vendredi 10 août 2012

Et si on changeait de formules perdantes ?

Et si on changeait de formules perdantes ?
Le Nouvelliste | Publié le : jeudi 09 août 2009
 Frantz Duval

Le président n'est pas seul. Il a ses conseillers et son gouvernement. L'Etat et les amis d'Haïti sont à sa disposition. Rien n'est aisé, mais, au vu de ce qui se passe dans d'autres pays, rien n'est impossible non plus.

Il y a des dizaines de solutions à chaque problème, avec leurs avantages, leurs inconvénients, leur coût et leurs conséquences. Le chef de l'Etat, placé au haut de la pyramide des pouvoirs, est au centre de l'arbitrage. Il oriente, il souhaite, il délègue. Au bout du compte, il est responsable de tout ce qui marche et surtout des attentes déçues.

De temps à autre, plus rarement en Haïti que dans les autres pays, les politiques font appel au secteur privé pour trouver un support, un enrichissement, des pistes dans la recherche incessante du bout du tunnel.

Dans les pays normaux, l'Etat -le président en premier, est au service de l'élite, du secteur privé, du complexe militaro-industriel, de la nomenklatura, appelez-le comme bon vous semble, et vice-versa. Les deux travaillent au mieux-être de toute la population, au bonheur de leur peuple.

Les intérêts se confondent. Chacun y tire des bénéfices à la mesure de son statut.

Au final, les politiques entrent dans les livres d'histoire, les hommes d'affaires et capitaines d'industrie édifient des empires et la population paie ses factures dans une quête permanente d'une vie meilleure.

En Haïti, cette osmose, cet intérêt commun, n'a jamais existé. L'Etat, le secteur privé, la population vivent dans des mondes isolés qui se recoupent périodiquement. Rarement.

Mardi soir, dans un entretien impromptu accordé à Roberson Alphonse, le président Michel Martelly a laissé entrevoir sa frustration sur un point précis : le crédit que le secteur financier accorde à la population.

« Aujourd'hui, est-ce que vous sentez qu'il y a une politique sociale et économique qui va dans le sens de la vision du gouvernement Martelly/ Lamothe à travers les banques ? se demande le président. « On ne la trouve pas », balance Martelly dans son diagnostic, rapporte Alphonse.

Selon le journaliste, le chef de l'Etat voudrait que le portefeuille de crédit des banques soit plus important, dans le respect des normes prudentielles, des lois nationales et internationales régissant le secteur, souligne Martelly, pour qui il faut persuader et non passer en force les banquiers, certaines fois empêtrés avec des surliquidités flirtant le milliard de dollars américains, si ce n'est pas plus.

« Il y a ONAPAM pour les cotisants de l'Office national d'assurance vieillesse (ONA). La Banque nationale de crédit (BNC) est venue avec Kay pam. Mais, à cause de certains problèmes, seules quelques personnes ont trouvé du crédit. Le peuple n'a bénéficié de rien. Moi, je veux que l'on se penche sur la recherche des moyens pour prêter à la population. Pas à n'importe qui. Mais, il y a des gens dépourvus de moyens financiers qui ont de bonnes idées d'affaires », indique le président Martelly, citant des agriculteurs qui pourraient devenir de grands entrepreneurs s'ils avaient accès au crédit, poursuit Alphonse dans son article tiré de l'entretien.

Le président s'intéresse aussi au crédit au logement. « S'il y a des problèmes de titres de propriété, il faut que les banques en informent l'Etat. On se mettra ensemble pour créer des commissions afin de gérer ces problèmes et y apporter des solutions», affirme le chef de l'Etat haïtien, résolu à discuter avec les grands argentiers de la République, selon Alphonse.

Ce petit entretien, résume une situation qui perdure depuis des lustres. L'Etat et le secteur privé ne dialoguent pas assez. Leurs intérêts ne se rencontrent pas pour se mettre au service de la population.

Confucius ou un autre érudit chinois a dit : "Si tu restes assis assez longtemps au bord de la rivière, tu verras passer le corps de ton ennemi". Ce n'est pas le cadavre de la pauvreté ni celui du sous-développement que verront passer les politiques et les financiers haïtiens depuis les rives de la rivière indolente où ils se sont installés depuis des années.

Nos financiers, nos banquiers, nos entrepreneurs, notre secteur privé ne se doivent-ils pas d'inventer les institutions novatrices, les produits nouveaux qui transformeront l'épargne nationale en leviers capables de nous sortir du trou où nous nous enterrons ?

 

Nos financiers, nos banquiers, nos entrepreneurs, notre secteur privé ne se doivent-ils pas, au-delà des boucaniers et flibustiers, de prendre au mot ce président qui se cherche depuis des mois des alliés pour une bataille qui dépasse la séparation des dépouilles de la nation ?

 

Frantz Duval
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