans le Tiers-monde se heurte à des contradictions internes qui la mettent au rang d'utopie. La montée en flèche des aspirations démocratiques est certes le signe évident de la réussite économique des nations occidentales qui tendent vers l'universalité de leur modèle. Cependant la pluralité de nos sociétés et la diversité des horizons humains nous interdisent de réduire la démocratie à une simple critériologie. Au nom de l'objectivité des sciences sociales, évaluer Haïti selon le canevas des démocraties occidentales, est absurde.Il s'agit de deux univers différents avec des antécédents historiques nettement distincts.

La démocratie est inséparable de deux notions fondamentales : liberté et justice. La liberté est le premier attribut de toute démocratie. Pour répéter Platon : « La liberté incontrôlée des hommes les porte à s'autodétruire.» Hegel le grand philosophe affirme : « Si la liberté est laissée à la seule conviction personnelle de chacun, il n'y a pas de liberté.» Si la diversité des intérêts et des valeurs est reconnue, si la liberté d'expression est acquise, les codes de loi doivent fixer aussi les limites pour garantir une coexistence pacifique. Au nom de la liberté il n'est pas permis aux diplomates du béton de casser les vitres des voitures, de démolir les maisons des tiers et leurs magasins. Il s'agit d'actes criminels punis par le code pénal. Qui pis est, le Président affirme qu'il n'y peut rien.

Sans la justice la démocratie est un vain mot. Un climat de permissivité invite les criminels à récidiver sans éprouver aucune crainte. On comprend dès lors la persistance des actes de banditisme en Haïti. Le respect scrupuleux du cadre légal exige une certaine indépendance que l'environnement haïtien en proie à la misère et le contexte politique dominé par la violence ne garantissent pas. Quand le pouvoir utilise le service des bandits pour faire pencher les résultats des urnes en sa faveur ou pour avoir raison de ses adversaires, c'est la débâcle! Dans un pays comme Haïti, l'application de la démocratie selon le modèle occidental contribue davantage à l'intensification des penchants pervers au lieu de favoriser l'éclosion d'un climat propre au développement économique et à l'avancement social.. Tant et aussi longtemps qu'on n'arrive pas à tenir en laisse les chiens enragés ils continueront à mordre tous les passants, propager leur rage et troubler la paix sociale De jour en jour la liste funèbre s'allonge. Aucune justice n'a été rendue jusqu'à présent.

Le schéma weberien nous aide à identifier le noyau de la problématique haïtienne caractérisée par l'antinomie de la tradition et de la raison. Le 55e Président d'Haïti, par son comportement au pouvoir, n'obéit pas aux impératifs kantiens des normes et des principes propres à notre société. Il a brûlé les interdits constitutionnels, se foute de nos institutions et devient, par son nihilisme, nietzschéen. L'exercice démocratique exige un état major d'hommes et de femmes lucides et compétents .Tout fonctionnaire de l'État jouit d'un statut légal. Ses attributions sont clairement définies. Entre un Premier Ministre et un Président il ne peut pas exister un rapport de vassalité. Quel que soit le niveau d'un fonctionnaire de l'Etat dans la hiérarchie, il est assujetti à des règlements impersonnels et agit dans le cadre de la compétence objective selon les lois sur la fonction publique.

Il n'y a pas de rupture dans la chaîne de commandement. Le Président et le Premier Ministre sont solidaires de l'échec du Gouvernement. La barque nationale est à la dérive Depuis les émeutes de la faim René Prévale n'arrive pas encore à se remettre de ses émotions. Au moment ou les manifestants brisaient la barrière du Palais National et pénétraient sur la cour, la fille du Président qui observait cette scène macabre par la fenêtre, a avorté. La réaction de René Préval c'est de démissionner, comme en 1999 quand les chimères avaient attaqué la voiture de sa sœur qui depuis lors est paraplégique. Il a fallu le réconfort et l'assurance d’Ambassadeurs de France, des USA, du Brésil et du Chef de la MINUSTAH pour que René Préval garde encore le pouvoir le temps qu'on aménage un autre espace politique. Pour distraire les enfants vicieux un marathon, avec une grande bombance de sucreries, a été organisé autour du choix du Premier ministre. Dans le générique de cette comédie défilent les noms des bouffons les plus ridicules. La démocratie brandie comme vecteur de développement économique suppose d'abord la satisfaction des besoins de base et la mise en chantier d'institutions capables de l'irradier dans tous les compartiments de la société. Une démocratie sans pain n'est pas viable mais dangereuse et suicidaire pour les dirigeants politiques. Préval est démissionnaire.

mercredi 23 avril 2008

Plaidoirie pour la Police du Nord d’Haïti.

Une voiture de police en panne depuis huit jours
en pleine rue devant le commissariat du Cap-Haitien.

Cyrus Sibert, AVEC L’OPINION,
Radio Kontak Inter 94.9 FM
48, Rue 23 -24 B

Cap-Haïtien, Haïti
reseaucitadelle@yahoo.fr,
reseaucitadelle@gmail.com
www.reseaucitadelle.blogspot.com

Deux semaines après avoir fourni un travail de niveau professionnel, la Police dans le Nord d’Haïti fait face à de graves difficultés : Problèmes de matériels roulants, d’effectifs et surtout de frais pour carburants et pièces de rechange.

Si à travers le pays on fait l’éloge du calme dans le Nord alors que les investisseurs de la Capitale connaissaient la terreur de la populace en ce début d’avril 2008, c’est grâce au leadership responsable d’anciens dirigeants de l’ancienne opposition anti-Aristide et surtout au résultat du travail de la Police Nationale dans le Nord.

Alors que des bandits profitaient des manifestations de la faim pour saccager la capitale haïtienne, dans le Nord comme dans toute société humaine d’ailleurs, certains cherchaient à semer le trouble et projetaient de piller certains magasins et dépôts de produits alimentaires.

Les leaders de l’ancienne opposition ne se sont pas laissés pris dans le piège des pillards. Même quand ils étaient contre la politique de Jacques-Edouard Alexis, ils n’ont pas voulu créer une situation chaotique au profit des bandits souvent liés à Lavalas. La situation étant propice, les fonds distribués à des militants jugés violents par des larrons comme Moise Jean-Charles et Michel Saint-Croix ne pouvaient pas empêcher l’organisation de manifestations suivies d’émeutes de la faim.

De son coté la Police Nationale a fait un travail remarquable. Elle a pu maîtriser Cap-Haïtien, Saint-Raphaël et Limbé ; trois villes très distancées avec des routes impraticables.

Le corps de maintien de l’Ordre connu sous le nom de UDMO (Unité Départementale de Maintien de l’Ordre) et la Brigade d’Intervention de la Police Municipale du Cap-Haïtien ont fait un travail professionnel. Les policiers de ces corps ont maîtrisé les zones réputées chaudes, et cela, sans perte en vie humaine.

La Direction Départementale qui s’était donnée comme Mission le renforcement des Unités Spécialisées dont le Corps de Maintien de l’Ordre (UDMO) a gagné son pari. On pouvait assister à un déploiement spectaculaire de Policiers bien équipés et motivés. Associés aux agents de police du Commissariat municipal et appuyer par des Forces de la MINUSTAH qui organisaient des points fixes (Check point), le Corps UDMO a eu le contrôle de la situation.

Nous pensons que la Direction Générale de la PNH devrait prendre l’exemple du Nord et renforcer les Unités Spécialisées de Maintien de l’Ordre en attendant le retour incontournable de l’Armée Nationale. Même quand pour des raisons de sécurité le Directeur Départemental Joany Canéus refuse de fournir des informations sur ses effectifs et les matériels dont disposent ses hommes, nous pensons qu’avec 300 UDMO par département (en dehors de la zone métropolitaine) et une bonne répartition des ressources matérielles et financières, la Police Nationale d’Haïti pourra faire face à ses obligations de sécurité publique.

Cyrus Sibert
Cap-Haïtien, Haïti
23 Avril 2008


Nouveau premier ministre et prochain gouvernement : « pressions » sur Préval pour qu’il se décide rapidement

Les 16 sénateurs majoritaires donnent « la fin de la semaine »

Une certaine impatience était perceptible mardi au Parlement et dans la classe politique au sujet du temps mis jusqu’ici par le chef de l’Etat à désigner un nouveau premier ministre, dix jours après la destitution de Jacques Edouard Alexis par le Sénat.

Le groupe des seize sénateurs qui avait renversé le chef du gouvernement, a souhaité que le président de la République procède à ce choix d’ici la fin de la semaine en cours. « Pour le bien du pays, il est impératif que la période de liquidation des affaires courantes par le gouvernement démissionnaire n’aille pas au-delà de la semaine en cours », précise le groupe dans une lettre adressée lundi au chef de l’Etat.

Les « 16 » estiment que l’heure est à l’urgence. Le président de la République, le Parlement et les autres acteurs politiques doivent se mettre au travail en toute célérité en vue de doter le pays d’un nouveau gouvernement dont la mission première consistera en la mise en application d’une nouvelle politique qui puisse, à la limite des ressources du pays, satisfaire les revendications légitimes de la population, indiquent les 16 sénateurs.

Ils mettent l’accent sur la lutte contre la misère et la faim, la baisse du coût de la vie, la lutte contre le chômage et la corruption et la relance de la production nationale.

Le groupe se dit prêt à collaborer à la ratification du nouveau premier ministre et à l’approbation de sa déclaration de politique générale.

Dans le même temps, il appelle à la vigilance du chef de l’Etat et des institutions concernées afin que « les mesures administratives et financières prises pendant la période de liquidation des affaires courantes, soient conformes aux lois en vigueur sur la comptabilité publique ».

L’Organisation du Peuple en Lutte (OPL), l’un des principaux partis représentés au Parlement et au gouvernement, a elle aussi exhorté le président René Préval à se décider. Le coordonnateur de ce parti, Edgard Leblanc Fils, a souligné, lors d’une conférence presse mardi, la nécessité que le chef de l’Etat ne fasse pas durer « les consultations » et qu’il aboutisse au plus vite à des décisions, de concert avec les secteurs concernés.

Un député de l’OPL, Arcluche Louis Jeune, présent à la table de conférence, a accordé au président Préval un "délai" allant jusqu’au prochain week-end pour qu’il se décide.

L’idée que le président Préval soit généralement lent à se décider sur des questions cruciales, est très répandue dans les milieux politiques. Elle l’est aujourd’hui davantage en raison des soupçons ayant cours dans ces milieux sur l’intention qu’aurait le chef de l’Etat de retarder sa décision jusqu’au 9 mai, date de la fin du mandat de 8 des 16 sénateurs du bloc majoritaire actuel. [jmd/RK]

Haïti projette l’image d’un état en faillite selon Kesner Pharel



Le chroniqueur économique de radio Métropole, Kesner Pharel, affirme que les mouvements spéculatifs sont à la base de la hausse des prix des " commodities " (produits pétroliers et alimentaires) sur le marché international. Il révèle que le gouvernement haïtien recueille des dividendes additionnels à chaque augmentation des prix des produits pétroliers. Faisant référence à l’accord Pétrocaribe, M. Pharel croit que le gouvernement peut utiliser ces ressources pour réaliser des projets sociaux en faveur des couches défavorisées.

Interrogé sur la crise alimentaire, M. Pharel est perplexe estimant qu’on doit assumer à la fois les avantages et les inconvénients. " Haïti bénéficiera de la mobilisation de la communauté internationale", lance M. Pharel qui se réjouit de la prise de conscience du problème par les principaux bailleurs de fonds d’Haïti.

Cependant il soutient que cette situation a tendance à prouver que le pays ne peut avoir de développement durable à partir de la création d’emploi. " Il faut enlever l’étiquette " Haïti ne peut réussir sans l’aide internationale", dit-il soulignant que les progrès macroéconomiques enregistrés ces dernières années se sont volatilisés.

Selon Kesner Pharel il faut éviter à la fois une forte dépréciation ou une forte appréciation de la gourde. " Un dollar à 20 gourdes pénaliserait les exportateurs haïtiens", argue t-il.

Intervenant à la rubrique " Invité du jour " de radio Métropole, Kesner Pharel a soutenu que l’image projetée par Haïti est celle d’un état en faillite. " Nous avions eu au cours de nos 200 ans beaucoup plus de période de crise, alors que pour réaliser des progrès il faut de longues périodes de stabilité", ajoute t-il.

M. Pharel fait remarquer qu’il y a urgence sur le plan économique étant donné que 6 mois se sont écoulés dans l’exercice fiscale en cours.

En ce qui a trait aux pertes enregistrées par les entrepreneurs lors des attaques des 8 et 9 avril, M. Pharel indique que ces hommes d’affaires devront consentir de nouveaux prêts pour faire fonctionner leurs entreprises. " Il faut continuer avec les enquêtes judiciaires et envoyer des signaux clairs aux investisseurs", dit-il souhaitant une enquête parlementaire sur la passivité des forces de l’ordre lors de ces manifestations.

lundi 21 avril 2008

Nouveau Premier Ministre: Le jeu d'echec de Rene Preval (Part III)

Stanley Lucas

Le jeu d'echec de Preval progresse. Il continue de rencontrer les partis politiques, quelques parlementaires et les representants des partis politiques. La situation se corse, Preval ne demord pas, l'objectif n'a pas change, diviser pour regner et garantir que Preval nomme un fidele a la primature et garde les ministeres clefs tout en distribuant des miettes aux partis politques. Que s'est-il passe depuis notre dernier memo?

Preval et les negociations avec les partis politiques
Preval a avec lui Chavannes Jeune (Union) et Evans Paul (Alliance). Au niveau de ces deux partis la situation se degrade. Chavannes est comme un gaga et un naif quand il est en face de Preval. Les parlementaires du goupe de Chavannes Jeunes ont commence a prendre des distances par rapport a ce dernier. Les positions pro-Preval de Chavannes Jeune ne representent pas la volonte des votants des circonscriptions et departements des elus de ce parti. Au niveau d'Evans Paul son parti est divise et son support a Preval est en train de l'affecter encore plus.

Il semblerait qu'un des leaders socialiste (fusion) ,qui est a la recherche du poste de PM, donner depuis un an un suppot aveugle a Preval. Il est pret a se laisser rouler dans la farine par Preval pour avoir ce qu'il veut. Sur instruction de Preval, il serait charge de s'assurer que les elus socialistes au parlement rejoignent cette meme position. Tache impossible! Les elus socilaistes sont en rebellion contre Preval a qui ils attribuent la crise actuelle.

La meme situation existe au sein de l'OPL ou une partie du leadership s'est ecartee des lignes de principe de leur parti et de leur leader feu Gerard Pierre-Charles. Dans les negociations pour mettre en place le gouvernement, Preval semble vouloir discuter avec ses amis personnels au sein de l'OPL en lieu et place d'un rapport institutionnel avec le parti. Il a utilise cette meme approche pour rouler les partis dans la mise en place du CEP. Il est aide dans cette entreprise par ses amis du secteur prive des monopoles connus sous le nom de Groupe de Bourdon.

Preval a rencontre lavalas, leurs representants Yves Cristallin, ancien president lavalas de la chambre des deputes qui est maintenant administrateur au ministere de l'environnement, Samedi Jean Marie representant national, Lesly Gustave responsable de la plateforme Saint Jean Bosco, Jonas Coffy depute lavalas, Chimene Sylvestre un ancien activiste du palais national a l'epoque d'Aristide et ancienne compagne du pere Devalsaint, Son Ann qui souvent sponsorise les actes de violences et dont le nom avait aussi ete cite dans le kidnapping du bebe Nahoum Myrtil a l'hopital general, bebe utilise lors de la ceremonie cannibalistique appeles ceremonie Pilon chez Aristide (audio disponible). Plusieurs points furent souleves lors de la reunion mais nous allons mentionne deux de ces points. Preval a demande au groupe lavalas d'isoler le senateur Rudy Heriveaux et le senateur du parti Pont, ancien lavalas, Evaliere Beauplan.

La reunion entre les partis et Preval a confirme que ce dernier prefere negocie avec les 'vieux" et les "amis personnels" flexibles des partis pour mieux les rouler dans la farine. Preval prefere cette approche pour avoir constate que les "vieux" et "amis personnels" des partis sont plus interesses a regler leurs affaires personnels "zeb nan bouch" que les questions d'interets national. Des crises de la semaine derniere, ces chefs de partis n'ont rien apprit. Quand le pouvoir politique laisse les institutions, partis, executif et parlement, et tombe dans la rue a cause de ce genre de comportement qui ne prend pas en compte de l'interet collectif c'es dangeureux pour la stabilite politique du pays.

Preval et les negociations avec le parlement
Preval avait prevu de rencontrer encore une fois les presidents des deux chambres Lundi, a cause des pressions il a organise la reunion Samedi. Objectifs? casser la majorite parlementaire au senat et manipuler les deputes pour imposer son poulain qui executera ses ordres a la lettre. Les amis de Preval du groupe de bourdon l'aide non seulement dans la strategie mais aussi les moyens financier et autres avantages economiques. Nous sommes en train de collecter les donnees sur la question et nous y reviendrons.

Au senat un fosse est en train de grandir antre le president qui n'est pas neutre Kely Bastien (lespwa) et ses pairs. Bastien a epouse le plan de Preval et l'aide en ce sens. Cela risque de creer beaucoup de surprise et d'envennimer la crise. Ce qui ferait l'affaire de Preval qui a besoin plus de temps puisque 9 senateurs d'apres lui partiront le 15 Mai, la fin de leur mandat. Tandis le deal etait que ces senateurs partiraient apres le vote de la loi electorale. Le ptas pour-t-il attendre aussi longtemps?

Le bloc des 16 senateurs reste apparament homogene. Deux senateurs amis personnels de Preval qui font partie de ce bloc, qui lui ont rendu service dans le passe, ont ete contacte, nous y reviendrons. Au niveau du senat aucun des candidats actuels mentionne Eriq Pierre, Philippe Rouzier, Evans Lescouflair ou autres poulains du president ne passera. Au senat l'ancien ministre de la planification Jean Max Bellerive est le seul poulain de Preval qui semble faire l'unanimite. Son nom circulait dans les couloirs du palais puis retire de la course Jeudi par le goupe de bourdon qui aide Preval dans le choix du nouveau premier ministre. Sous Preval le groupe de bourdon a toujours controle la moitie du cabinet ministeriel.

Au niveau de la chambre des deputes c'est l'incertitude. Les 63 deputes qui avaient donne le vote de confiance a Jacques Edouard Alexis sont divise en deux groupes, le premier goupe qui continue a supporter Preval dans ses desiderata et le deuxieme groupe, les decus en revolte par rapport a la politique irresponsable de Lespwa. Stevens Benoit est l'expression publique du deuxieme groupe, on se demande pour combien de temps quand on sait qu'il change de position chaque semaine.

A cette phase des negociations le constat est que la plupart des parlementaires sont en train de prendre des distances par rapport aux chefs de parti defendant leurs interets personnels. Les parlementaires ont opte pour l'ecoute des revendications de la population et ont decide d'accompagner les citoyens dans cette quete de justice economique et sociale. Une chose est certaine les parlementaires ne veulent pas un "kavalye polka" (fidele du president) de Rene Preval comme premier ministre designe. Les parlementaires selon les criteres qu'ils ont soumis au president veulent un citoyen competent, independant, experimente et surtout un democrate capable de delivrer a la population. Preval repondra-t-il aux attentes?

Au Nom de Tous Ceux Qui Ont Faim, en Haiti.// Joel Deeb Chairman



20 April 2008

Quel Haitien pourrait rester insensible au spectacle douloureux d’un peuple tout entier qui a faim, et dont les conditions de vie, ainsi que les légitimes manifestations publiques qui en sont les résultats, aient pu servir d’opportunité ou de prétexte à la violence toujours inexcusable et condamnable des casseurs professionels qui ont été projeté sur la scène politique Haitienne, en 1990, dans une prétendue révolution marxiste qui, chez nous, est d’autant plus dure et criminelle qu’elle est conduite à petits feux, s’étalant sur 18 ans déjà, au lieu des quelques mois que cela avait duré en Union Soviétique, en Chine communiste, ou plus près de nous, à Cuba ?

En Haiti, nous en avons plus d’un ! Dans leurs malsaines alliances – les uns pour garder un pouvoir politique qui, depuis presque 20 ans, n’a rien apporté au peuple Haitien dont la misère s’est considérablement accrue, et dont les parents, enfants, alliés et amis sont en plus lâchement assassinés au quotidien au terme de tortures abominables qu’occasionnent leurs kidnappings, et les autres, pour continuer à confisquer cette miette relative qui seule en Haiti peut passer pour une richesse économique, tant elle est disparate face à la pauvreté qui afflige la vaste majorité de notre population, en milieu rural comme dans les horribles bidonvilles de l’environnement peri-urbain – et protégés par une soldatesque étrangère incapable de savoir si son engagement est au service ou contre la liberté dans notre Amérique, ils ne voient ni n’entendent le désespoir d’un peuple qui a tout perdu, jusqu’à sa souveraineté. Assez messieurs, assez !

Des Jean Bertrand Aristide aux Gérard Latortue, des Boniface Alexandre aux Jacques Edouard Alexis, des Carl Braun aux Edouard Baussan, des Andy Apaid aux Rudy Boulos, ils ont le pays sous coupe réglée, et comme si cela n’était pas suffisant, ils constinuent à le déshonorer dans la violence politique, le trafic illicite de la drogue, falsification de documents, le blanchissement de l’argent, et God knows what else ! Ils ne cessent de revenir à la charge, avec le même cortège d’individus corrompus lorsqu’ils ne sont pas tout simplement incompétents, toujours prêts à aider nos prédateurs politiques et économiques à saigner le pays à blanc, contre un poste de premier ministre ou de ministre dans des gouvernements sans vision, sans objectfs, sans volonté et sans moyens réels de gouverner, tant les donateurs internationaux sont aujourd’hui fatigués de se faire rouler comme dans la farine par des petits voyoux et trafiquants impénitents, sans imagination, sans panache, sans gêne et sans vergogne.

Nous sommes tous capables de puiser en nous la force nécessaire pour changer de coeur et de comportement. Ainsi, nous demandons aux prédateurs politiques et économiques du pays de s’écarter de cette maudite mangeoire qui leur font barrer la route à ceux qui peuvent et veulent gouverner pour le bien de tous, sans ostentation, mais qui hésitent encore parce qu’ils sont des gens de bien qui ont en horreur les violences et la calomnie.

Au président Préval, nous demandons la nomination d’un premier ministre compétent, capable de comprendre les besoins du peuple, et qui a la compétence dont le pays a besoin pour parvenir à des solutions réfléchies et efficaces aux multiples problèmes qui ne peuvent que s’aggraver sous la barre des incapables et des corrompus. C’est l’appel que je lance au nom de tous ceux qui ont faim, en Haiti.

Joel Deeb
Chairman
Omega Military Counsultant

Food Riots Lead to Haitian Meltdown


Monday, Apr. 14, 2008

The good news is that there hasn't been a coup d'etat in Haiti in the wake of violent protests over increased food prices. However Saturday's vote by 16 of the country's 27 lawmakers to oust Prime Minister Jacques Edouard Alexis means that the country is in the middle of a severe leadership crisis — and that Haiti's Head of State, President Rene Preval, is now politically impotent, bereft of his chief executive.

Preval, who called the Senate vote on Alexis unjust, must now present a new candidate to parliament. Meanwhile, the government is in a lame duck position, with all current cabinet ministers, as well as other secretaries of state in appointed positions, reduced to caretakers. It could be some time before the lawmakers approve a new candidate since there is no majority party in the legislature.
And here's where the bad news truly lies: what started out as a protest against food and fuel prices has segued into a political mine field. High prices have effected everyone. But for some Haitians the stakes are higher. Factions that have lost power or influence over the last few years — such as those supporting ousted
President Jean Bertrand Aristide as well as industrialists and military officers still angry over the dismantling of the army in 1994 — have begun making their moves. Harping on the food crisis and perhaps threatening more street agitation, they are likely to pressure Preval into appointing a candidate they think will work to their advantage. As in the past, the resulting compromises are likely to lead to the political divisions, disorder and ineffectiveness that plunged Haiti into chaos. The leadership vacuum may worsen if the Senators go after Preval himself, which some observers predict.
Already, politics is heating up the streets again. Shortly after Parliament censured Alexis on Saturday, several dozen protesters gathered outside the building and began to chant "Aristide or Death." The charismatic Aristide, a former priest who has nevertheless been charged with human rights abuses committed during his presidency, was forced into exile in 2004 and is currently living in South Africa. Meanwhile, emails are circulating accusing Aristide supporters of instigating the demonstrations that shut down the capital last week. Among the Aristide supporters named is activist priest Gerard Jean-Juste, a former political rival of Preval's who was barred from running against him in 2006.

To head off the food issue, Preval has pledged to promote egg, chicken and rice production and subsidize fertilizer costs; the World Bank has promised $10 million in emergency aid and Venezuela's Hugo Chavez has agreed to send 364 tons of food, including chicken, milk and lentils. But in Haiti, even the smallest of economic fissures very quickly widen to swallow up any attempt at political equilibrium.

Violence remains near the surface as people search for scapegoats. Just a short distance away from the legislative palace, a Nigerian U.N. peacekeeper was killed execution-style in a crowded market in the heart of Port-au-Prince. Protesters were shouting "Down with MINUSTAH" — the French acronym for the 8,000-strong U.N. mission. Haiti still does not have an effective security force.

So although most cities and towns have resumed a cautious normality, few Haitians feel reassured. The high cost of living continues to persist; and the government is virtually non-existent. Worse, there's no guarantee when a new administration will be installed. And even if one is established, will it be equipped to handle the country's problems any better than the one that was just removed?

Rudy Boulos au Micro de Robert Bénodin

Orlando le 18 avril, 2008

Actualités Politiques : Grandes Lignes

Bonsoir chers auditeurs. Vous écoutez sur les ondes de Radio Classique Inter, l’émission Actualités Politiques, Grandes lignes, animée par Robert Bénodin.

Nous avons avec nous, sur les ondes de Radio Classique inter, le sénateur du Nord-est Rudolph Henri Boulos, ses réflexions sur l’actualité politique.

Rudolph Henri Boulos, nous vous souhaitons la bienvenue une fois de plus sur les ondes de Radio Classique Inter.

RB : Après avoir tiré la sonnette d’alarme, au sujet de la faim et de la cherté de la vie en juin 2007, quelles ont été les réactions de Préval et de son entourage ?

RHB : Gouverner c’est prévoir. Ils n’ont pas su prévoir malgré les signaux avant-coureurs.

Moi en tant que sénateur de la république et particulièrement du Nord-est, Je suis toujours resté à l’écoute de la population du département que je représente. Ceux sont mes mandants. Je suis témoins oculaire et auriculaire de cette faim « CLOROX » qui leur déchire les entrailles. D’autres sénateurs tel que le sénateur Mathurin sont venu à moi pour me dire : « Boulos, il est plus que temps de demander à la commission du commerce de prendre au sérieux cette faim qui ravage les familles haïtiennes. » Le président de la commission du commerce ne voulait pas en entendre parler.

J’ai donc assumé la responsabilité de faire le premier pas. J’ai appelé le gouvernement, pour lui demander de faire quelque chose, de trouver une solution.

Quelle en a été la réponse ? Pourquoi Boulos insiste-t-il « chaud derrière band lan » ? Pourquoi persiste-t-il à parler de la cherté de la vie ? Que cherche-t-il ? Que poursuit-il ? Qu’on lui mette une muselière. Il nous faut prendre et garder nos distances de ce sénateur « bali yon bois longue kimbé » ! Qu’on lui ferme le bec « on pinga » !

Donc leurs réponses, n’ont été que des menaces et des menaces de mort. Vous vous imaginez le coût des dégâts qu’ont causé les émeutes de la faim que nous venons d’endurer, il n’y a à peine qu’une semaine. Si le premier ministre avait seulement écouté. S’il avait investi très peu de cette énorme valeur qui vient d’être inutilement gaspillée, par le pillage, les incendies, les viols, les vols et les meurtres, lui et nous, nous ne serions pas au point où nous sommes aujourd’hui ! Au lieu de prévoir, aujourd’hui nous sommes en train de réagir à ce qui était prévisible et que le premier ministre pouvait aisément prévenir et circonvenir. C’est le cas de dire : « Cé l’heure kabrit fine passé que ou ap rélé fermin barrière. »

RB : Averti de la précarité des conditions inhumaines qu’endurent les plus démunis des masses haïtiennes, qu’est-ce qui expliquent l’immobilisme et le laxisme du gouvernement Préval/Alexis, incompréhension, aveuglément, insouciance, ou insensibilité ?

RHB : Ce n’est que de l’irresponsabilité manifeste. Ce comportement envers les souffrances des masses, n’est de fait qu’un choix politique délibéré. Ils préfèrent attendre que le courroux du peuple fasse irruption, pour les affronter avec des troupes de choc. Avec la nuance qu’ils veulent criminaliser cette réaction juste, authentique et naturelle d’un peuple à bout de souffle et aux abois, crevant sous la pression de la douleur atroce des tourments de la faim.

Ils sont intentionnellement restés les bras croisés, pour créer leur ambiance préférentielle, l’anarchie, pour en profiter. Exécutant dans l’anonymat leurs basses œuvres contre ceux qu’ils ciblent. C’est un choix politique cynique et délibéré que de provoquer à dessin l’atmosphère du « Koupé tête, Bouler caille », pour satisfaire les instincts prédateurs des gouvernants. Ils préfèrent utiliser l’énergie du peuple pour détruire. Ils exploitent la misère du peuple pour se faire passer comme les défenseurs et les articulateurs des revendications populaires et les exploiteurs des ressentiments. Ils veulent les exploiter et les maintenir sous contrôle et dans la misère, pour pouvoir maintenir leur clientèle de réchauffeurs du béton à volonté, exploitant leur frustration en leur jetant des miettes. Ils préfèrent les exploiter de cette façon au lieu de leur donner de l’éducation, du travail et à manger.

Quel en est le résultat ? L’épouvante, effrayer et décourager les investisseurs qui ne viendront pas encourager la capacité productrice du peuple haïtien. Ils font percevoir le peuple haïtien comme un peuple de casseurs et de destructeurs à qui on doit jeter des miettes pour les apaiser, au lieu du travail pour les développer. Comme je vous l’ai dit, c’est un choix politique délibéré, un choix politique, une stratégie suicidaire. C’est le proverbial et cynique : « Nager pou sôti ! »

RB : L’interpellation même maladroite d’Alexis par la chambre basse le 28 février, ne constitue-t-elle pas un signe ostensible et sans équivoque de la montée de l’insatisfaction et du mécontentement qui finalement ont fait irruption aux Cayes ? Pourquoi Préval et Alexis n’en ont-ils pas tenu compte ?

RHB : Ça encore c’est un choix politique délibéré, que de se fermer les yeux, les oreilles et le cœur, pour ne pas voir, pour ne pas entendre, pour ne pas être sensibilisé par le gémissement des masses. Je ne veux pas prendre conscience de l’état des masses.

On ne pouvait pas faire sortir du sang des roches. Mais, on n’a pas hésité à émettre des cheques de 100 à 200 milles gourdes pour acheter la conscience des députés et par ce biais, le vote de confiance. On a préféré investir dans la corruption, que d’investir dans le bien-être des plus démunis, pour obtenir un vote de confiance, foulant ainsi au pied le droit à la sécurité alimentaire, qui est précisément dans ce cas, étroitement liée au droit à la vie.

Les émeutes de la fin ont fait irruption, précisément en réaction à cet acte désinvolte, irrévérencieux et méprisant envers la misère des masses. Le Sénat en réaction aux émeutes de la faim, dont le spectacle des atrocités a fait le tour du monde, a été forcé de constater l’échec des choix politiques de l’Exécutif. Il a dans un premier temps sommé le premier ministre de démissionner. Et dans un deuxième temps l’a interpellé pour le censurer. C’est un fait irréfutable, que ce choix politique du premier ministre a été suicidaire. Ce choix politique correspond aussi à un vieil adage que les politiciens utilisent, depuis un demi-siècle, pour justifier leurs méfaits : « Pito moin laide, min moin la.» En fin de compte, il n’est plus là, ainsi que tous ceux qui ont utilisé ce vieil adage, depuis un demi-siècle.

RB : Les émeutes de la faim, qui sont des réactions authentiques et naturelles des masses, se sont répandues spontanément en un clin d’œil, pour embraser les principales villes.

Etaient-elles incontournables ?

RHB : Quand on dit à un peuple qu’il doit se coucher pour mourir de faim. Que peut-on attendre de lui comme réponse ? Il se soulèvera, même s’il doit affronter la mort par balle. Quand vous l’avez insulté au Plateau Central : Je ne peux pas faire de miracle. Manifestez et invitez moi, pour que je vienne manifester avec vous. » Alors que c’est ce peuple qui a voté pour vous, dans l’espoir que vous alliez défendre ses intérêts. Quand vous ne pouvez pas l’entendre. Il sortira pour se faire entendre. Quand le peuple du Nord-est a envoyé le sénateur Boulos pour dire qu’il a faim. Vous n’avez pas donné de réponse.

Pourtant il y avait une réponse appropriée :

-Baisser le prix du riz ;

-Reprendre le microcrédit pour les petites marchandes ;

-Offrir à crédit les intrants agricoles aux les paysans.

On a fait un choix politique, ne rien faire. Or ne rien faire, dans ce cas, est aussi désastreux que de faire du mal.

RB : Certes, les actes de violence, pillages, incendies, viols, vols etc., sont condamnables.

Mais, pourquoi le gouvernement Prévale/Alexis et ses supporteurs veulent-ils, à tout prix, minimiser l’authenticité du courroux des masses, en mettant uniquement l’emphase sur l’insinuation d’une infiltration des émeutes de la faim par les narcotrafiquants et le contrebandiers ?

RHB : Oui, absolument, ces actes sont condamnables. D’autant plus que se sont des casseurs professionnels qui ont commencé le mardi Matin à Port-au-Prince, téléguidé par des secteurs tapis dans l’ombre pour exploiter l’opportunité politique. Comme nous l’avions déjà dit.

Encore des preuves d’irresponsabilité ! Si vous dites que vous connaissez quel secteur est responsable de la casse. Pourquoi ne les avez-vous pas empêchés ? Quand ce secteur que vous connaissez bien, avait fini de détruire des vies, des édifices publiques et on dévaster les biens de ceux qui ont été spécifiquement ciblés, vous ne les avez pas appréhendés. Ce n’est qu’à la fin, quand il était déjà trop tard, que les dégâts du carnage devenaient trop scandaleux, que vous leur avez intimé l’ordre de mettre fin aux atrocités. Et de fait ce secteur que vous connaissez bien a obtempéré à vos ordres instantanément. Cela veut dire quoi ? Ce secteur jouit de l’impunité et de votre protection, en agissant sous vos ordres.

Vous avez dit que vous n’allez dédommager personne pour les dégâts. Pensez-vous que les entrepreneurs vont prendre le risque d’investir pour créer de nouveaux emplois ? Qui peut investir dans un cadre pareil ? Ce sont peut être les narcotrafiquants.

RB : Evidemment, le vote de confiance de la chambre basse le 28 février dernier a indubitablement mécontenté outre mesure les masses affamées, qui se sont senties trahies par leurs représentants.

Les émeutes de la faim, ne peuvent-elles pas être interprétées comme un vote authentique et direct de censure du gouvernement Préval/Alexis ?

RHB : Ventre vide n’a pas d’oreille ! Le vote de confiance du 28 février à la chambre basse, a été une provocation, mais pire une trahison. Ce n’est pas d’aujourd’hui que des manifestations protestant contre la faim, ont eu lieu au palais législatif. Cela depuis janvier. On aurait dû résoudre ce problème institutionnellement.

C’est une leçon qui vient d’être donné à tous les députés et les sénateurs. On ne peut pas à volonté, fouler au pied la volonté du peuple. Le message est clair comme du cristal.

RB : Force est de constater que la foule s’est rendue au palais national, pour prendre Prévale au mot.

Ce geste symbolique n’a-t-il pas mis en exergue le caractère démagogique et mensonger de l’invitation faite par Préval au peuple de venir le chercher le jour où il se déciderait de protester contre la vie chère ?

RHB : Quand on ne peut pas ou ne veut pas donner l’aumône au pauvre, on ne doit pas l’humilier en brisant sa sébile, ou le passer en dérision ! On ne peut pas non plus se moquer d’un peuple, surtout quand il n’est pas en train de quémander la charité. Mais qu’il est entrain de défendre son droit à la sécurité alimentaire liée à son droit à la vie. On ne peut pas badiner avec un peuple qui a réellement faim. C’est une provocation.

Que contient le budget de fonctionnement ? Quel pourcentage est alloué à la présidence ? Quel est pourcentage qui est accordé à l’agriculture ? Quel est le pourcentage qui est alloué à la santé publique ? Quel pourcentage qui est alloué à l’éducation ? Le peuple est venu chercher Préval au palais pour qu’il puisse obtenir de lui une réponse, avec le soulagement qu’il exige.

RB : Cette image des manifestants mangeant des feuilles devant le palais national, comment l’interprétez-vous ?

RHB : Dans le Nord-est, le peuple est en train de manger de la vache enragée. Quand j’ai appelé, j’ai appris que dans les régions de Baja, de Mérande, de Ponigo, de la Tasse, le peuple est en train de manger des mangues vertes bouillies pour apaiser sa faim. « Yap bat dlo pou yo wè si yo ka fè bè. » Il y a un tel niveau d’irresponsabilité et de négligence qu’aujourd’hui ce sont Chavez et Lula qui sont en train de nous tendre la main, pour réduire les ravages de la faim. Nous sommes devenus un danger pour les Caraïbes.

Il nous faut comprendre les inconséquences de ce vote. Mangeant des feuilles devant le palais national, c’est un message clair. C’est un symbole. Le peuple a bien entendu qu’on ne pouvait pas faire de miracle. Il a aussi toujours su ce proverbe : « apres bal tambou lou ». Aujourd’hui, il se rend compte du sens et de la véracité de ce proverbe. Le peuple veut s’assurer du résultat de son vote. Il veut savoir si ses intérêts sont représentés et défendus. « L’heure ou manger lagent Chango, fô ou payer li. » Le peuple se rend compte lentement et péniblement, qu’il ne peut pas confier à n’importe qui le soin de le représenter et de défendre ses intérêts.

RB : Nonobstant la grande part de responsabilité d’Alexis dans l’échec du gouvernement, considérant la montée du mécontentement populaire qui menaçait le gouvernement Préval/Alexis, et compte tenu du contrôle dont Préval jouit aujourd’hui sur le Sénat, n’y a-t-il pas lieu de croire que pour se protéger, Préval a saisi l’occasion pour faire de son partenaire, Alexis, le bouc émissaire et le dindon de la farce ?

RHB : C’est sûr qu’Alexis aujourd’hui soit le dindon de la farce. Une farce à laquelle il a contribué largement et dont le peuple aurait dû être la seule victime. La question est de savoir quel en a été le prix pour le peuple haïtien ? Si Alexis a perdu un poste de premier ministre dans cette farce, il ne va pas crever de faim pour autant. Tandis que pour le peuple, c’est plus grave. Il s’agit de sa vie et de sa sécurité alimentaire « Grangou CLOROX ». Depuis un an les sénateurs ont reçu le message. Premièrement, il y a un an, un sénateur était venu au Sénat avec le message de Prévale, qui voulait le renvoi d’Alexis. Deuxièmement le 17 octobre 2007, il a dit au palais national, en présence d’Alexis, qu’il n’a pas l’autorité nécessaire pour révoquer le premier ministre, qui a plus de pouvoir que lui. Pour gouverner ce n’est pas l’importance de votre autorité qui vous permet de mieux servir le peuple.

Ce qui manque c’est une culture d’exécution. Comme le répète souvent Ray Kilick. Il faut d’une vision, d’un plan, d’une stratégie d’exécution. Il faut qu’il y ait un leader, une équipe, des moyens et de la volonté politique, pour pouvoir délivrer la marchandise au peuple. Pour apporter le soulagement dont il a besoin. Le peuple ne s’attend pas à un miracle. Il n’est pas aussi naïf qu’on le pense. Il sait que c’est lentement qu’il devra progresser.

Alors que dans la politique traditionnelle, on conquière le pouvoir pour le retenir aussi longtemps que possible. Des fois on veut s’y accrocher à vie. C’est de fait, ce qui est la priorité de ce pouvoir aujourd’hui. Il n’y a rien de changer. Il ne faut pas se tromper. Ils veulent le retenir à tout prix. Voler, tuer, corrompre, c’est leur modus operandi et leur devise.

RB : Dans vos observations du dossier de la cherté de la vie, pouvez-vous nous citer quelques données comparatives qui peuvent mettre en exergue le calvaire que gravissent les familles haïtiennes ?

RHB : Haïti importe 50% de sa consommation de banane de la République dominicaine. Or il n’y a pas un an de cela, le prix de la banane en Dominicanie est passé de 3 à 15 pesos. Donc 500% d’augmentation, 5 fois la valeur. Bien entendu, sur le territoire dominicain, le gouvernement subventionne le prix de la banane pour l’approvisionnement de son peuple dans des magasins spécialisés. Nous exportions dans le passé d’Haïti vers toutes les îles proches, le manioc, la patate etc. Aujourd’hui nous n’en exportons plus.

Quand on se promène dans le milieu rural, on voit des planches rouges. Ce sont des arbres fruitiers tels que les manguiers et les avocatiers que l’on coupe pour en faire des planches pour la construction.

La production du riz, d’après feu Leslie Delatour, était la moins chère à l’échelle mondiale. Elle pouvait aisément être très compétitive sur le marché mondial. Aujourd’hui la réforme agraire a détruit la production du riz.

A Ponigo près de Mérande, plus de 200 carreaux de rizière, 3000 paysans. Qui les finance ? Cinq grands dons en République dominicaine à Dajabon. Ils achètent toute la récolte de riz. Je pourrais en citer d’autres. Je m’arrête là. Voilà l’état pitoyable où nous nous trouvons aujourd’hui.

RB : Ce n’est un secret pour personne, que les ressources de nos paysans ont été dévastées par 4 intempéries au cours de l’année 2007. Depuis 4 ans, nos bananerais sont ravagés par une épidémie de Sigatoka.

Nous avons des agronomes au pouvoir. Qu’est-ce qui les empêche d’intervenir ?

RHB : A l’occasion d’une visite d’Alexis au Sénat, plusieurs sénateurs lui ont demandé de faire quelque chose pour réduire la cherté de la vie. Ce qui m’a beaucoup frappé, c’est lorsque le sénateur Mathurin qui est un agronome et un membre du parti LESPWA comme Alexis, lui a dit clairement, debout au podium du Sénat, au début du mois de février de cette année, en présence des sénateurs, que la solution de la cherté de la vie et de la reprise de la production nationale, se trouvent dans les livres de Damien depuis 40 ans. La recette : engrais, semence, accompagnement du paysan pour planter et récolter.

Donc, ce ne sont pas les recettes et les solutions qui manquent. C’est l’intérêt qui n’existe pas pour les mettre en application. Ils n’ont d’intérêt que pour leurs poches et le pouvoir.

On a un agronome président, un agronome premier ministre, un agronome secrétaire d’état à l’agriculture. Est-ce le cas du cheval qui a plusieurs maîtres ?

RB : En fin de compte, le discours de Préval n’a impressionné personne. Il s’est fait attendre. On espérait, qu’avec un certain sens de l’urgence du moment, Préval allait annoncer, des décisions, des mesures et au moins un calendrier d’exécution. Il n’en a jamais été question.

Quelle est votre opinion du discours de Préval ? Qu’a-t-il de fait proposé ?

RHB : Ce discours a été prononcé sous de fortes pressions internationales. Un discours qui n’a pas tenu compte de ceux qui sont directement concernés. Aujourd’hui, beaucoup de pays sur terre ont ces mêmes problèmes. La différence est que ces pays ont anticipé ces problèmes et se sont préparés en conséquence.

Aux Philippines on a stocké le riz depuis quelques temps. Ils en ont planifié la distribution. Le Vietnam ayant des problèmes de récolte, a bloqué l’export du riz pour parer à la flambée des prix. D’autres pays on enlevé la taxe sur le riz etc. Ils ont prix le taureau par les cornes. Ils n’ont pas accompli de miracles. Mais ils ont fait quelque chose dans l’intérêt de leurs populations. Parce qu’ils se soucient du bien-être de leur nations et des retombés politiques de la famine. Ils gouvernent et prévoient les dangers pour en épargner leurs peuples et eux-mêmes en tant que gouvernants. Leurs peuples qui les observent, constatent qu’il y a un effort qui a été fait pour leur protection. Tel n’est pas le cas chez nous. On a préféré attendre l’irruption des émeutes de la faim pour l’exploiter. On préfère mendier. Irresponsable, on préfère être l’objet de la pitié et de la fraternité de nos tuteurs, pour nous rassurer de leurs soutiens. C’est notre zone de confort.

RB : En blâmant 20 ans de mauvaise gestion, Préval ne réalise-t-il pas que de ces 20 ans, le pays a subi 17 ans de régime lavalas, dont il a été le 1er premier ministre, le 2e et le 4e président ?

RHB : Ils ont été président et premier ministre pendant deux mandats. Agronomes, quels sont les progrès dont l’agriculture a bénéficié ? Zéro ! Où sont les 75 millions de dollars US qu’ils ont emprunté pour investir dans le CNE qui devait réparer les routes ? Zéro ! On a de fait un cimetière d’équipements. Ils viennent de trouver un autre prêt de 50 millions de dollars US pour réinvestir dans le CNE. C’est une répétition de galvaudages à n’en plus finir. Où sont les canaux d’irrigation qui attendent depuis longtemps leur curage ? Ceux sont des canaux qui existent depuis la colonie dans Ferrier, Mérande etc. Qu’a-t-on fait pour la production agricole ? Qu’est-ce qui doit être fait en priorité pour la production agricole ? Apporter l’eau aux jardins ! Qu’a-t-on fait ? Rien !

RB : Quel sera l’effet des prélèvements sur les salaires des fonctionnaires publiques, sur la cherté de la vie ?

RHB : Combien de fonctionnaires qui touchent 35 milles gourdes et plus ? Avec ce salaire il leur est difficile de joindre les deux bouts. Prélever 10% de leur salaire les plonge dans une spirale de problème de budget familial, écolage, loyer, vêtement, nourriture etc.

Pourquoi ne pas réduire le nombre de ministères. Réduire tous ces voyages avec 500 dollars US de per diem, sans compter les frais de voyage. Eliminer tous ce tas de séminaires au Caribe Convention Center qui gaspillent des millions de dollars US, des tas de programmes bidon qui ne riment à rien, les cheques zombi etc. Tout ceci ne contribue pas à mourir le peuple. Et à payer l’écolage de leurs enfants. Le galvaudage de l’argent de l’Etat, des voitures de l’Etat, de la gazoline de l’Etat... Il est temps que cela cesse pour que le peuple puisse trouver le soulagement qu’il mérite et espère.

RB : Alors que le Sénat donnait le coup de grâce à Alexis, réuni au palais national avec les importateurs, Préval entretenait une conférence de presse annonçant des arrangements pour réduire le coup du riz importé pour seulement 30 jours, en s’engageant dans un programme de reprise de la production du riz.

Quelles sont vos impressions de ce qui a été présenté à cette conférence de presse ?

RHB : Qu’ont-ils déjà fait depuis deux ans qu’ils sont au pouvoir pour la production agricole ? Qu’ont-ils fait spécifiquement pour la production du riz pendant ce temps ? Peut-on avoir une récolte de riz en 30 jours ? Que peut-on vraiment espérer après un mois de reprise de la production agricole et un rabais de 8 dollars par sac pour 30 jours ? Cela ne fait aucun sens ! Ça n’a ni cohésion, ni cohérence ! Il n’y aura, de part et d’autre, que de la spéculation, des gros dépôts de riz, jusqu’aux petites marchandes. Le prix du riz va remonter après les 30 jours. L’élimination de la TCA pour un temps plus ou moins long. Voilà la solution, point final. Il faut surtout ne pas dire quand la TCA sera rétablie, pour empêcher la spéculation. Pourquoi insiste-t-on sur le riz ? Parce qu’aujourd’hui, c’est l’élément de base de la diète haïtienne.

RB : La solution politique du renvoi d’Alexis, améliore-t-elle ou empire-t-elle la crise ?

RHB : Alexis ne peut pas être la cause fondamentale qui provoque et sous-tend tous ces problèmes. Il est utilisé aujourd’hui comme bouc émissaire, pour satisfaire la politique du moment. Son renvoi est une solution politique à la crise actuelle. On ne peut pas traiter une fièvre, sans faire le diagnostic. Sans chercher la vraie cause. Sans trouver l’infection.

Sur les 22 projets de la Banque Interaméricaine de Développement depuis 1998, il n’y a qu’un quart, que seulement 25% qui sont plus ou moins fonctionnels. Que l’on mette Jean, Jacques ou Gauthier pour remplacer Alexis, cela ne rimera à rien. On peut changer d’homme, de style et de rhétorique. On aura le même résultat. Ce sera la république des petits copains qui émergera à chaque fois. Cette culture d’exécution nous fait défaut, Vison, Plan et Stratégie.

RB : Préval est à un carrefour où il est en train de jongler à la fois quatre problèmes très cuisants (time critical) :

-Un projet de loi électorale, qui voté tel quel, lui donne le contrôle absolu des postes électifs, du Sénat aux CASEC ;

-La caducité des 3e sénateurs, passé le 8 mai 2008 ;

-Les émeutes de la faim qui ressurgiront indubitablement à la rentée des classes s’il n’y a pas de changements substantiels, perceptibles et palpables ;

-Le choix d’un premier ministre et sa confirmation par le corps législatif, où les partis politiques tiennent mordicus à leurs prérogatives ministérielles.

Pouvez-vous éclaircir un peu les différents aspects de cet imbroglio ?

RHB : Pour augmenter leur pouvoir, ce qui est de fait l’objectif réel, ils veulent contrôler les 2/3 du Sénat et les 143 députés. Pour eux c’est un objectif et un besoin fondamental. Le moyen-clef pour atteindre cet objectif, c’est la loi électorale, de la façon dont elle est conçue et rédigée. Cette loi leur donne une mainmise sur le processus électoral. Cette loi leur permettra de faire une sélection au lieu d’une élection. Elle leur permettra d’obtenir le pouvoir absolu qu’ils convoitent. On aura, comme on l’a eu dans le temps, des élections officielles, organisées par les ministères de l’intérieur.

On vient de me faire savoir que les députés viennent d’ajouter quelque chose d’anachronique à la loi électorale, qui fait obligation au candidat d’aller demander au service d’émigration un certificat qui confirme qu’il soit un Haïtien et un Haïtien seulement. C’est encore un autre moyen de contrôle, qui permet au pouvoir en place de décider qui peut ou ne peut pas être candidat. Si le besoin de contrôle va jusque là. Vous pouvez deviner qu’est-ce qu’ils feront pour déterminer qui peut ou ne peut devenir député ou sénateur. Cette loi enlève et détruit toutes possibilités que ce soit l’expression de la volonté générale qui choisit les vrais représentants du peuple.

Les émeutes de la faim ont eu lieu. Le peuple a déjà donné clairement son message aux gouvernants. Il nous faut attendre la réaction du peuple par rapport aux solutions proposées par le gouvernement pour résoudre la crise de la cherté de la vie et de la faim.

Il y a dans cette équation un paramètre dont la date butoir est incontournable et qui sera « le teste acide » des solutions apportées tant par le gouvernement que par le milieu international à cette crise. Ce paramètre c’est la rentrée des classes en septembre. Un moment très difficile dans la vie nationale, un point névralgique pour les familles haïtiennes.

Le choix d’un premier ministre et sa confirmation par le corps législatif est sur le tapis. On avait un gouvernement pluriel qui vient de faire un échec. Et qui vient d’être frappé spectaculairement d’un vote de censure venant dans un premier temps des émeutes de la faim et dans un deuxième temps du Sénat qui lui a donné le coup de grâce. Les partis politiques ne peuvent pas être épargnés. Il sont aussi responsables et partie prenante de l’échec. Alexis ne peut pas être le seul responsable. Il y a des ministres qui sont des titulaires de départements. Ils pouvaient intervenir et parler. Ils pouvaient, au conseil ministériel, critiquer, recommander et offrir leurs points de vue. Ils pouvaient donner des directives. Il leur faut faire leur mea-culpa. Il faut qu’un nouveau premier ministre ait une certaine autonomie, un certain espace et les coudées franches. Il faut que ce soit un gouvernement de consensus. On ne peut pas avoir encore un gouvernement pluriel. On vient de faire une expérience plurielle qui n’a rien donné. Il nous faut d’un gouvernement avec une vision, un plan et une stratégie. Ce premier ministre doit être un vrai leader, le capitaine d’une équipe, avec les moyens financiers et politiques. Il faut faire bien attention pour que les mêmes erreurs ne se répètent pas. Le peuple ne peut plus s’attendre à et de tolérer de ces petits jeux en vase clos entre copains. Il ne peut plus accepter la conquête du pouvoir pour le pouvoir. Il vient de donner son message. A bon entendeur salue !

RB : Plusieurs magazines internationaux réputés pour la précision et la fiabilité de leurs analyses, se sont penchés sur les émeutes de la faim, pour en disséquer les causes et effets. Leurs conclusions sont unanimes sur le fait que, et je cite un extrait de la conclusion de l’analyse du Economist Intelligence Unit : « Il prendra beaucoup de support et de pression venant de gouvernements et d’institutions multilatérales pour empêcher l’implosion du système politique d’Haïti. »

Etes-vous de cet avis ?

RHB : L’International ne peut plus ignorer le fait que sa présence va au-delà de la simple et unique responsabilité du maintien militaire de la paix. La stabilisation du pays ne peut pas se réduire qu’à ça et qu’à ça seulement. Il y a un proverbe haïtien qui dit : « Prend coup blié, poté maque songé. » Les émeutes de la faim est un coup porté tant au gouvernement haïtien, qu’au milieu international qui est à la fois physiquement présent sur le territoire par le biais de la Minustah et partie prenante, à partir de l’évocation du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Le milieu international doit être conscient du fait qu’à cause de sa présence physique, que chaque échec du gouvernement haïtien est aussi son échec. Il en paiera la facture à chaque coup. Le gouvernement haïtien et le milieu international, dont la Minustah est le représentant (Proxy), sont co-responsables de la stabilité du pays et de la gestion de tout ce qui fait partie de cette équation. Posez vous bien la question : Pourquoi depuis 4 ans que la Minustah est présente sur le territoire, c’est pour la première fois que la population a attaqué avec autant d’acharnement les édifices qui l’abritent ? Dans l’esprit de la population après 4 ans de coopération, elle est amalgamée au point de ne pas pouvoir la distinguer du pouvoir qui gouverne les affaires du pays. Les 9000 troupes ne peuvent pas stabiliser le pays seulement avec leurs chars d’assaut. Le corollaire est qu’elles deviendront inévitablement par la force des choses et de la réalité, une force répressive, défendant le gouvernement contre les justes revendications du peuple, à bout de souffle et aux abois, qu’elle en ait l’intention ou non. On ne peut plus attendre et regarder les bras croisés les mauvais choix du Gouvernement haïtien et ce qui en découle. Il faut être proactif.

Le Canada et la France ont bien compris que le développement social et économique avant tout consolide à la fois les Institutions politiques et la stabilité de l’Etat. Comme le disait si bien Napoléon : « On peut tout faire avec les baïonnettes, sauf de s’asseoir dessus ».

Le Brésil chef de fille de la Minustah et aspirant à un siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations Unies, doit assumer ses responsabilités de leadership. Et de ne plus permettre d’erreurs grossières de priorités soient commisses. L’échec d’un petit pays comme Haïti qui demeure jusqu'à présent le seul Etat en faillite et un danger pour la zone, après 4 ans de présence de la Minustah gérée par le Brésil doit avoir une conséquence quelconque reflétant sur la capacité du Brésil de mériter ce siège au Conseil de Sécurité des Nations Unies !

….Mr. Hanabi, qui est le chef civil de la Minustah, écoutez bien ce que je vous dit : «Khod wa’tak, fakker ! » Je vous le dis dans votre langue maternelle pour que ce soit bien compris. « Arrêtez, réfléchissez avant d’avancez ! » Il y a péril en la demeure !

La semaine prochaine il y a monsieur Shannon du Département d’Etat, le ministre des affaires étrangères du Canada, Bernier, de même que le ministre des affaires du Brésil, qui entrent. Ça montre quoi ? Qu’ils ont compris qu’il y a péril en la demeure. La Conclusion du Economist Intelligence Unit est exacte et précisément ça. Il faudra à la fois beaucoup de supports, mais surtout beaucoup de pressions, venant de gouvernements et d’institutions multilatérales, pour empêcher que par erreur et par choix politiques irresponsables, qu’on aille vers l’implosion du système politique haïtien.

RB : Les masses des démunis, qui sont à bout de souffle et aux abois, qui ont pris les rues pour exprimer leurs frustrations, qu’attendent-elles du nouveau gouvernement ?

RHB : Une délivrance, mais dans l’immédiat un soulagement dans leur souffrance, un moment de répit sur le chemin du calvaire qu’elles sont en train de gravir pour sortir du gouffre de la misère et de la pauvreté. De la nourriture, oui, mais du travail surtout. Les paysans du Nord-est me l’ont répété en mainte fois : « Sénateur ne me donnez pas le poisson. Montrez mois comment le pécher ! » Il faut apporter des solutions appropriées et rapides.

-Santé, mettre plus d’agents de santé qui iront partout dans les campagnes apporter les soins aux gens, avec les médicaments appropriés.

-Education, il faut que toutes les écoles aient des professeurs recyclés. Il faut augmenter la vacation des écoles. Elles existent déjà. Avoir des classes de nuit, avec une petite génératrice, ou une batterie avec panneaux solaires. Il faut donner aux enfants la formation professionnelle. Il faut donner des bources d’étude à ce qui sont à la fin du cycle d’études secondaires.

-Création d’emploi, Le gouvernement n’a pas besoin de créer lui-même les emplois. Il faut à travers le financement des micro entreprises par le biais du microcrédit créer plus d’entrepreneurs.

-Agriculture, offrir aux paysans les intrants agricoles à crédit, et l’encadrement technique, pour recommencer à planter et récolter.

RB : Il est évident que la PNH telle qu’elle est organisée et qu’elle fonctionne, comme force de manœuvre, est incapable de rétablir l’autorité de l’Etat partout sur tout le territoire et sur ses frontières terrestres et côtières. Il y a lieu de considérer ce que la constitution prescrit, une force d’attrition.

Y avez-vous pensé ? Pouvez-vous partagez vos réflexions sur ce sujet ?

RHB : C’est une question sur laquelle je me suis penché en maintes occasions. En deux occasions j’ai eu la chance de faire la proposition suivante à deux présidents. Au président Avril lors de l’affaire Hébreux et au président Aristide à son retour en 1994. Il nous faut reformer en profondeur l’Armée, ce que les américains appellent « bottom up »

Une force d’intervention rapide qui serait une force supplémentaire de la Sécurité Publique. La PNH n’est pas conçu pour ce genre d’intervention quand ils font face au grand banditisme et aux désastres naturels, Ils nous faut au moins attachés à cette force, 1500 Hommes et Femmes, de toutes disciplines : Médecins, Infirmiers, Ingénieurs, Agronomes, Enseignants spécialisés et des Militaires formés dans le respect des citoyens et des institutions républicaines.

Oui c’est une nécessité quelque soit l’appellation que l’on choisit. Ce n’est pas ça l’important. C’est une nécessité parce que la PNH n’est pas organisé ni préparé pour remplir ce rôle. De plus elle n’a ni l’équipement, ni les moyens, ni le nombre pour assumer cette responsabilité.

RB : Compte tenu de la tension politique et de la volatilité de la conjoncture, quels sont vos pronostiques à court et moyen termes ?

RHB : Je ne suis pas un devin. Je n’ai pas de boule de cristal. A court terme, je crois que la mangeaille restera l’obsession de la population. Jusqu'à ce que nous puissions leur donner un minimum de sécurité alimentaire. Ceci va demeurer un problème cuisant à l’avant-scène politique et social. On ne peut pas résoudre ce problème par le biais de la charité. Il faut que ce soit fait à travers le marché de l’offre et de la demande, pour qu’il ait un niveau de respect humain, de responsabilité, d’indépendance citoyenne, pour qu’ils aient le droit de disposer d’eux-mêmes et de leurs avoirs.

A moyen terme, il faut définitivement des travaux de haute intensité de main-d’œuvre. Il faut que ces travaux servent à quelque chose. Il faut accompagner le paysan dans la transformation de leur environnement, des ponts par exemple. En maintes fois utilisant entre 35 milles et 125 milles gourdes, j’arrive a construire des ponts dans le Nord-est. Il y a des gens qui me disent que ce n’est pas possible. Je les ai construits. J’ai les photos, Je peux vous les montrer. Les écoles, même si vous ne pouvez pas construire l’école, on peut enfermer une maison. On peut trouver des institutions comme Digicel qui peut construire l’école après que j’ai donné le terrain. Fixer les pompes à eau. Réparation des routes secondaires, pas l’asphaltage, mais les rendre carrossable. Bétonner les mauvaises pentes et les passes d’eau. Curage des canaux d’irrigation. C’est primordial les petits barrages.

Ceci exige une réunion avec les secteurs de chaque localité. Ceci exige une réunion avec les professeurs des universités, pour prévoir intelligemment et éviter des failles qui nous attendent à chaque carrefour.

Avant-hier j’écoutais une conférence d’un professeur d’Institut de la Terre de Colombia University. Il parlait des choix qui peuvent faire faillir une nation ou un peuple. Il a donné en exemple l’Ile de Pâques. L’Ile de Pâques était une forêt très dense. Il y avait toute une population qui y vivait. C’est cette population qui a sculpté ces grosses têtes de pierre qui pèsent des tonnes et des tonnes. On ne sait pas comment elle a pu les sculpter. Avec quel outil et comment les a-t-on transportées aux sommets de collines. Cette population a totalement disparu. Dans les recherche pour trouver la cause de la disparition de cette population ont a trouvé, qu’elle a coupé tous les arbres de l’île. La diminution des arbres a amené une réduction proportionnelle de la nourriture. Ceci a provoqué des luttes fratricides. Ce professeur a cité une autre expérience faite récemment dans une autre île. Là où il y a deux peuples qui gèrent séparément chaque coté de l’île. Devinez quelle île ? Hispaniola !

Voilà une île, d’un coté des gestionnaires irresponsables et de l’autre des gestionnaires qui planifient et prévoient. Survolant la frontière la différence est visible. On a l’impression qu’il y a un mur qui sépare d’un coté c’est vert et de l’autre marron.

S’il nous faut dire quelque chose aux gouvernants. Votre mauvaise gestion de la terre d’Haïti est visible. Haïti n’est pas votre propriété privée. Vous n’êtes pas les seuls à décider des destinés de la nation et de l’Etat haïtien.

RB : Ça fait un demi-siècle depuis que les haïtiens supportent des régimes populistes. Avec le premier régime, le pays est devenu le plus pauvre de l’hémisphère. Avec le second il est devenu le plus corrompu du monde. Avec le second on est arrivé jusqu'à l’anarchie. Pour moi, le peuple a aussi une par de responsabilité. Il ne peut plus continuer à faire ces choix.

Qu’en pesez-vous ?

RHB : Avant de placer la charge sur le peuple haïtien, car il a sa part de responsabilité. J’aimerai mettre en exergue la faillite de l’élite haïtienne, élite professionnelle, commerçante, industrielle, bourgeoise etc. C’est cette élite qui a la responsabilité de leadership dans tous les domaines. C’est elle qui n’a pas assumé ses responsabilités. C’est ce que ce professeur de Colombia University a fait remarquer en concluant sa conférence, que ce sont les élites de l’Ile de Pâques qui ont failli, pas la population. Visitant la Hollande, ce même professeur a fait savoir en visitant les digues, il a fait la remarque. Que derrière ces digues qui vont jusqu'à 20 mètres au-dessous du niveau de la mer, les maisons, les fermes et les villages sont construits dans cette espace. L’important, est que cet espace abrite les Hollandais de toutes les strates sociales. La responsabilité de la protection et du maintien des digues est collective et sans aucune exception. Avec la nuance que même dans ce cadre, l’élite assume encore et toujours la responsabilité du leadership. Une responsabilité qui ne peut pas tolérer une minute d’irresponsabilité. Parce qu’on peut être exposé, en clin d’œil, à des dangers de vie ou de mort pour tous.

RB : Mais, le constat de cette démission de l’élite au cours du dernier demi-siècle, qui a provoqué des résultats aussi désastreux.

Qu’est-ce qui a porté cette élite à démissionner de ses responsabilités ?

RHB : Je crois que, c’est à partir de ces 50 dernières années, de 1957 aux années 60, qu’on commence à l’observer. Il y a un problème qui trouve ses racines à partir de la colonie. La mentalité de la plantation. La mentalité qui veut que l’on ait le pouvoir de vie et de mort sur tous, quand on détient le pouvoir politique.

Il y avait à l’époque, un secteur politique qui s’est accaparé du pouvoir avec une attitude d’exclusion, le club des petits copains de Port-au-Prince, qui disent qu’un tel est exclu. « Mulâtre pas ladanl. Camoquin pas ladanl. » Et en 1986, c’est l’inverse, « Macoute pas ladanl » Mais qui a le droit de dire qu’un tel est exclu ? Qui lui a donné ce droit ? Nous avons tous les mêmes droits d’inclusion. Personne n’a le droit d’exclure. Nous partageons à égalité, les droits et responsabilités.

La solution si elle doit servir l’intérêt commun, elle doit émaner de la réflexion commune.

La démission de l’élite est due à un effort d’exclusion dans une certaine mesure. La violence dans une certaine mesure et à une certaine période a renforcé l’effort d’exclusion.

C’est ce qu’il nous faut éliminer de notre mentalité de plantation. C’est le sens de la responsabilité collective, qui encourage la participation. L’exclusion a l’effet inverse.

RB : En résumé, vous venez de dire que c’est problème d’exclusion.

RHB : L’exclusion d’un sénateur sur quelle base ? Sans aucune preuve, sans document légal pour contrecarrer ceux qu’il a déposés. Action inconstitutionnelle contre lui. Exclusion de la Diaspora des affaires de son pays d’origine. Pourquoi cette exclusion ? Leurs apports représentent au moins 30% du PIB. C’est eux qui font vivre ce pays. La Diaspora a les deux ressources principales, finance et matière grise. Et surtout la capacité d’influencer les gouvernements à l’extérieur.

Exclusion des 1 millions d’Haïtiens qui travaillent en République dominicaine et qui envoient de l’argent à leur famille en Haïti. Le gouvernement haïtien refuse de leur donner un document d’identité. Le gouvernement n’a pas un traité d’émigration avec la République dominicaine, encore moins un traité commercial.

Exclusion, refus de supporter les 12 milles étudiants haïtiens qui sont dans les universités dominicaines. C’est une mentalité d’exclusion générale à tous les niveaux. Peut-on avoir dans ces conditions une conscience nationale, un sens d’appartenance.

RB : Il y a une xénophobie qui renforce cette exclusion, qui s’est développé graduellement, « moun dehors vs moun en dedans, camoquin vs macoute, chimère vs macoute etc. Paradoxalement, c’est à partir de ces distinctions, que l’on retrouve dans la Constitution de 1987, des articles d’exclusion, qui charrient cette mentalité d’exclusion du régime précédant qui exclut à la fois les membres de ce régime et la Diaspora, pas pour les mêmes raisons. Il n’y a pas à sortir de là que cette Constitution est xénophobe.

L’exode qui a formé la Diaspora, dans les années 60 à 70, c’était l’élite et les classes moyennes qui sortaient. A partir des années 70 à nos jours ce sont les masses urbaines et rurales qui peuplent la Diaspora.

Cette exclusion ne peut plus faire référence aux dichotomies, noir vs mulâtre, bourgeois vs masse, macoute vs camoquin, chimère vs macoute. Elle exclut tous ceux qui sortent du pays. Il y a un abandon automatique de tous les droits et privilèges de citoyenneté, dès qu’on met le pied sur la première marche de l’escalier pour monter dans l’avion, ou pour prendre le voilier vers St Thomas ou Miami.

RHB : Elle n’exclut pas seulement ceux qui sortent du pays. C’est là que c’est plus grave. La république de Port-au-Prince exclut tous les gens de la province. La constitution exige depuis 20 ans la décentralisation et la déconcentration, le gouvernement refuse de les faire. Le gouvernement a décidé que c’est à Port-au-Prince que la totalité des pouvoirs réside. Ce n’est pas seulement les gens qui sont au dehors, mais ceux qui sont à l’intérieur sont aussi exclus. C’est un kidnapping du pouvoir par la république des petits copains, par un petit clan qui a décidé que, « li prend li, li prend li nette. »

RB : Comment renverser la vapeur ?

RHB : La révolution tranquille du Dr. Etienne. Il faut nous mettre ensemble. Il nous faut avoir une conscience collective de l’urgence de ce problème. Il nous faut nous réunir pour identifier les solutions. Il nous faut être capable de mettre nos ressources, nos courages ensembles, pour démonter cette exclusion, une fois pour toute. Si le colon a eu ses chaînes pour renforcer l’esclavage, l’exclusion c’est l’équivalant des chaînes des temps modernes.

RB : La Banque mondiale dans son rapport a mentionné que 83% des professionnels, des administrateurs et de techniciens sont hors du pays. C’est une preuve que nous avons perdu un fort pourcentage de nos citoyens capables de gérer le pays. C’est très grave.

RB : Sénateur Rudolph Boulos j’aimerais vous remercier pour votre participation à cette entrevue. Ça a été une participation très brillante et claire. Je suis satisfait de vos messages. Et à la prochaine.

RHB : Merci beaucoup. Je remercie la Radio de la possibilité qu’elle m’a offerte de communiquer avec la population du Centre de la Floride et avec les internautes qui nous écoutent. A bientôt, A la prochaine.