samedi 26 juin 2010

Cap-Haïtien : L’U.E. finance une campagne contre les excréments humains.

Cap-Haïtien : L'U.E. finance une campagne contre les excréments humains.



Par : Cyrus Sibert, souvenirfm@yahoo.fr
Le Ré.Cit.- Réseau Citadelle, Cap-Haïtien, Haïti.
www.reseaucitadelle.blogspot.com


Au Cap-Haitien, à l'occasion de la Coupe du Monde de Foot-Ball, on peut lire sur le petit écran un message important: Pa jete poupou nan lari, pa poupou bo lanme ak bo ravine. Poupou nan latrine. Moun paka viv nan sa. (Ne pas jeter des excréments humains dans la rue. Ne pas déféquer au bord de la mer. En cas de besoin aller dans une latrine.) Durant toutes les rencontres, on fait passer un ruban sur les chaines de télévision de la ville avec le message suivi des noms des organisations et institutions qui ont patronné le projet : Santé Publique, Projet EAUCAP - suivi du nom du bailleur de fonds : Union Européenne.


Un message clair qui certes, traduit la réalité. Même quand les dirigeants de la ville du Cap-Haitien n'ont jamais pensé une fois à ce problème d'élimination des déchets fécaux. La ville du Cap-Haitien est une grosse poubelle à ciel ouvert. Chaque bloc de 1600 m2 contient de grosses latrines indigènes vieilles du temps de la colonie ; des latrines conçues pour 5 à 6 familles et qui aujourd'hui doivent desservir plusieurs dizaines ménages entassés dans des espaces devenus trop exigus.


Les quelques remarques faites dans la presse sur cette réalité triste n'ont pas été prises en considération. La mairie, le Ministère de la Santé publique, le Ministère des Travaux Publics, l'ISPAN sont les instances qui normalement devaient se pencher sur la situation et proposer des mesures comme solution. L'état des toilettes publiques de la majorité des institutions est une preuve qu'il n'y a aucune différence entre nos cadres-dirigeants et le bas-peuple.


Emportés par les flots du populisme et de la corruption, supportés par d'autres médiocres-rampeurs qui ne voient dans le pouvoir public qu'un moyen de jouir et de faire fortune, les dirigeants ont failli à leur mission. Dans la deuxième ville du pays, on continue de construire sans toilettes adéquates. Les maisonnettes construites illégalement sur le flanc des mornes de la ville par des agents de la Mairie pour être louées à des pauvres venus des Gonaïves et des milieux ruraux n'ont pas de toilettes. Dans certains cas, on transforme l'espace où il y avait une toilette en chambre, ne laissant aux locataires que le bord de mer comme alternative.


Celui qui en public se fait passer pour une personne cultivée, habite, vit, cuisine et mange à coté d'une latrine puante, aussi ancienne que la ville. Dans d'autres cas, on défèque dans des sachets qui seront balancés aux premières gouttes de pluie. Les pauvres travailleurs qui se livrent au nettoyage manuel des latrines remplies déversent le contenu de leur chargement dans des égouts de la ville ou dans la mer. Ces esclaves de notre société à INTERNET ou à TELEPHONES CELLULAIRES sont généralement des éboueurs employés par la Mairie ou le Ministère des travaux publics. Ils peuvent être vus dans un caniveau de la ville trempés jusqu'aux cheveux dans les eaux usées de la ville, tentant manuellement de déboucher les canaux d'évacuation.


Il a fallu une intervention de l'UNION EUROPEENNE pour dire à cette société qu'on ne joue pas avec les excréments, qu'on ne peut pas déféquer au bord de la mer, d'une rivière, d'un ravin, qu'on ne peut continuer à profiter des eaux pluviales pour se débarrasser des déchets humains en les jetant dans la rue.


A ce niveau, on ne peut que se demander jusqu'où ira cette descente aux enfers ? Cette culture de marronnage et d'irresponsabilité collective semble hanter à jamais nos esprits au point de vivre dans la merde tout en nous faisant passer pour des hommes modernes. Déjà notre pays pollue les plages de certains pays de la Caraïbe avec ses déchets de toutes sortes. La pauvreté n'explique pas la malpropreté. En plus d'être pauvres, nous ne faisons pas preuve d'un peuple ayant des notions élémentaires d'hygiène publique. L'Union Européenne est obligée de financer des messages que nous devrions apprendre à l'école ou au berceau. Nous sommes peu soucieux des conséquences nocives que ce comportement moutonnier entraine. Le pire, nous n'avons plus le courage d'en avoir honte.


RÉSEAU CITADELLE (Ré.Cit.), le 26 juin 2010, 19 hres 43.


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