lundi 2 juillet 2012

Jean-Bertrand Aristide, en embuscade à Port-au-Prince. (lemonde.fr)

LE MONDE |  • Mis à jour le 
Que fait Jean-Bertrand Aristide de ses journées ? "C'est la question à 100 000 euros", répond un de ses anciens ambassadeurs. Le retour à Port-au-Prince de l'ancien président, après sept ans d'exil en Afrique du Sud, avait suscité l'inquiétude des "pays amis" d'Haïti. Les Etats-Unis et la France avaient tenté, sans succès, de le retarder, craignant qu'il ne perturbât l'élection présidentielle du 20 mars.

Défiant Paris et Washington, Jean-Bertrand Aristide est rentré deux jours avant le scrutin, et deux mois après l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier, au pouvoir de 1971 à 1986. Peu après sa descente d'avion, l'ancien prêtre des bidonvilles, chassé du pouvoir en 1991 puis en 2004, a dénoncé la mise à l'écart de son parti dans le processus électoral. "L'exclusion de Lavalas, c'est l'exclusion de la majorité des Haïtiens", a-t-il lancé dans ce discours, le seul qu'il ait prononcé depuis son retour en Haïti.

A la fin de son exil, l'ancien président avait annoncé qu'il se consacrerait à l'éducation et aux victimes du séisme de janvier 2010. Selon l'ancien sénateur Gérald Gilles, l'un de ses proches, il se consacre à la relance de la faculté demédecine de l'université de la Fondation Docteur Aristide, créée en 2001 puis fermée en 2004.

"A ma connaissance, depuis son retour, il n'est sorti qu'une fois de sa résidence de Tabarre (près de Port-au-Prince). Il reçoit quotidiennement des visites d'anciens collaborateurs, de diplomates, de personnalités étrangères et de responsables de son parti", raconte l'un de ces visiteurs. Mais il continue derefuser toute interview.

Ce silence donne lieu à diverses interprétations. M. Aristide est toujours "secrétaire général à vie" de Famille Lavalas, un parti qui a connu des scissions durant son exil. Il est question de préparer un congrès du parti et d'arrêter une position avant les élections sénatoriales, prévues en novembre.

"Nombreux sont ceux qui pensent qu'il prépare son retour"

"Dans les milieux politiques et médiatiques, nombreux sont ceux qui pensent que l'ancien président prépare son retour, dit l'ex-diplomate. Il attend sans doute le dégonflement du phénomène Martelly, dont on perçoit les premiers signes, liés aux difficultés de la rentrée scolaire et au débat sur le départ de la Minustah" (Mission des Nations unies en Haïti)", dont le mandat doit s'achever le 15 octobre.

Il a fallu plus de quatre mois au président Martelly pour nommer un premier ministre. Ses deux premiers choix ont été refusés par le Parlement. Le troisième, Garry Conille, un fonctionnaire international, vient d'être accepté par le Sénat.

"Le groupe des 16 - les sénateurs qui ont rejeté les deux premiers candidats - est lié à Aristide", soutient l'analyste Robert Benodin. Deuxième choix de M. Martelly,Bernard Gousse a été vivement critiqué par plusieurs responsables de la Famille Lavalas. Ils lui reprochaient d'avoir réprimé les militants de ce parti alors qu'il était ministre de l'intérieur du gouvernement provisoire, après le départ en exil de Jean-Bertrand Aristide.

Le projet de reconstitution de l'armée, annoncé par Michel Martelly, ouvre un nouveau terrain d'affrontements. Responsable de multiples coups d'Etat et utilisée pour réprimer les opposants, l'armée a été dissoute par Jean-Bertrand Aristide en 1995. Avant même d'en informer le Parlement, le président Martelly a présenté à plusieurs ambassadeurs un projet de 95 millions de dollars pour reconstituer unearmée de 3 500 soldats et un service de renseignement, afin de combattre les"menaces terroristes et les organisations criminelles" ou de "surveiller les organisations extrémistes et les mouvements destinés à répandre l'anarchie".

Cette proposition a suscité "la suspicion, la crainte et la préoccupation" des défenseurs des droits de l'homme et de plusieurs responsables politiques, qui souhaitent plutôt un renforcement de la police afin de préparer le départ des casques bleus.
Dates
Décembre 1990 Jean-Bertrand Aristide, adepte de la "théologie de la libération "" et personnage controversé, est élu président par une écrasante majorité.
1991 Il est renversé par un putsch.
2000-2004 Second mandat, marqué par l'émergence de bandes criminelles, les "chimères", le narcotrafic et la corruption.
29 février 2004 Le président Aristide est évincé du pouvoir sous la pression d'une insurrection armée et quitte Haïti dans un avion américain. Début de son exil en Afrique du Sud.
17 mars 2011 Jean-Bertrand Aristide revient en Haïti.
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"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

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