Ceux qui ont longtemps manipulé les masses populaires avec des phrases révolutionnaires — la répétition de mots d’ordre révolutionnaires sans égard aux circonstances objectives, au changement marqué par les derniers événements en date, à la situation du moment — n’arrivent même pas à comprendre le danger qui existe dans l’absence de discipline dans l’utilisation des concepts forts et des termes comme “Révolution”, “Gauche”. “Marxisme” “Léninisme”, “Justice sociale”. S’il ne tenait qu’à eux, il n’existerait plus de gauche sur la terre. La gauche mondiale qui en ce début du 21e siècle fait face à un reflux idéologique impressionnant, doit se sentir embarrassée par les affairistes et les démagogues haïtiens qui prennent la parole en son nom. Ainsi, elle risque d’être d’accord avec nous d’adopter le terme “NON-GAUCHE” comme meilleur qualificatif correspondant à la réalité haïtienne.
Comment comprendre l’utilisation des termes “Révolution”, “Gauche”, “Marxisme”, “Léninisme”, “Justice sociale” en Haiti?
Le peuple haïtien est témoin de l’aboutissement de la majorité de ceux qui se disent de gauche en Haiti. Ils sont devenus riches; leur gouvernement sont des plus corrompus de la planète; ils ne respectent pas les droits humains, les libertés de presse ni les droits élémentaires de la personne humaine. Selon eux, la tyrannie des foules justifie les violations des droits civils et politiques. En Haiti, il y a une gauche spéciale différente de la gauche mondiale que nous sommes obligés d’appeler “NON-GAUCHE” pour ne pas offenser la gauche authentique que nous respectons.
Ces jours-ci, le terme “révolution” est égal à “violence”, “anarchie”, “dechoukaj”; le droit d’utiliser des gangs de voleurs et de criminels pour incendier des marchés publics, piller des stocks de marchandises appartenant à de pauvres marchands ambulants et les biens des opposants; et mettre à mort des adversaires politiques avec mépris pour la vie humaine.
Tous les jours, les médias rapportent les déclarations de leaders de Pitit Dessalines qui brandissent la révolution comme menace. Révolution prise uniquement dans le sens de violence aveugle.
Ce constat nous rappelle les efforts du professeur Gérard Pierre-Charles dans son livre “Radiographie d’une dictature” et des historiens du secteur démocratique comme Michel Hector pour démontrer que le Duvalierisme n’était pas une “révolution". On peut dire qu’avec des faibles d’esprit de cette NON-GAUCHE haïtienne, la pensée politique est descendue à son niveau le plus bas. Parce qu’en fait, le mouvement de François Duvalier dont on combattait le caractère révolutionnaire ressemble plus à une révolution que la violence des hordes lavalassiennes ou d'autres anarcho-populistes.
De plus, à Cuba où il existe actuellement le pouvoir révolutionnaire de gauche le plus authentique du monde, il n’y a pas d’anarchie; l’ordre public est assuré; la sécurité est une priorité; le respect des biens privés et publics est de rigueur; il existe un service se renseignement avancé et une Armée cubaine assez forte pour défendre son territoire national et faire échec aux menées subversives des conspirateurs.
En Haiti, on nous présente l’ANARCHIE comme RÉVOLUTION.
3- Marxisme - Léninisme :
Pour avoir lu des philosophes de gauche et de droite, pour avoir pris le temps d'analyser les critiques de gauche et de droite, il nous est difficile d’accepter que des gens qui se disent de gauche utilisent le marxisme comme Bible ou prophétie. C’est une approche métaphysique qui est contraire au marxisme.
Quand, on écoute l’ex-Sénateur Anacasis Jean-Hector réciter sur les médias - comme un théologien - ses formules marxistes ou léninistes, on se rend compte qu’il n’a pas fait l’effort de les appliquer à la réalité haïtienne.
Car, le marxisme doit-être une méthode d’analyse de la réalité présente; pas de la réalité que vivait Karl Marx au début de la révolution industrielle au 19e siècle ni de celle que vivait Lénine au 20e siècle.
Des philosophes et théoriciens de l’économie ont déjà démontré les faibles de certaines prévisions de Marx. Ce dernier ne pouvait pas anticiper l’impact du boom technique sur la dynamique historique qu’il analysait. Aujourd’hui, l’industrie est robotisée; le secteur des services domine l’économie des pays industrialisés; l’informatique transforme l’environnement du travail. Certes, il y a de nouveaux problèmes, mais ils sont en quelque sorte différents de ceux qu’analysait Karl Marx; et, le marxisme comme science doit pouvoir les analyser, les comprendre et apporter une explication actualisée et des solutions appropriées.
En ce sens, nous remercions le professeur Charles Manigat de la faculté de Droit de l’INUJED (Institut des Sciences Juridiques, Économiques et de Développement Régional) au Cap-Haitien, qui nous a encouragé à lire d’autres philosophes comme Joseph Shumpeter, Raymond Aron, John Locke, Alexis Tocqueville, Louis Althusser, des classiques comme David Hume, Machiavel, Spinoza, Hegel, Montesquieu pour pouvoir établir un certain équilibre.
Car, la différence entre philosophie Marxiste, méthode scientifique d’analyse Marxiste et idéologie Marxiste, dogme, prête à confusion. Et, ce n’est pas le livre de poche “Principes élémentaires de philosophie’ qui libèrera d’une approche marxiste limitée.
4- Mulâtre/Noir -Pitit Desalin/Pitit Petion :
C’est difficile de comprendre que des Marxistes-Léninistes, des hommes de gauche qui se disent révolutionnaires puissent supporter des mouvements coloristes, racistes de type noirs contre mulâtres, mulâtres contre noirs. Car, le vrai marxiste doit pouvoir établir un distingo clair entre ce qui est historique et le naturel. Définir une classe sociale à partir d’identifiants naturels comme le font certains groupes racistes dits d’extrême droite, c’est contraire aux principes fondamentaux du marxisme. Pourtant, en Haiti, des gens réputés théoriciens de gauche, en font leur cheval de bataille. Nous sommes témoins de cette cabale médiatique de certains se disant descendants de Dessalines contre d’autres citoyens indexés d’être des descendants de Pétion.
En Haiti, la paresse engendre facilité puis décadence. Depuis la mort de Jean-Claude Bajeux, on peut difficilement se souvenir d’un militant des droits humains abordant les problèmes sociaux avec le niveau intellectuel et la maitrise requise des concepts pour l’édification des jeunes, des étudiants et des chercheurs au niveau national et international. Nous sommes dans le “degaje”, le “naje pou soti”; en un mot, de l’affairisme à tous les niveaux. Il suffit de répéter sur des médias haïtiens, à longueur de journée, “respect des droits humains” pour que n’importe quel quidam puisse acquérir la réputation de défenseur des droits humains et se positionner sur le marché de la corruption.
Même quand cette confusion idéologique que nous dénonçons aujourd’hui, remonte — dans une certaine mesure — à l’origine même des tentatives révolutionnaires en Haiti, l’absence des personnalités comme Jean-Claude Bajeux, Michard Gaillard, Gérard Pierre-Charles, René Théodore, Père Smarth et le silence des personnalités comme Madame Suzy Castor, Rosny Smarth, Michel Hector, Gary Victor, Arnold Antonin, Serge Gilles crée un vide entrainant vers le niveau le plus bas.
Nous n’avons pas la prétention d’être marxiste. Mais, en simple observateur curieux, nous pouvons identifier les lignes philosophiques et idéologiques d’un vrai marxiste. Aussi, ce dernier doit-il d’abord avoir la passion de la lecture et de la recherche. Il ne suffit pas d’être capables d’hurler avec les loups, d’être capable d’appliquer le supplice du collier ou de lancer des bouteilles ou des pierres sur des pare-brises de voitures pour se faire une réputation révolutionnaire ou marxiste. La gauche authentique a une ligne universellement reconnu; un vrai marxiste évolue à l’intérieur d’un cadre philosophique et scientifique. L’avenir politique d’Haiti passe par un travail visant à démasquer les imposteurs et à discipliner ce secteur.
Des gens de gauche qui bloquent un projet d’éducation universelle en faveur des enfants pauvres dans un pays dominé par l’analphabétisme; des militants de gauche incapables de saisir le coté social de la gouvernance Martelly/Lamothe au point de qualifier PetroCaribe de gaspillage quand les fonds ne financent pas les compagnies de l’oligarchie de la construction — une campagne qui fait l’affaire du courant international anti-Chaves/anti-ALBA; des marxistes qui font l’éloge des procédés du vodou, des loas ou de la magie; c’est la réalité en Haiti.
On se demande si le fait que Fidel Castro n’a jamais visité Haiti n’était pas sa façon de dire “il y a un sérieux problème idéologique avec ces haïtiens qui se disent de gauche encore pire, Maristes-Léninistes. N’est-ce pas étrange que le Commandant Fidel Castro qui aimait beaucoup le peuple haïtien, a rendu visite au peuple voisin dominicain, sans traverser la frontière? Le Leader Maximo Cubain semble avoir été prudent avec ces haïtiens qui profitent des progrès de sa révolution sans être capables de transformer la situation socio-économique dans leur pays. Castro ne pouvait pas trop apprécier ces nuls, ces petits-bourgeois qui se disent marxistes, léninistes, militants de gauche, tout en s’accrochant aux privilèges de l’économie de rente et du système néo-féodal qui constituent la cause fondamentale de la misère et du sous-développement en Haiti.
Cyrus Sibert, Cap-Haitien, Haiti // 9 décembre 2016
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