samedi 9 juillet 2011

LE POUVOIR NÉOPATRIMONIAL (Texte du Sénateur Rudolph Henry Boulos)

LE POUVOIR NÉOPATRIMONIAL

 

Le pouvoir en Haïti, c'est la Chose publique au service d'un clan pour assouvir ses désirs et son bien-être au détriment de l'intérêt collectif, national. Aujourd'hui plus que hier, nous assistons au triomphe du népotisme, du clanisme, du copinage, du favoritisme, de l'impunité,  de la corruption généralisée et de la médiocrité dans le mode de gestion néopatrimonial de la Chose publique, sans souci de résoudre les problèmes bicentenaires que confronte le pays : non-existence de l'État-Nation, absence de volonté de vivre ensemble, effondrement du lien social, manque de vision et de leadership, désastre environnemental, chômage et pauvreté de masse. Le pays vit une crise structurelle globale, une véritable crise sociétale.

 

Selon Albert Einstein, on ne peut résoudre un problème sans changer le niveau de conscience qui l'a créé. Si l'on transpose cette formule géniale du célèbre physicien dans le domaine politique, économique et social, on peut oser affirmer qu'il est impossible de trouver une solution urgente aux problèmes cruciaux affectant notre pays avec les mêmes têtes, c'est-à-dire avec ceux qui les ont créés ou qui ont manifesté, dans la période d'histoire immédiate et inachevée d'après 1986, une incapacité déconcertante à les résoudre. La mise en branle du processus de changement du système bicentenaire implique l'émergence de nouvelles figures et l'application d'un ensemble de mesures visant à faire échec aux pratiques d'impunité systématique, de corruption généralisée et de médiocrité absolue. Il faut donc un grand coup de balai… et une nouvelle vision de l'avenir de notre pays dégagée, par exemple, dans le Plan Stratégique de Sauvetage National (PSSN). La refondation de l'État-Nation suppose la modernisation du système politique, économique et social, de même que la refondation de notre système éducatif. Comment y parvenir sans penser l'État et le développement économique, sans abolir la domesticité qui est en fait de l'esclavage déguisé ? Comment y parvenir sans un leadership politique, économique, social et intellectuel éclairé ? Comment favoriser l'émergence de ce type de leadership sans l'intégration de la diaspora, principal bailleur de fonds du pays, véritable réservoir de ressources humaines, étant donné que, selon la Banque Mondiale, 87% des cadres haïtiens en font partie. Peut-on concevoir un système de crédit immobilier, la création de villages de retraite, la mise en œuvre d'un plan de développement de l'industrie touristique, la création d'une large classe moyenne et d'une bourgeoisie entrepreneuriale sans la participation active de la diaspora ? Et comment intégrer la diaspora sans une loi sur la nationalité respectant le principe du jus sanguini ? 

 

Penser l'État et le développement, c'est mettre en œuvre une campagne de désarmement général et jeter les bases de la construction des appareils répressifs et administratifs assurant au pouvoir politique le double monopole de la contrainte physique légitime et de la fiscalité, ainsi que l'environnement global favorable aux investissements massifs de capitaux étrangers dans le pays.  La réforme du système fiscal et la création de micros, petites et moyennes entreprises doivent créer les conditions permettant à l'État d'extraire des ressources de la société pour former et payer ses fonctionnaires, tout en offrant les services requis à la population sur n'importe quel point du territoire. Cela implique la déconcentration et la décentralisation, la fin de la République de Port-au-Prince, de l'impunité, de la gestion néopatrimoniale de la Chose publique, du populisme clanique et du banditisme politique téléguidé par l'Exécutif présidentiel. C'est une obligation. C'est un impératif auquel nul ne peut se dérober si l'on entend freiner cette descente aux enfers fatale, si l'on veut dissiper le phénomène de désespoir collectif en cours et mettre le peuple au travail…

  

Sénateur Rudolph Henry Boulos

Port au Prince le 28 Juin 2011

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"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

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