vendredi 30 mai 2008

De recul en recul, en l’absence de gouvernance, nous attendons Godot… !

Le président ne peut pas faire de Miracles.

Sénateur Rudolph Henri Boulos


Le Premier Ministre Jacques Edouard Alexis n’a pas pu offrir de solutions. La cherté de la vie augmente davantage chaque jour et dénie à la population Haïtienne toute forme de bien-être, même l’accès à la nourriture de base, et déjà des signes de famine font leur apparition dans certains endroits du pays. L’insécurité s’accroît davantage avec comme corollaire une augmentation du chômage dans une population déjà frappée par un taux de chômage de plus de 70%. La rentrée scolaire s’annonce chaude, très chaude. Il est donc clair, qu’en lieu et place de progrès, nous allons de recul en recul.


Force est de constater que le niveau prohibitif des prix des produits de première nécessité n’est pas un problème conjoncturel mais traduit plutôt un profond malaise politique et économique qui risque de conduire à une catastrophe humanitaire si des mesures appropriées à court, moyen et long termes ne sont pas appliquées. Les responsables politiques n’ont, jusqu’à présent, pris aucune action corrective sérieuse ; ils ont, une fois de plus, tendu leur « kwi » à la communauté internationale qui a encore exprimé sa solidarité envers notre pays en octroyant une aide alimentaire d’urgence. Cependant, l’impact sera de courte durée et n’aura d’effet bénéfique que si le gouvernement accompagne cette aide de mesures économiques adéquates pour augmenter la production agricole dans le moyen terme. Déjà, en janvier 2008, le Sénateur Boulos avait sonné la sonnette d’alarme suite à une visite dans le département du Nord Est, mais les autorités n’ont pas jugé bon d’y répondre.


Malgré ce constat d’échec, le gouvernement de la République s’enorgueillit de sa bonne performance en mettant l’accent sur l’équilibre macroéconomique et un surplus budgétaire au niveau des finances publiques. D’entrée de jeu, il faut souligner que l’équilibre macroéconomique est une condition nécessaire, mais non suffisante pour l’investissement et la croissance économique. Cet équilibre n’a de valeur que s’il engendre une augmentation des investissements dans l’économie qui se traduit par une croissance de la production nationale, la création d’emplois et une amélioration du standard de vie de la population.


Ce gouvernement semble ignorer que l’investissement est une fonction du risque et de la rentabilité. Une analyse objective de la situation politique, sociale et économique nous conduit à conclure que la mauvaise gouvernance aggrave la situation du pays et augmente le risque d’investissement en Haïti. De fait, La perception du risque d’investissement est telle que les investisseurs nationaux ou étrangers se refusent à risquer leur capital dans un environnement aussi volatile. Cette gestion irresponsable de la chose publique peut conduire encore à des troubles sociaux qui peuvent même mettre en danger les acquis démocratiques de l’année 2006.


De retard en retard, de crise en crise, créés de toute pièce ; la situation politique et sociale s’est empirée.



Un observateur avisé de la situation Haïtienne ne peut ignorer l’extrême degré d’insatisfaction générale qui prévaut dans tous les secteurs de la vie nationale, malgré les déclarations de satisfecit du gouvernement et de la communauté internationale. Plutôt que d’affronter les problèmes et de trouver des solutions appropriées, le gouvernement préfère détourner l’attention vers des points non prioritaires ou d’aller de dilatoire en dilatoire, évitant ainsi les questions prioritaires.


Au début de l’année dernière, qui a encouragé le CEP de Max Mathurin à ne pas publier les résultats des élections des ASECs et des Délégués de ville pour empêcher que les élections indirectes devant mener à la formation du Conseil Electoral Permanent ne se réalisent ? En réaction contre cet accroc à la démocratie, des Députés et des Sénateurs ont pris l’initiative d’organiser une journée de réflexion au Kaliko Beach Hotel le 28 Juillet 07 pour contraindre le pouvoir central à publier ces résultats. Ce qui est certain, c’est que l’Exécutif, à l’étonnement de tous, a lancé entre-temps tout un débat sur la réforme constitutionnelle qui a fait couler beaucoup d’encre, mais n’a abouti à aucun résultat concret. Puis, vint le tour des convocations illégales des membres du CEP par devant le Commissaire du Gouvernement et toutes la série de discussions sur le tribunal compétent pour entendre le cas. Serait-ce la Haute Cour de Justice ou le Commissaire du Gouvernement ? Encore une fois, aucune décision n’est sortie de ces débats. L’exécutif s’est alors lancé dans de longues consultations avec les différents secteurs de la société pour la formation d’un nouveau CEP qui a vu le jour vers la fin de l’année 2007. Sur la demande de plusieurs secteurs et pour palier à la déficience totale de ces nouveaux conseillers en matière électorale, l’Exécutif a, de nouveau, nommé Mr Jacques Bernard qui a démontré ses capacités lors des trois tours d’élection de 2006 comme Directeur Générale. Mais l’Exécutif a jugé bon de changer les règles du jeu au beau milieu du jeu. Il a décidé de changer les règlements généraux du CEP alors que la condition d’acceptation de Monsieur Bernard était le maintien de ces règlements puisqu’ils ont été testé en 2006 et se sont prouvés efficaces. Monsieur Bernard alors démissionne avec pour conséquence un long retard anticipé des élections pour le renouvellement du tiers du Sénat et la crise politique qui s’en suivit car dix Sénateurs ont du quitter leur poste à partir du 8 Mai 2008, sans que des élections n’aient eu lieu. Personne ne peut prévoir la durée de temps nécessaire à un CEP totalement étranger aux affaires électorales pour l’organisation des élections. Une fois de plus, l’attention est détournée sur la question de la double nationalité, comme si c’était la priorité du moment, pour permettre au Palais National de perpétrer un coup d’état contre le Parlement et la Constitution en contraignant un Sénateur de six ans à partir en exil pour des raisons de sécurité personnelle. Comment alors comprendre toutes les promesses faites à la diaspora haïtienne par ce gouvernement sur cette question ?


L’on ne peut s’empêcher de penser que ce gouvernement, incapable de gouverner, se tourne de préférence vers une succession de petites crises au lieu de s’attaquer de front aux urgents problèmes qui ravagent notre pays. Il serait irréaliste de croire que la situation sociopolitique va s’améliorer, vu la tendance d’un gouvernement qui n’a fait que tergiverser pendant deux ans et qui, par ses propres actions (retard des élections indirectes et le tiers du Sénat, coup d’état contre le Sénat et la Démocratie,) mise en place d’un CEP sous le contrôle total de l’exécutif pour faire une sélection a un moment qui leur sera favorable,) nous conduit à une crise politique qui va s’agrafer sur une crise économique grandissante.


La situation économique


La situation économique du pays ne peut être plus désastreuse qu’elle ne l’est aujourd’hui. Depuis deux ans, les agronomes au pouvoir n’ont pris aucune mesure sérieuse pour encourager la production nationale dans les différents secteurs de l’économie, particulièrement l’agriculture.


Le secteur primaire (agriculture, élevage, pêche, industries extractives) représenté à plus de 90% par l’agriculture qui contribue à 25% du Produit Intérieur Brut (PIB) continue son déclin, car le gouvernement n’a établi aucune politique agricole pour renverser la tendance et augmenter la production. Il y a un besoin urgent de moderniser l’agriculture en Haïti avec l’introduction d’un système d’accompagnement des cultivateurs et de projets d’irrigation particulièrement dans les plaines du Nord Est, du Nord Ouest, dans la plaine des moustiques et de l’arbre, dans la plantation dauphin. Tous ces projets peuvent être rentabilisés à court et moyen termes avec un investissement de l’ordre de US 40 Million de dollars. Il y a aussi un besoin urgent de moderniser l’agriculture en Haïti avec l’introduction d’équipement mécanisé car notre productivité et notre rendement par hectare sont parmi les plus faibles au monde. Combien de kilomètres de canaux d’irrigation ce gouvernement a-t-il nettoyé, élargi ou créé en deux ans? Le gouvernement a-t-il en collaboration avec le secteur privé introduit des engrais appropriés dans toutes les zones agricoles pendant ces deux dernières années ? Alors, comment pouvons nous être compétitifs même sur notre marché interne ? Il n’est donc pas étonnant que les denrées traditionnelles de consommation soient importées à un rythme de plus en plus alarmant. En fait les importations de produits agricoles se chiffrent à près de US$ 400 millions et atteignent près de 30% de la valeur de nos importations globales. Cette fuite importante de devises est presque l’équivalent de ce que nous payons pour la facture pétrolière alors qu’une bonne politique agricole pourrait nous doter de la capacité d’augmenter notre production et ramener nos importations de produits agricoles à un niveau négligeable. Cette économie de devises nous permettrait d’augmenter nos importations de matériels et d’engins lourds dont nous avons grand besoin pour le développent de notre pays. (On n’aurait plus besoin d’emprunter 50 millions de dollars pour racheter des engins qui ont déjà été acheté en 98). D’autre part, une relance profitable du secteur agricole créerait des centaines de milliers d’emplois au niveau des sections communales. L’introduction simultanée de certains services de base diminuerait la migration vers les milieux urbains et allégerait la pression sur les infrastructures déjà inadéquates des municipalités.


Dans le court terme cependant, et pour alléger la souffrance de la population, des actions ponctuelles devraient être prises. En plus de l’aide alimentaire consentie par la communauté internationale, Il est urgent d’éliminer toutes les taxes directes sur certains produits agricoles importés tel le riz, le maïs, le blé, l’huile et réduire les taxes indirectes substantiellement, comme les charges portuaires sur ces produits et autres qui constituent l’assiette alimentaire. Ces actions ne constituent en rien une subvention car aucune ressource financière générée à partir d’autres sources ne sera utilisée pour baisser le prix de ces produits. Ceci ne correspond qu’à une réduction d’une taxe qui fera partie de la politique fiscale du gouvernement, dans le même esprit que tous les produits ne sont pas taxés au même niveau. Mais ce gouvernement a refusé de prendre de telles dispositions sous le fallacieux prétexte qu’elles seraient en violation de certains accords. Contrairement à ce que le gouvernement avance, cette stratégie reflèterait le cours normal de mesures économiques ponctuelles que tout gouvernement responsable se doit de prendre au bénéfice de son peuple, comme d’autres gouvernements à travers le monde l’ont fait. Quand le Sénateur Boulos avait proposé les trois points suivants en Janvier 08 a savoir : réduction de la taxe sur le riz, un programme de micro crédit aux petites marchandes qui servent de courroie de transmission des cultivateurs aux marchés, « Boutik Agricol », pour fournir des intrants agricoles aux paysans, le gouvernement avait systématiquement refusé car il estimait la proposition trop coûteuse. Aujourd’hui, l’USAID, est en train d’investir plus de 60 million de dollars pour donner a manger a ceux qui ont faim alors que le Venezuela apporte une contribution en engrais en don. Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas agi plus tôt ?


Le secteur secondaire (industries manufacturières, eau, électricité, bâtiments et travaux publics) ne représente que 16% du PIB, mais joue un rôle important dans la création d’emplois surtout au niveau des industries de sous-traitance. Le gouvernement n’a adopté aucune nouvelle initiative pour optimiser les retombées de la loi HOPE sur le chômage endémique qui sévit dans notre pays. Les contraintes du développement de cette industrie sont encore plus aigues aujourd’hui : La pénurie d’espace industrielle, le manque d’électricité, le coût excessif du port ne constituent que quelques exemples de facteurs limitatifs que le gouvernement aurait du commencer à résoudre dès le lendemain du vote de la loi. Des démarches sont entreprises pour prolonger dans le temps la durée de la loi HOPE alors que le gouvernement n’a pris aucune disposition pour s’assurer de la mise en place d’infrastructure adéquate pour accueillir ces nouveaux investisseurs potentiels.


Le secteur construction peut lui aussi constituer une source importante d’activité économique et un grand pourvoyeur d’emplois, d’autant plus qu’il existe une grande demande au niveau de l’habitat. La pénurie de logements a atteint des proportions alarmantes et là encore, le gouvernement a négligé de formuler une politique d’incitation financière à la construction. Les taux d’intérêt sont trop élevés, et l’accès au prêt hypothécaire est presque non existant. Encore une fois, ce secteur devrait recevoir un traitement fiscal privilégié pour satisfaire un besoin fondamental de la population haïtienne.


Quant aux travaux publics (construction de routes ou autres) Il est quant même surprenant de constater que, malgré les différentes sources de financement disponible, ces projets tardent à se concrétiser ou avancent trop lentement pour réaliser leur total impact sur l’emploi et le désenclavement des différentes régions du pays. On n’a pas l’impression que ce gouvernement comprend l’urgence d’un développement rapide des infrastructures qui sont tellement nécessaires à la croissance d’autres secteurs de l’économie nationale. Peut être que ce gouvernement vise un second mandat pour pouvoir atteindre sa vitesse de croisière ou le vrai démarrage ?


Le secteur tertiaire (commerce, hôtels, transport, communications et autres services) représente un peu plus de 50% de l’économie et est un pourvoyeur important d’emploi, surtout en milieu urbain. A part certains efforts déployés dans le sous-secteur touristique par le Ministre P. Delatour, il est malheureux de constater qu’il ne pourra jamais réaliser son potentiel tant que dure l’insécurité. Aucune autre politique n’existe qui puisse encourager le développement rationnel des autres composants du secteur tertiaire. Et pourtant, ce secteur peut avoir une croissance accélérée si le gouvernement s’implique avec le secteur privé dans une politique d’accompagnement en réduisant les obstacles à son développement.


La balance des paiements a pu maintenir un équilibre précaire à cause des US$ 1.6 milliards de transfert annuel de la diaspora Haïtienne. Nos exportations de marchandises n’atteignent qu’un peu plus de US$ 500 millions dont la contribution de la sous-traitance dépasse les 80% alors que nos importations sont plus de trois fois plus importantes soit US$ 1.6 milliards. Un tel déficit commercial (US$ 1.0 milliard) en plus d’un déficit net de plus de US$ 400 millions pour les services, ne peut être maintenu trop longtemps pour une petite économie aussi ouverte que la nôtre, d’où la nécessité de diminuer rapidement nos importations à travers une relance moderne de notre agriculture comme indiqué plus haut dans la section traitant de l’agriculture.

Une réponse rapide de la part du gouvernement pour assurer la mise en place des infrastructures nécessaires pour accommoder les investisseurs potentiels de la loi HOPE aurait pu permettre d’ augmenter nos exportations. L’effet combiné d’une diminution de nos importations et d’une croissance de nos exportations réduirait le déficit commercial à un niveau facilement gérable dans un laps de temps assez court. De plus, l’épargne en devise permettrait l’importation d’équipements pour accélérer la croissance économique plutôt que d’être utilises à des fins politique, de corruption des institutions démocratiques dans un pur objectif de maintien de pouvoir épicurien comme le dit si bien Daly Valet.

La Sécurité

L’insécurité est avant tout politique ; elle est manipulée à partir des plus hautes sphères de l’Etat. Pourquoi avoir libéré des Kidnappeurs notoires ? Pourquoi avons-nous un DDR qui réarme et gère les bandits comme des milices politiques pour semer le deuil et la destruction ?

Quelle est la finalité de cette campagne de terreur à travers le Kidnapping et l’exécution d’enfants innocents.

Pourquoi avoir laissé les casseurs infiltrés les émeutes de la Faim pour détruire les entreprises qui sont déjà si difficile à créer.

Il nous faut rétablir la sécurité dans les villes et surtout dans les sections communales pour que les habitants des zones rurales puissent recommencer a investir dans l’élevage.

Tout compte fait, le Gouvernement du Président Préval a échoué. Il lui incombait au minimum de créer les conditions nécessaires pour faciliter les investissements locaux et attirer les investisseurs étrangers puisque l’épargne domestique n’est pas suffisante pour un développement accéléré de notre économie. Croire qu’un environnement macroéconomique stable peut résoudre les problèmes d’un pays qui a surtout besoin de développement équivaut à une démission de ses responsabilité s, comme vient de le prouver l’équipe gouvernementale sortant par dessein ou manque de vision. D’ailleurs, ou est la stabilité macroéconomique dans une économie ou le taux d’inflation dépasse les 10% et les taux d’intérêt gravitent entre 23% et 34%, ou l’investissement privé est quasiment nul et ou les citoyens crèvent de faim ? Le micro crédit déjà difficilement accessible, enregistre des taux d’intérêt qui gravitent aux environs de 45%, taux absolument prohibitif pour toute sorte d’activité commerciale.

Il ne fait aucun doute que nous ne sommes pas encore sur le chemin du progrès réel. Tant que la bonne gouvernance fera défaut, nous continuerons à aller de recul en recul. Pour éviter une catastrophe humanitaire et éradiquer l’instabilité politique, sociale et économique qui menace avec persistance notre pays, il faut à tout prix arriver à mettre sur pied un gouvernement mieux avisé politiquement, doté d’une vision plus claire du développement et plus soucieux du bien-être national.

En attendant Godot, comme nous sommes en plein dans le théâtre de l’absurde, nous osons espérer qu’après la défaite de Mr. Eric Pierre qui n’a pas eu la chance de présenter ses plans de refonte de l’Etat, après la comédie jouée à Mr. Jean Max Bellerive, le prochain larron sera plus heureux et aura le support du Chef de l’Etat. De plus, nous implorons les cieux que le Chef Omnipotent saura reculer d’un pas pour donner à son premier ministre désigné, l’espace nécessaire pour pouvoir fonctionner et délivrer la manne qu’il aura apportée dans son « jakoute ». Messieurs, Pitié, attendez 2010 pour commencer vos joutes, le peuple a faim.

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