En date du 7 février 2014, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) dans une circulaire No CSPJ/02-2014/1382 adressée aux Présidents des Cours d'Appel et Doyens des 18 juridictions des Tribunaux de Première Instance de la République, enjoint à ces autorités d'interdire à tout Juge dont « le mandat » est arrivé à terme de poser des actes relevant de l'exercice de sa fonction et de le dessaisir de toute affaire pendante en attendant « le renouvellement de son mandat » par une commission présidentielle.
Cette note, à plusieurs égards, est illégale, inopportune et lâche.
Quant à l'illégalité de cette note.
1) Le Secrétaire technique ne peut engager le CSPJ à ce niveau. Une telle note devrait être signée du Président ou du Vice-Président du CSPJ après un vote conforme du Conseil consigné dans un procès-verbal ;
2) L'article 69 de la loi sur le Statut de la Magistrature et l'article 41 de la loi créant le CSPJ ne parlent plus de « mandat » durant la période de transition, c'est-à-dire la période de mise en place des trois lois de 2007 sur la Magistrature. Ces deux articles ayant le même libellé spécifient : « Les Juges de la Cour de Cassation, des Cours d'Appel, des Tribunaux de Première Instance, des Tribunaux spéciaux et des tribunaux de Paix occupent leur fonction jusqu'à ce que leur poste soit pourvu conformément à la Constitution et qu'ils aient été certifiés quant à leur compétence et intégrité morale et obtenu leur approbation du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire ». De ce fait, les Juges en fonction depuis le 20 décembre 2007 (date de la publication de ces lois) n'ont plus de « mandat », ils attendent que la certification ait lieu (Voir article 70 de la loi sur le Statut de la Magistrature). Il est donc illégal de parler de fin de mandat et pire encore de demander à un quelconque pouvoir exécutif de renouveler des « mandats » sans la certification. Si l'exécutif ne met pas en place les structures d'application et ne donne pas les Moyens d'exécuter les lois publiées depuis le 20 décembre 2007, la société ne peut en subir les conséquences et les Magistrats ne peuvent que bénéficier de la Négligence de l'exécutif et du Parlement. L'exécutif depuis 2007 viole la constitution car il se rebelle contre la loi en refusant d'exécuter les trois lois de 2007 et le Parlement fait la même chose en imposant des Magistrats sans compétences dans les deals politiques et en laissant à l'exécutif libre champ sur la Justice pour protéger les intérêts mesquins des parlementaires.
Quant à l'inopportunité de cette note.
1) Le CSPJ est l'organe d'administration, de contrôle, de discipline et de délibération du Pouvoir judiciaire (Voir Article 1er sur le CSPJ). Un administrateur se doit de veiller à ce que l'administration ne soit pas bloquée mais qu'il y ait continuité surtout que la Justice est un service public. La note du CSPJ en date du 7 février vient bloquer l'ensemble des Tribunaux de la République puisque la grande majorité des Juges sont dans la situation de "fin de mandat" pour retenir le terme du CSPJ.
2) Le blocage de la Justice conduit à la perte de droit (Action irrecevable à cause de non-respect des délais…) ; la violation de droit (détenus en situation de détention irrégulière …) et la marginalisation des Magistrats (inaction des Juges et des Parquetiers…).
Voilà donc le CSPJ qui se devait d'encourager la légalité et la célérité de la Justice qui encourage, par cette note, le blocage de la Justice.
Quant à la lâcheté de cette note
Le CSPJ est confronté à un exécutif réticent et conservateur qui tergiverse au lieu de donner les Moyens au CSPJ comme Pouvoir. L'exécutif et le législatif se sont donné les moyens de contrôler et de mettre sous coupe réglée le Pouvoir judiciaire, ils ne veulent pas perdre ce contrôle et ce budget du Pouvoir judiciaire, alors ils font tout pour empêcher que le CSPJ ne soit vraiment un organe impartial et indépendant.
Cependant, la réaction à ce comportement rétrograde et apatride n'est pas de bloquer les Tribunaux puisque la Justice est un service public mais plutôt d'utiliser les armes légales et la mobilisation pour contraindre les deux autres Pouvoir à reconnaitre en la Justice un POUVOIR. L'article 33 de la Loi sur le Statut de la Magistrature précise que les Juges ne peuvent s'affranchir de la loi même pour des motifs d'équité. Se résigner à ne pas réaliser la certification et faire une démarche illégale auprès de l'exécutif ce n'est que de la lâcheté.
En raison de tout ceci, les Juges n'ont pas à respecter cette note illégale et inopportune. J'en appelle donc au CSPJ pour l'utilisation de la loi et des forces de pression qu'est la Société civile pour forcer les autres pouvoirs. La technique se base sur l'utilisation de ces moyens :
1) Annuler immédiatement cette note.
2) Faire le retrait de retrait de la demande de « renouvellement des mandats » auprès de l'exécutif.
3) Ecrire et publier le rapport relatif à la situation de la Magistrature (Art 36-37 sur le CSPJ).
4) Rencontrer le Parlement afin qu'il puisse doter le CSPJ des moyens budgétaires nécessaires et qu'il convoque ou interpelle le Ministre de la Justice sur la question d'indépendance de la Magistrature par rapport aux pouvoirs politiques (Exécutif, Parlement) et aux pouvoirs économiques (Voir Art 39 de la Loi sur le CSPJ).
5) Rencontrer les Magistrats, les Associations de Magistrats, les organisations de droit de l'Homme, donc la société civile sur le blocage des autres pouvoirs afin d'envisager les pressions à faire.
6) Proposer la réforme des lois sur la Magistrature en incluant le fait que le CSPJ soit l'organe d'administration, de gestion, de contrôle, de discipline et de délibération du Pouvoir judiciaire et qu'il soit aussi l'organe de Gestion de ce pouvoir c'est-à-dire l'organe qui prépare, soumet et exécute le Budget de la Justice.
7) Il faut que le CSPJ soit composé uniquement de Magistrats, que les Magistrats du Parquet soit sous le contrôle du CSPJ. Faire perdre à l'exécutif ses principaux attributions sur la Justice (surtout la nomination) ainsi il y aurait un Ministre chargé des relations avec le Pouvoir Judiciaire, signe de reconnaissance de l'indépendance.
Certes, de telles propositions doivent être inscrites sur un agenda à court, moyen et long terme mais si le CSPJ n'en tient pas compte et si la société haïtienne dans toutes ses composantes ne se tienne pas derrière le CSPJ, je considèrerai qu'il n'y a aucune volonté d'avoir une Justice qui se prend en charge. Alors, la société haïtienne n'aura plus de nécessité de lutter puisque la démocratie et l'état de Droit ne peuvent exister sans une Justice forte qui se prend en main donc indépendante et respectueuse de la loi et de l'éthique.
Puisse Dieu avoir pitié d'haïti.
DOUDY
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RESEAU CITADELLE : LE COURAGE DE COMBATTRE LES DEMAGOGUES DE DROITE ET DE GAUCHE , LE COURAGE DE DIRE LAVERITE!!!
"You can fool some people sometimes, But you can't fool all the people all the time."
(Vous pouvez tromper quelques personnes, parfois,
Mais vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps.