Haïti-Elections : Peut-on apprendre des dominicains?
Par : Cyrus Sibert, souvenirfm@yahoo.fr
Le Ré.Cit.- Réseau Citadelle, Cap-Haïtien, Haïti.
www.reseaucitadelle.blogspot.com
Deux éléments importants ont attiré notre attention le 16 mai 2010, durant notre visite en République Dominicaine. Nous y étions en tant qu'observateur des élections législatives et municipales.
1- La Junte électorale est au dessus de la mêlée. Son président nous parait être un homme respectable et respecté. Il jouit du respect des partis impliqués dans la course.
2- Les bureaux de vote sont hautement sécurisés avec des gardes électoraux, des agents de la police, des soldats de l'armée et d'autres vigiles.
Deux éléments qui font défaut au système électoral haïtien et posent un problème de confiance.
Magouilles et violences, il y en a eu. 4 personnes ont trouvé la mort le jour du vote. Dans certaines régions, on a failli enregistrer des batailles rangées entre partisans du PRD et ceux du PLD. On a acheté des ''cedulas'', la carte électorale dominicaine, en vue de priver le parti adverse d'une certaine quantité de voix. Mais le tout s'est déroulé en dehors du système. Au bureau de la junte, les représentants des partis politiques ont à plusieurs reprises exprimé leur confiance au système. Ils n'avaient pas l'impression que la JUNTE était impliquée dans des opérations de fraudes.
Le président du Conseil était très calme le jour du vote. A plusieurs reprises, il se présente dans le Centre de Presse du siège central de la JUNTE pour échanger des informations avec les journalistes et même parfois rigoler.
Dans l'après-midi du 16 mai, il n'y avait pas d'informations faisant état de centre de vote envahi par des bandits qui opéraient à bourrer les urnes et à falsifier les procès-verbaux. Dans la soirée, une compagnie de sondage donnait la tendance, à partir des témoignages recueillis des électeurs à la sortie des urnes. A 21 heures, on comptait déjà les bulletins, les procès-verbaux et les résultats partiels étaient visibles sur le petit écran.
Le 17 mai dans la station de bus, on pouvait remarquer des journaux titrés : le parti PLD remporte le Sénat. Il n'y avait pas un temps d'incertitude dans le but de manipuler les résultats.
Dans notre Texte : Peut-on organiser des élections crédibles avec René Préval ? (1) , nous avions soulevé l'importance de sécuriser les centres de vote. Lors des élections en Haïti, nous observons que les soldats de la MUNISTAH et les policiers sont placés très loin. La MINUSTAH trouve toujours une justification pour livrer les centres de vote aux bandits armés qui se livrent à des opérations de fraudes massives allant de remplissages d'urnes jusqu'à la falsification des procès-verbaux des opérations de dépouillement. Les représentants des partis politiques placés dans les bureaux sont souvent menacés, obligés parfois de quitter les centres de vote pour ne pas être victimes des violences des bandits.
Conséquences, en Haiti, le vote n'a plus d'importance ; l'abstention est la principale caractéristique des joutes ; inutile d'avoir des programmes à débattre.
Pourtant, il n'est pas impossible de sécuriser les centres de vote. La MINUSTAH a les moyens d'aider le Conseil Electoral à publier les résultats au soir des élections.
Lors des élections de février 2006, nous étions dans une voiture avec un observateur de HDP (Haiti Democracy Project), quand face à notre préoccupation au cas où René Préval remporterait le vote au premier tour, il a déclaré : Ne vous en faites pas. Il y aura un second tour. J'étais avec les hommes de la MINUSTAH, ils ont le résultat dans la nuit, Préval obtient 47% pas 50% +1. Ils ont pu le savoir grâce à leur réseau de communication.
Cependant, en vue de manipuler les résultats, cette mission de l'ONU a laissé planer le doute et comploté en vue de plonger le pays dans des émeutes qui justifieraient la proclamation illégale de leur poulain à la tête de l'Etat.
La répétition de ce petit jeu malin finira par un soulèvement généralisé, comme on l'a vu au Kenya, en Iran et dans d'autres pays du monde. Un soulèvement violent qui fera de la MINUSTAH et de son personnel – représentants de la politique internationale - des cibles privilégiées.
Ceux qui réclament l'organisation des élections ont intérêt à réfléchir sur la sécurité des centres de vote. Il faut aussi un CEP au-dessus de tout soupçon.
1- http://reseaucitadelle.blogspot.com/2010/03/peut-on-organiser-des-elections_14.html
(Avec la collaboration des journalistes Marcel Joachim et Curtis Eyma.)
RÉSEAU CITADELLE (Ré.Cit.), le 24 Mai 2010, 14 hres 2010.
_____________________________Peut-on organiser des élections crédibles avec René Préval? By Cyrus Sibert
Par Cyrus SIBERT
Cap-Haïtien, le 02 Décembre 2008 ; (Ré.Cit.).-
"Ce qui compte, ce n'est pas ceux qui votent, c'est ceux qui comptent les votes." (Joseph Staline).
Le 4 novembre 2008, le monde observait l'élection de Barack OBAMA à la présidence des États-unis d'Amérique. L'afro-américain a pu, grâce à un système politique méritocratique remporter les élections. Ceux qui s'attendaient à un coup de force des conservateurs de l'establishment, ont eu la grande surprise: le mérite est l'idée directrice de l'hyperpuissance mondiale, les institutions sont adaptées en ce sens, leur renforcement a toujours été le souci des dirigeants américains. Elles sont là pour neutraliser les réflexes primaires des groupes ou des clans. Même là où le capital règne en maître, le peuple et son vote, légalement exprimé en toute liberté, constituent la base d'une démocratie.
Les élections ne sont pas un moyen de maintenir au pouvoir des régimes en faillite, des dirigeants voyous, comme on le voit dans plusieurs pays du tiers monde dont Haïti. Les lois sur le financement des partis empêchent aux riches et à la mafia d'imposer leurs candidats à coup d'argent sale. Le système de collecte de fonds de campagne reflète l'idée démocratique. Il permet aux citoyens de contrôler le système, grâce à leur contribution. On enquête sur la vie des candidats. Même avec des imperfections, on constate un souci de grande moralité dans le système électoral des États-unis. On est loin de ces élections de chez nous dont les candidats sont des repris de justice, des criminels de droits commun, des corrompus, des narcotrafiquants, des bandits de grands chemins, financés par la mafia et l'argent sale de la drogue, du kidnapping ou par des fonds occultes de pays amis comme le Taiwan. Les élections ne constituent pas un moyen de recycler les voyous et les nuls irresponsables qui à leur actif n'ont rien que la débauche et la perversion.
L'Institution électorale, pierre angulaire du projet démocratique haïtien.
Le mode de renouvellement des dirigeants à la tête de l'État constitue la pierre angulaire de la stabilité en Haïti. L'histoire des régimes dictatoriaux démontre le souci des tyrans de bloquer le cheminement des élites à des postes stratégiques au niveau de l'État. On cherche, comme aujourd'hui, à faire main basse sur la machine électorale. On se souvient encore de ces élections dirigées depuis le Ministère de l'intérieur, de ces résultats imposés par l'armée ou par la police – exemple 21 mai 2000. Les citoyens n'ont pas eu droit de vote. On utilisait toutes sortes de tactiques pour empêcher le vote populaire légalement exprimé et crier victoire avant même la proclamation officielle des résultats. En conséquence, le changement de régime et de politique se fait dans la rue. Dans l'impossibilité de s'exprimer, la subversion reste l'alternative. D'où l'instabilité que connaît Haïti depuis son indépendance. Les observateurs de la communauté internationale critiquent souvent les insurgés et les rebelles, les accusant d'être à la base des chambardements. Nous estimons ces critiques superficielles et irresponsables, car les observateurs ne sont pas sans savoir les dispositions de planification des fraudes électorales. Ils sont souvent complices. Le 14 novembre 2008, lors d'un point de presse du Chef Civil a.i. de la MINUSTAH Oumar BA dans le Nord, nous avions appris que l'appui de la MINUSTAH au Conseil Electoral Provisoire s'arrête à la sécurité et à la logistique. La Mission n'entend pas superviser tout le processus. C'est une affaire haïtienne. En réponse à la question: Pourquoi n'observez vous pas tout le processus, c'est à dire du recrutement du personnel de l'appareil aux opérations de vote? La réponse est: Notre travail s'arrête à la sécurité et à la logistique (transport et entreposage).
Une réponse inquiétante, vu que tout le monde est au courant des projets de main mise de la Présidence sur le Conseil Electoral Provisoire; déjà il est bruit que certains dossiers déposés par des jeunes diplômés pour intégrer l'appareil électoral au niveau des Bureaux Electoraux Communaux (BEC) du Nord sont portés disparus. L'ancien premier Ministre Jacques Edouard Alexis, à travers les cinq Ministères qu'il contrôle, finance déjà sa campagne électorale. Le Ministère de l'Intérieur se prépare à diriger comme aux temps des Duvalier, les élections. Les BED (Bureaux Electoraux Départementaux) seront aux mains des hommes du régime. Les présidents de bureau de vote seront des hommes d'Alexis. Toute la machine électorale actuelle sera dominée par le pouvoir en place. On s'achemine vers des élections officielles de jadis.
La démocratie n'avancera pas. Comme en 2000, les pressions du Palais national sur l'institution électorale en vue d'obtenir des élections officielles accoucheront la polarisation de l'espace politique, des conflits, des affrontements et l'instabilité.
Quel intérêt a un citoyen moral à participer à des joutes qui ne viseront qu'à redorer l'image des criminels, des trafiquants de drogue et des corrompus?
Dans le Nord, il est évident que les élections sénatoriales catapulteront Moise Jean-Charles, un homme accusé par une enquête de l"OEA d'incendies criminelles, impliqué dans le meurtre de Guy Salvant, le frère du Député de Limonade- Quartier Morin Hugues Célestin et Nawoon Marcelus ancien député Lavalas de la Grande Rivière du Nord accusé par l'Ambassade des Etats-unis de trafic de drogue. Car le CEP étant une succursale de Jacques Edouard Alexis, le peuple ne pourra pas s'exprimer en faveur d'autres candidats populaires.
La pédagogie des élections
Pourtant, les élections devraient constituer l'axe central du processus démocratique en Haïti. L'organisation de joute électorale devrait donner à la nation la possibilité de changer de politique sans violence, mais à travers les urnes. Le filtrage des candidats à partir de leur casier judiciaire et de leur niveau moral devrait servir d'exemple et encourager les jeunes à rejeter la délinquance. Les débats entre candidats devraient jouer un rôle d'éducation et de sensibilisation des citoyens face aux grands défis de la nation.
Les confrontations idéologiques devraient permettre de réduire les élans populistes d'explications faciles et de rejeter les approches manichéennes. En Haïti, nous sommes loin de cet objectif. Nous avons une démocratie sans le droit. Les résultats des élections de 1990 que l'on se tue à qualifier dans les milieux diplomatiques, de 1ère élection crédible dans l'histoire d'Haïti, ont été publiés sur les ondes de Radio France Internationale et les foules du candidat populaire Lavalas n'ont pas permis le respect scrupuleux de la loi électorale en ce qui concerne les protestations, le contrôle des procès-verbaux, etc. En 2006, la rue a encore une fois imposé le Président Préval avec 48% des votes exprimés, alors que la loi électorale réclamait 50% plus 1. Nous sommes loin d'avoir des élections crédibles en Haïti. Le processus électoral en reste une mascarade pour légitimer les criminels, les corrompus, les apprentis dictateurs et leur pouvoir personnel.
Conclusion
Le Président René Préval refuse de respecter les échéances constitutionnelles. Depuis son élection à la tête de l'Etat d'Haïti, il y a tout fait pour ne pas organiser des élections. Plusieurs diplomates qui le supportent ont abondé dans le même sens, répétant qu'Haïti organise trop d'élections. Ainsi, il n'a pas organisé les élections indirectes qui devaient renforcer la tradition électorale en élisant un Conseil Electoral Permanent, comme le veut la constitution en vigueur. Le parlement n'est pas renouvelé. Il avance vers un disfonctionnement de fait, car en 2010, le Sénat sera amputé de 2/3. Devant ce constat des dérives de la part du Chef de l'Etat, le consensus trouvé pour sa nomination par la communauté internationale en 2006 ne tient plus. En lieu et place du renforcement de la démocratie, il s'entête à manœuvrer, à affaiblir les institutions, dans le but de garder le pouvoir directement ou indirectement. La stratégie des démocrates devrait être de continuer la logique de blocage du processus électoral, jusqu'à la fin du mandat du Président René Préval. Car, il est connu de tous que le Palais national s'active à contrôler les Bureaux Electoraux Départementaux, les bureaux au niveau communal et les bureaux de vote. Le premier Ministre sortant Jacques Edouard Alexis, à partir de cinq (5) Ministères dont l'Intérieur qu'il contrôle promet des élections officielles. A travers le pays, on recrute des bandits comme candidats, membres de l'appareil électoral et/ou hommes de gangs pour les prochaines violences électorales. Avec la position géographique d'Haïti comme voie de transit pour les narcotrafiquants et les criminels de tout poil, on devrait mettre sur pied une procédure de ''vetting'' sur les candidats afin de réduire les nombres de bandits au pouvoir. La fin du mandat de René Préval et son départ diminueront la pression de ses hommes corrompus sur le système électoral. Une formule Président Provisoire et Premier Ministre Michèle D. Pierre-Louis serait un consensus idéal, pour la poursuite du processus constitutionnel et le rétablissement de la neutralité électorale et de l'esprit de négociation qui existait en 2006, celle qui avait permis à un homme comme René Préval de devenir Président d'Haïti, pour un second mandat. On pourrait profiter de cette nouvelle situation spéciale pour poser à partir d'accords entre les protagonistes de la classe politique et de la société civile, l'amendement de la Constitution ou de l'adoption d'une nouvelle Constitution. La réforme judiciaire et l'organisation des élections sont deux éléments fondamentaux pour la bonne gouvernance et la stabilité en Haïti. On comprend mal que les Nations Unies qui se disent en mission de stabilisation en Haïti refuse de s'engager à fond dans l'institutionnalisation des institutions électorales et judiciaires.
"Ce qui compte, ce n'est pas ceux qui votent, c'est ceux qui comptent les votes." (Joseph Staline).
RESEAU CITADELLE (Ré.Cit.), le 02 Décembre 2008, 12 heures 05.
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