samedi 4 décembre 2010

HAITI ELECTIONS 2010: L'épreuve de force par Agnes Gruda, La Presse, Canada

L'épreuve de force

Agnès Gruda 


http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/agnes-gruda/201011/30/01-4347603-lepreuve-de-force.php 


La Presse, Canada


(Port-au-Prince) Le chef de la mission internationale d'observation des élections haïtiennes, Colin Granderson, a un tout petit filet de voix. Quand il a suggéré hier, en conférence de presse, que les Haïtiens auraient dû faire davantage d'efforts pour aller voter, je n'étais pas certaine d'avoir bien compris. 


Mais il l'a répété, et là, je me suis pincée: avions-nous vécu, lui et moi, le même événement, dans le même pays, au même moment? 


Car dans la campagne électorale que j'ai suivie depuis deux semaines, j'ai vu des gens prêts à faire de gros, gros efforts pour exercer leur droit de vote. Des centaines d'électeurs ont attendu pendant des heures sous un soleil de plomb pour obtenir leur carte électorale. 


Et dimanche, ils étaient nombreux à courir d'un bureau de scrutin à l'autre dans l'espoir de trouver enfin celui qui leur était assigné. La pagaille était indescriptible et je trouvais qu'ils avaient bien du mérite. 


Mais il est vrai que Colin Granderson ne vit pas tout à fait sur la même planète que moi. Sa planète à lui, c'est la diplomatie. Il a sûrement d'excellentes raisons de minimiser les dérapages qui ont été observés un peu partout au pays le jour du vote. Et de conclure que, malgré d'«importantes irrégularités», il n'y avait pas lieu de remettre en question la validité du processus électoral. 


Je comprends cela. Mais moi qui n'aspire à aucune carrière diplomatique, je peux dire librement ce que j'ai entendu, observé et confirmé auprès de quelques personnes bien informées durant mes deux semaines de reportage en Haïti.


Premier constat: je m'attendais à trouver un peuple apathique, trop occupé à survivre pour s'intéresser à des élections. 

Faux: partout où je suis allée, des camps de déplacés aux chic quartiers de la capitale, j'ai rencontré des gens qui discutaient avec passion de l'avenir de leur pays. 


Certains ne juraient que par Mirlande Manigat, d'autres étaient de véritables groupies de Michel Martelly, d'autres enfin préféraient des candidats plus marginaux, pour un tas de bonnes ou de mauvaises raisons. Mais presque tous les gens à qui j'ai pu parler étaient d'accord sur un point: le régime actuel doit céder la place. Le ras-le-bol est généralisé. 


Conclusion: la candidature de Jude Célestin, que le président René Préval a choisi comme dauphin, est totalement artificielle, gonflée aux millions de dollars qui lui ont permis de placarder son visage d'un bout à l'autre du pays. D'après ce que j'ai pu entendre à Port-au-Prince, à Cap-Haïtien ou à Jacmel, si Jude Célestin a pu se classer deuxième dans les sondages, c'est parce que ces sondages n'étaient pas faits selon les règles de l'art. Et si jamais il devait remporter le vote, ce serait la meilleure preuve de fraude électorale... 


Quatrième constat: il est possible que le chaos de dimanche ait été le fruit d'une désorganisation involontaire. Mais, chose certaine, quand une vingtaine de personnes s'agglutinent en hurlant autour d'un bureau de vote, tous les tours de passe- passe deviennent possibles. 


L'autre certitude, c'est que le régime actuel était prêt à tout pour garder le pouvoir. Dans certains bureaux de vote, on a assisté à de véritables festivals de bourrage d'urnes. Mais certains de ces bulletins de vote finiront par être rejetés. Et dans l'ensemble, l'ampleur de la fraude est difficile à évaluer. 


D'ailleurs, malgré leur coup d'éclat de dimanche, où ils ont appelé à l'annulation du vote, aucun des deux leaders les plus populaires, Michel Martelly et Mirlande Manigat, ne veut vraiment recommencer à zéro. Chacun espère que, malgré les irrégularités, le dépouillement des votes finira par jouer en sa faveur. Ils se gardent donc toutes les portes ouvertes, au cas où...


Le 7 décembre prochain, le Conseil électoral provisoire doit annoncer les résultats préliminaires du scrutin. Le régime actuel gagnera-t-il son pari en propulsant Jude Célestin jusqu'au deuxième tour de la présidentielle? Si oui, comment la population réagira-t-elle? Sinon, que fera le gouvernement? 

Une délicate épreuve de force s'engage en Haïti. D'un côté, un régime menacé qui a la force du pouvoir. De l'autre, des candidats qui peuvent s'appuyer sur la colère populaire. Et entre les deux, une communauté internationale qui ne sait plus sur quel pied danser. Et qui se demande jusqu'où elle peut soutenir un régime détesté sans risquer l'explosion sociale - dont les premiers signes se font déjà sentir dans quelques coins du pays.

____________________

"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

vendredi 3 décembre 2010

Continuité Préval-INITÉ, communauté internationale et démocratie

Continuité Préval-INITÉ, communauté internationale et démocratie

 

par Leslie Péan (2 décembre 2010)

 

La bêtise ne saurait en aucun cas décourager l'analyse. Surtout à un moment où le président Préval fait répéter à la communauté internationale que 1+1 = 3. Dans une conjoncture où la résistance demandant l'annulation du scrutin fait tâche d'huile. Les manifestations publiques à la capitale et dans les provinces en témoignent. La tendance inquiétante dénoncée par nombre de démocrates de l'incapacité du Conseil Électoral Provisoire (CEP) de Gaillot Dorsainvil à organiser les élections honnêtes et fiables s'est confirmée par les fraudes massives orchestrées le 28 novembre 2010.  Les signes avant-coureurs de cette tendance inquiétante s'étaient fait jour à travers la loi électorale injuste faisant du CEP juge et partie tout en le plaçant au-dessus des lois. Dommage que les dénonciations de la société civile et des partis politiques de cette aberration n'aient pas été entendues et soutenues par la communauté internationale.


De plus, la structure du CEP est telle qu'elle lui permet d'accepter et de refuser des candidatures arbitrairement. On se dirigeait donc vers ce que Jean-Paul Sartre a appelé des « élections-pièges à cons », une mascarade dénoncée par des stratèges qui ont appelé au boycott, mais que des tacticiens ont investi pour en dénoncer la fausseté et la mystification. Dans la conjoncture, il ne s'agissait pas d'être rôti ou bouilli mais de ne pas être mangé par les cannibales.  Les forces du statu quo n'on rien négligé y compris la manipulation de l'opinion à travers des sondages dont les échantillons sont peu représentatifs. La perspective d'un scrutin désorganisé et du bourrage des urnes par le parti INITÉ paraissait certaine.  Le crime électoral était annoncé dans la logique du discours  du gouvernement Préval et du CEP qu'il a mis en place pour se perpétuer au pouvoir.


Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, les conditions matérielles n'étaient pas réunies pour l'organisation d'élections. Les priorités étaient à la mise en œuvre des moyens pour faire sortir le million de personnes sous les tentes et pour organiser les soins de santé afin d'éviter la propagation d'épidémies. Le président Préval n'a pas pris la voie de la mise en place des bases solides pour assurer les services à la population sinistrée par le séisme. Il a préféré équiper les tentes de téléviseurs pour endormir la population durant toute la période de la coupe du monde de football. La voie qu'il aurait du suivre normalement ne le rassurait nullement puisqu'elle impliquait la possibilité d'un gouvernement provisoire qui organiserait des élections dont il ne pourrait pas déterminer d'avance les résultats. Devant les réserves de Washington sur la possibilité d'organiser des élections au cours de l'année 2010, le président Préval a fait pression sur la CARICOM et l'OEA pour l'organisation de ces élections afin d'assurer la continuation de son régime en installant son propre successeur.

 

Le temps d'une lutte de guérilla à tous les niveaux

 

La mystification est de parler d'irrégularités aujourd'hui là où il s'agit purement et simplement de sabotages multiples et de destructions délibérées de la volonté populaire.  Comme l'explique le candidat Leslie Voltaire « ces élections sont comme le tremblement de terre et elles vont encore plus diviser le pays que l'unir [1]». Les magistrats, les vice-délégués et les dirigeants des CASECs ont réactivé toutes les fraudes connues pour combattre les candidats et les électeurs qui ne sont pas favorables à INITÉ.  Les superviseurs d'INITÉ ont été les seuls admis dans les bureaux de vote et les mandataires des candidats autres que Jude Célestin n'ont pas pu pénétrer dans les bureaux de votes pour suivre le déroulement du scrutin. Nombre de bureaux de vote étaient encore fermés à neuf heures du matin. D'autres avaient fermé leurs portes déjà à dix heures du matin car les urnes avaient déjà été remplies par les partisans d'INITÉ. Des faux procès-verbaux ont été fabriqués tant pour favoriser Jude Célestin que pour mettre en valeur d'autres candidats quand la fraude massive a été découverte et dénoncée par le groupe des douze candidats à partir de midi.


La mascarade a atteint un tel niveau que nombre d'émissions de radios reprennent sans aucune vergogne qu'il existerait un pseudo-principe « qui finance ordonne » pour tenter de justifier la nécessité d'accepter le verdict frauduleux du CEP sous prétexte que ce serait la volonté de la communauté internationale qui a financé les élections. La corruption du savoir est érigée en principe par l'OEA, l'ONU, la Caricom et les autres entités de la communauté internationale.  Les propos qui tentent de gommer le foisonnement de ces fraudes sont dangereux, mutilants et contradictoires en refusant de reconnaître le verrouillage du CEP pour les candidats INITÉ et leur confiscation du processus électoral. Le dialogue pour sortir de l'impasse doit commencer par la reconnaissance de la fraude orchestrée par le CEP à la solde du candidat Préval-INITÉ.  C'est en sanctionnant les responsables de cette fraude qu'on sort de la confusion. 


Nous devons sortir de la pensée magique consistant à donner au CEP-bidon le pouvoir surnaturel de confectionner des procès-verbaux électoraux et d'avoir une autorité transcendantale sur un processus électoral contesté par plus de douze candidats représentant 80% des intentions de vote. Là est le débat de fond. Il ne s'agit pas d'occulter les divergences avec le courant Manigat-Martelly qui a été le premier à demander l'annulation du scrutin du 28 novembre 2010 avant de se rétracter sous les pressions occultes. Ces divergences, toutes réelles qu'elles soient, demeurent secondaires et ne sauraient prendre le dessus sur la forme caractéristique de la crise actuelle dont l'origine est l'inféodation du CEP au parti au pouvoir. Il importe donc de faire sauter la pesanteur du courant INITÉ sur le processus électoral. Telle est la sommation historique de notre temps. En ce sens, la demande d'annulation du scrutin présentée par les douze candidats au Karibe Convention Center est autre chose que la somme des partis qui en ont  fait la proposition. C'est la cristallisation d'une multiplicité de réseaux qui, par cette intervention ponctuelle, annoncent une explosion révolutionnaire trop longtemps différée mais inévitable.  En dépit des querelles factionnelles et de la bousculade des aspirations rivales à la prise du pouvoir. 


Les démocrates ne doivent pas baisser les bras devant les représentants de la communauté internationale qui agissent à partir de leurs intérêts mesquins. Tout en méprisant le président Préval qu'ils considèrent comme un caméléon,  ces représentants de la communauté internationale en Haïti sont motivés par la nécessité de poursuivre leur carrière diplomatique et de réussir dans leur manière de protéger le statu quo des personnages infects qui dirigent Haiti.  C'est exactement ce que font les Edmond Mulet, Albert Ramdim, Colin Granderson et leurs collègues américains et européens. Pour eux, les Haïtiens doivent avaler la souillure de la continuité prévalienne en acceptant celui sur lequel le président a jeté son dévolu. Dans l'entendement de ces diplomates, il ne faut pas de violence pour faire le changement social.  Ils viennent avec les forces armées de la MINUSTAH pour protéger les forces réactionnaires haïtiennes et ils propagent les idées que les pauvres et démunis ne doivent pas se révolter contre ceux qui les maintiennent dans leurs conditions misérables. Cette façon de voir est fausse et illusoire. Elle veut continuer à maintenir les rapports de force asymétriques qui maintiennent la plus grande majorité de la population dans une situation de défaite. Les Haïtiens d'aujourd'hui se doivent de prendre comme référence leurs aïeux qui ont fait 1804 avec la lutte de guérilla qu'ils ont conduite pour vaincre les forces armées françaises. Il n'y a pas d'autres solutions. L'exemplarité de 1804 est la seule solution rassurante pour faire tomber les murs de l'iniquité. Les demandes de la foule à la conférence de presse du 28 novembre au Karibe Convention Center sont on ne peut plus clairs : « ARRÉTEZ PRÉVAL », « NOU BOUKÉ », « LIBÈTE OU LA MORT ».

 

Enlever les chaînes dans les têtes

 

Le courant Préval-INITÉ a inventé la fable que la communauté internationale veut la continuité et lui a demandé d'aller de l'avant sans trop se préoccuper des critiques formulées par l'opposition démocratique. Ceci est faux. La communauté internationale s'accommode ainsi de l'incompétence de Préval pour rafler la mise et empêcher aux Haïtiens de trouver les solutions aux maux qui les assaillent. Mais en tirant trop sur la corde, le président Préval se trompe de croire qu'il a encastré la communauté internationale. Cette dernière a plusieurs niveaux de parole et tous ses discours et énoncés n'ont pas le même poids. Les diplomates Colin Granderson et Albert Ramdim n'ont pas le même poids dans la balance que les sénateurs Richard Lugar et  Christopher Dodd ou encore des 45 membres du Congrès américain qui ont écrit une lettre en date du 7 octobre 2010 au secrétaire d'État Hillary Clinton pour demander l'organisation d'élections inclusives et honnêtes en Haïti. Le président Préval fait une mauvaise utilisation du président Bill Clinton en prétendant que celui-ci voudrait du business as usual et qu'il aimerait travailler avec la même équipe qui lui a livré les clefs du pays en créant illégalement la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d'Haïti (CIRH). 


Dans une tournée internationale effectuée récemment, le bâtonnier de l'ordre des avocats de la capitale Maitre Gervais Charles a exposé clairement toutes les manœuvres opérées par le président Préval pour conserver illégalement le pouvoir. En un premier temps, il a paralysé la Cour de cassation en refusant de remplacer les juges partis à la retraite ainsi que le président de cette Cour, réduisant le nombre de juges à sept tandis que le quorum est de neuf juges. En outre, il n'a rien fait pour renouveler les Chambres législatives comme prévu de sorte que les Chambres étaient frappés de caducité au moment du séisme du 12 janvier. Il a alors convoqué par arrêté extraordinaire les deux Chambres pour obtenir une prolongation illégale de son mandat jusqu'en mai 2011 et approuvé la création de la CIRH. Ces deux mesures ont été dénoncées par le barreau de Port-au-Prince et la société civile.


En effet, le président Préval a montré un acharnement exceptionnel à ne pas faire les élections législatives qui auraient pu renouveler la 48ème Législature dont le mandat a pris fin le 11 janvier 2010.  De ce fait, il n'y avait plus de Chambre de Députés à partir du deuxième lundi du mois de janvier 2010. La 49ème Législature n'a pas pu renter en fonction et ainsi il n'existait plus de Parlement car selon la Constitution de 1987, les deux chambres doivent exister pour avoir le Parlement. La nation haïtienne était donc plongée dans un abime politique par l'incompétence du président Préval qui n'avait pas respecté le calendrier électoral. Telle était la situation vingt-quatre heures avant la foudre du  tremblement de terre du 12 janvier 2010 qui a détruit l'univers physique avec les milliers de mort et de désolation que l'on connaît.  De plus, l'état d'urgence déclaré par Préval est anti-constitutionnel et le pouvoir législatif n'a aucune compétence pour établir une institution comme la CIRH ou toute autre entité similaire.


On comprend que le goût de la servitude volontaire envers son seigneur soit très ancré chez le président Préval. Mais il ne saurait vouloir que tout le monde le suive et accepte son invention qui participe des chaînes qu'il a dans sa tête. De sa trahison sans remords de la nation haïtienne. Le financement extérieur est une contrainte que les Haïtiens doivent gérer correctement c'est-à-dire avec rationalité et cohérence dans la transparence. L'opposition démocratique n'a aucun problème pour mettre en place un solide partenariat public/privé avec le  président Clinton qui donne une place importante aux investisseurs privés internationaux dans la reconstruction d'Haïti. 

 

Le plus grand destructeur de capital social

 

Mais un tel partenariat exige des Haïtiens un capital social[2] que ne favorise pas l'équipe actuelle qui dirige le pays. Le capital social ou encore les relations qu'entretiennent les individus entre eux sont importants pour atteindre les objectifs qu'ils se fixent. Or tout indique que le président Préval est le plus grand destructeur de capital social en Haïti. L'échec de la soi-disant réforme agraire dans la vallée de l'Artibonite est éloquent de la diminution du capital social en milieu rural. Les formes d'insécurité introduites par l'Institut National de la Réforme Agraire (INARA) depuis 1997 sont multiples. Comme le révèle Mickael Levy, «les critères d'attribution des parcelles ne sont pas respectés. Les paysans accusent les membres des comités d'appui d'inscrire sur les listes de bénéficiaires leurs proches ou leurs amis, de vendre les parcelles, d'exercer du chantage sur les paysans (parcelles contre femmes)…. Les membres du comité de suivi, très proches du Président Préval, sont l'objet des critiques les plus vives : corruption sur les contrats d'entretien du réseau d'irrigation, attribution de ces  contrats aux organisations paysannes qu'ils dirigent personnellement, ventes d'engrais subventionnés.…La corruption, le clientélisme, ce qu'en Haïti on appelle le système «moun pam »[3],  se sont insinués dans les structures de la réforme agraire et ont fait naître une défiance croissante des paysans vis-à-vis de l'ensemble du processus. »[4] D'autres exemples sont les menées de Charles Siffra, dirigeant de Koze Pèp et représentant du gouvernement dans la vallée de l'Artibonite. De 2007 à nos jours, dans le domaine de la distribution des engrais les pratiques clientélistes continuent en milieu paysan et contribuent à tuer la formation du capital social dans les communautés rurales[5].

 

L'érosion de leadership du gouvernement Préval

 

Le président Préval s'est évertué à casser les institutions parlementaire et judiciaire ainsi que les partis politiques et les liens entre ces institutions. Personne ne fait confiance au gouvernement INITÉ qui est décrié à travers le pays.  Pour avoir systématiquement organisé des élections frauduleuses, pour avoir détruit les réseaux des rapports avec les partis politiques, pour avoir trahi tous ses propres collaborateurs sans état d'âme, de  Jacques Édouard Alexis à Michèle Pierre-Louis, le président Préval n'inspire aucune confiance. Le dernier clou dans le cercueil de la suspicion généralisée du président Préval est le sort que son CEP a réservé aux candidats de la diaspora pour les élections programmées pour le 28 novembre 2010. L'élimination de tous les candidats de la diaspora, y compris de l'ambassadeur haïtien à Washington, montre à quel point les processus de mobilisation et de production de capital social sont combattus par le courant INITÉ. Or la diaspora haïtienne contribue près de 30% du PIB.


L'érosion de leadership du gouvernement Préval est une vérité élémentaire reconnue par la communauté nationale et internationale. Cette érosion se donne à voir dans le million de personnes sous les tentes à travers la capitale et la réponse tardive du gouvernement Préval au tremblement de terre du 12 janvier 2010.  Pour réussir la reconstruction d'Haïti, il faut qu'il y ait d'abord au niveau haïtien des valeurs reconnues capables d'élaborer des programmes qui font consensus autour de la question sociale. Et pour cela, le président Clinton sera le premier à admettre qu'aucune transformation n'est possible dans un espace donné sans une politique d'intégration sociale faisant participer les gens ordinaires comme les élites. Sans cette corrélation entre transformation spatiale et intégration sociale, la société est bloquée.

 

Le crime électoral était annoncé

 

Le moment n'est donc pas à la culpabilisation des Haïtiens comme des incapables toutes classes confondues. Les responsables de la gabegie sont la coalition des assoiffés de pouvoir soutenus par les puissances internationales qui monopolisent les centres de décision et qui pratiquent une politique d'exclusion contre tous ceux qui ne partagent pas leur option de dilapidation des ressources nationales. La bande à Préval représente le crime, la concussion et les kidnappings érigés en politique d'État. Dans le meilleur des cas, le courant Préval-INITÉ symbolise la méfiance totale à partir de laquelle aucun développement n'est possible. La crise actuelle était prévisible. Le crime électoral était annoncé. Aucune solution ne peut être trouvée en mettant un cautère sur une jambe de bois. Les responsables de l'échec du 28 novembre 2010 doivent se retirer. Leur reddition sans condition n'est pas négociable. Tout compromis avec la saleté est mauvais. Rien ne pourra réussir dans la confusion.  Ils doivent partir. Nous avons la certitude que les Haïtiens peuvent prendre leur sort en main.


La bêtise ne saurait en aucun cas décourager l'analyse. L'échec électoral du 28 novembre est la concrétisation du vide du courant Préval-INITÉ. Un vide physique déjà évident depuis l'inaction signalée de ce gouvernement après le séisme du 12 janvier, mais surtout un vide mental. La participation du peuple haïtien aux élections du 28 novembre exprimant sa volonté d'exercer ses droits les plus légitimes de vote a contribué à exposer au  grand jour la médiocrité arrogante du pouvoir. En outre, cette participation des Haïtiens a contribué à montrer le cynisme d'un certain nombre de fonctionnaires d'une certaine communauté internationale plus préoccupés à justifier leur salaires et avantages sociaux qu'à aider le peuple haïtien à sortir de son gouffre. Les hommes politiques sans vision qui nous dirigent  ont été obligés de montrer ce qu'ils cachaient : des horreurs qui s'entassaient et que le monde entier a pu regarder. Enfin ! Les chancelleries occidentales ont pu donc contempler et méditer. Seront-elles en mesure d'empêcher le génocide que prépare INITÉ pour garder le pouvoir ? Reprendront-elles à leur compte le mot prononcé par le président socialiste François Mitterrand,  au sujet du génocide orchestré par son ami président au Rwanda en 1994 « Dans ces pays-là, un génocide, ce n'est pas trop important »[6] ? Après le séisme du 12 janvier 2010, les chancelleries ont raté une occasion en or d'appeler au dialogue toutes les catégories sociales pour trouver une réponse au drame national. Au fait, elles n'ont pas trouvé la bonne réponse car elles n'ont pas posé la bonne question. Aujourd'hui, les chancelleries ont vu des riens exécuter ce qu'ils savent faire de mieux : l'appauvrissement. Des riens qui veulent être éternels. Le moment est peut-être venu de leur tourner le dos !


[1] Damien Cave and Randall C. Archibold, « Haitian candidates call to void election », New York Times, November 28, 2010.

[2] Le capital social s'entend aussi bien dans le sens que Putnam dans Bowling Alone le présente que dans celui plus minimaliste que lui donne Pierre Bourdieu. Voir Robert Putnam, « Bowling Alone : America's Declining Social Capital », Journal of Democracy, vol. 6, no 1, 1995 et Pierre Bourdieu, La distinction. Critique sociale du jugement,  Paris, Minuit, 1979; voir aussi du même auteur « Le capital social. Notes provisoires », Actes de la recherche en sciences sociales, no 31, 1980.

[3] « Moun pam » signifie en créole haïtien, mes gens, mes proches. Favoriser les siens, ses proches.

[4] Michael Levy, «La réforme agraire en Haïti », Nouvelles Images d'Haïti, Paris, France, avril 2003, p. 2. Lire du même auteur, « Conflits Terriens et Réforme Agraire dans la plaine de l'Artibonite », Cahier des Anneaux de la Mémoire, numéro 6, Nantes, 2004.

[5] Michaelle Auguste Saint-Natus et Alain Gilles, Le capital social dans les communautés rurales en Haïti, une étude exploratoire, CEPALC, 2005.

[6] Patrick de Saint-Exupéry dans «France-Rwanda : un génocide sans importance», Le Figaro,  Paris, 12 janvier 1998. Voir aussi Patrick de Saint Exupéry, L'Inavouable, Paris, éd. Les Arènes, 2004.

____________________

"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

FONKOZE lance son projet ZAFEN dans le Nord. Par Cyrus Sibert

FONKOZE lance son projet ZAFEN dans le Nord.


Une équipe de FONKOZE a organisé ce vendredi 3 décembre 2010, a la salle de conférence de l'Hôtel Roi Henri Christophe, Cap-Haïtien, une session d'information a l'intention des entrepreneurs, de la presse et du public en général.

ZAFEN qui signifie en créole "C'est notre affaire", est un site en ligne qui met en relation les prêteurs, donateurs et investisseurs avec les PME et les projets sociaux en Haiti. Grâce a ce modèle d'affaires, le site internet multilingue améliorera l'accès au capital pour les entrepreneurs des zones urbaines et rurales en Haiti.

Ce projet est le résultat d'un partenariat entre la Famille Vicentienne, Fonkoze, l'Université DePaul, le Group Ressources des Associations Régionales de la Diaspora Haïtienne, USAID-HiFive et la Banque Interaméricaine de Développement (IDB).

Régime Alexandre, responsable du programme ZAFEN a présenté une liste de possibilités et de projets dans des secteurs comme la pêche, l'artisanat, l'agriculture, le tourisme...

Ce projet vise des entreprises du secteur formel. En plus de prêt sur une longue période, a un taux préférentiel, ZAFEN fournit l'assistance technique. Il se propose d'aider des membres du secteur informel a régulariser leur situation avec l'Etat. Environ 9 analystes de projet sont déjà disponibles a travers le pays pour assister les entrepreneurs dans leur idées de projet.

Une formation de deux jours se tiendra durant le week-end a Cormier Plage. Elle vise a revoir avec les entrepreneurs qui le souhaitent les principes de base de la gestion des entreprises.

Avec la fermeture du projet MARCHE au début de l'année 2010, les entrepreneurs du Nord se sentaient un peu abandonnés, ainsi, ZAFEN représente pour eux une grande opportunité en ces moments difficiles. Souhaitons qu'il pourra réussir où d'autres ont échoué.

Cyrus Sibert, Cap-Haitien, Haiti
3 decembre 2010
www.reseaucitadelle.blogspot.com
Envoyé par mon BlackBerry de Digicel

____________________

"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

L'ex député et candidat à la députation de l'Inité, Odney Alcide, serait impliqué dans l'incendie des maisons. Les partisans de l'Inité auraient servi de guide aux policiers au cours de l'intervention.

    Vendredi, 3 décembre 2010 09:13

Répression policière à Plaisance suite à des incidents électoraux

Un climat de tension règne dans la commune de Plaisance suite à un conflit électoral. Au moins 4 maisonnettes ont été incendiées par des membres de la Police après des perquisitions dans la région rapporte le journaliste Lemoine Boneau.

L'intervention des membres de l'Unité Départementale de Maintien de l'Ordre (Udmo) a été réalisée lundi dernier quelques heures après l'agression contre un juge de paix et une attaque contre un commissariat de police. Le magistrat avait été tabassé par des plusieurs partisans d'un candidat de l'opposition mécontents de l'arrestation d'un militant.

Les manifestants en colère s'étaient ensuite dirigés vers le commissariat où ils ont remis le militant en liberté.

L'Intervention d'une unité de l'Udmo n'a pas permis d'appréhender les auteurs du forfait. Cependant les policiers au cours de leur mission ont brutalisé et appréhendé plusieurs citoyens.

Le journaliste Lemoine Boneau révèle que de nombreux citoyens ont gagné le maquis pour échapper à la fureur des policiers de l'Udmo.

L'ex député et candidat à la députation de l'Inité, Odney Alcide, serait impliqué dans l'incendie des maisons. Les partisans de l'Inité auraient servi de guide aux policiers au cours de l'intervention.

Un climat de tension règne à Plaisance depuis la fin des opérations de vote. De nombreux citoyens critiquent l'attitude de l'ex parlementaire qui aurait provoqué l'arrestation d'un partisan de l'opposition 48 heures avant le scrutin.

LLM / radio Métropole Haïti

____________________
"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?
Haïti : La continuité du système colonial d'exploitation  prend la forme de monopole au 21e Siècle.
WITHOUT REFORM, NO RETURN ON INVESTMENT IN HAITI (U.S. Senate report.)

jeudi 2 décembre 2010

Haiti-Élections : L'ONU menace le retrait de ses troupes...1ere étape dans la chute de Préval. Par Cyrus Sibert

La déclaration d'Edmond Mullet a l'AFP est un élément important dans l'analyse des marges de manoeuvre du régime de René Préval dans cette crise post-électorale.

«l'ONU partira "si la volonté populaire n'est pas respectée"», cette déclaration au milieu d'une crise électorale rappelle étrangement les pressions de l'ONU sur le gouvernement provisoire de Gérard Latortue pour la proclamation de René Préval dès le premier tour en 2006.

N'ayant a sa disposition aucune force d'attrition nationale, la présence des troupes de l'ONU est une garantie indispensable pour le gouvernement en place. Depuis toujours, Préval fait de la Minustah son allié stratégique pour la stabilité de son régime. Les troupes de l'ONU l'ont déjà sauvé en 2008 quand des émeutiers de la faim avaient tenté d'envahir le Palais National. Cette déclaration du Représentant du Secrétaire Général de l'ONU en Haiti semble sonner le glas. Préval vient de perdre son principal soutien. Face aux émeutes annoncées, si le Conseil Électoral manipule les résultats en faveur du pouvoir en place, la chute est pour demain.

Si la déclaration de Mullet peut-être interprétée comme un attachement au scrutin du 28 novembre 2010, le fait de mettre l'accent sur "la volonté populaire" au lieu de "décision du CEP" est une mise en garde contre les manoeuvres du parti au pouvoir d'utiliser de faux procès-verbaux et de manoeuvrer pour changer les résultats en faveur de Jude Célestin.

"Si la volonté du peuple est respectée et reconnue par le Conseil électoral haïtien, il n'y aura aucun problème, la communauté internationale va s'engager et aider le nouveau gouvernement à faire face à des défis énormes. Nous continuons de faire confiance aux membres du Conseil électoral, nous verrons s'ils sont à la hauteur des circonstances et s'il n'y aura ni intimidation, ni argent qui les feront changer", a dit M. Mulet. Cette citation exprime un doute quant a la capacité du CEP de résister aux pressions allant dans le sens d'une manipulation des résultats du scrutin. Mieux vaut tard que jamais, la mobilisation populaire a forcé Edmond Mullet a ce mettre au coté du peuple en rejetant toute manoeuvre du régime a partir du CEP .

Ce jeudi 2 novembre 2010, des rumeurs faisaient état d'une possible d utilisation des manifestations spontanées de la population mécontente le jour du vote pour disqualifier Michel Martelly.

Après une évaluation de la situation sur le terrain, l'ONU semble avoir opté pour la protection de son image, de son personnel de terrain et son avenir en Haiti. Cette déclaration de Monsieur Mullet est sans équivoque une réponse au Sénateur Joseph Lambert qui s'amuse a jouer avec le feu. Si, par naïveté et/ou par entêtement, le régime en place se trouverait confronter a la violence, il sera obligé d'y faire face seul en utilisant la Police Nationale et ses gangs.

Logiquement, si l'ONU maintient cette position, on devra s'attendre a une démission de René Préval, suivie de son départ pour l'exil. Car, nous voyons mal déjà le président Préval accepter un deuxième tour entre Mirlande Manigat et Michel Martelly. A moins, qu'il ait le support militaire et politique d'un pays allié fort pour combler le vide laissé par la Minustah.

Encore une fois, le pouvoir d'Etat paie les conséquences de l'absence d'une armée nationale ou du moins d'une gendarmerie nationale. C'est amusant quand c'est un anti-militaire comme René Préval qui paie les conséquences de l'absence de l'armée d'Haiti.

Cyrus Sibert, Cap-Haitien, Haiti
2 décembre 2010
www.reseaucitadelle.blogspot.com
Envoyé par mon BlackBerry de Digicel

Haïti: l’ONU partira “si la volonté populaire n’est pas respectée”


Haïti: l'ONU partira "si la volonté populaire n'est pas respectée"

jeudi 02 décembre 2010 à 17:43

"La communauté internationale va se retirer d'Haïti et le pays ne va pas bénéficier de l'appui et de ressources internationales si la volonté populaire n'est pas respectée", a prévenu jeudi le chef de la Mission de l'ONU en Haïti, Edmond Mulet, interrogé par l'AFP.

"Si la volonté du peuple est respectée et reconnue par le Conseil électoral haïtien, il n'y aura aucun problème, la communauté internationale va s'engager et aider le nouveau gouvernement à faire face à des défis énormes", a promis le diplomate onusien, interrogé alors que le pays attend la publication des résultats du premier tour des élections contestées du 28 novembre.

"Mais si la volonté populaire n'est pas respectée, l'ONU et la communauté internationale vont se retirer et le pays ne va pas bénéficier de soutien politique et de ressources étrangères pour sa reconstruction", a averti M. Mulet.

Un groupe de douze candidats à la présidence continue d'exiger l'annulation des élections présidentielle et législatives, marquées par des incidents meurtriers et des fraudes en faveur du candidat du pouvoir en place, Jude Célestin.

"Nous continuons de faire confiance aux membres du Conseil électoral, nous verrons s'ils sont à la hauteur des circonstances et s'il n'y aura ni intimidation, ni argent qui les feront changer", a dit M. Mulet.

La publication des résultats préliminaires des élections est annoncée pour le 7 décembre.

Un climat de tension règne en Haïti où les manifestations publiques pour réclamer le départ du président René Préval sont désormais interdites.

AFP
Envoyé par mon BlackBerry de Digicel

Peut-on organiser des élections crédibles avec René Préval? By Cyrus Sibert

Peut-on organiser des élections crédibles avec René Préval? By Cyrus Sibert

René Préval

Par Cyrus SIBERT

Cap-Haïtien, le 02 Décembre 2008 ; (Ré.Cit.).-


"Ce qui compte, ce n'est pas ceux qui votent, c'est ceux qui comptent les votes." (Joseph Staline).


Le 4 novembre 2008, le monde observait l'élection de Barack OBAMA à la présidence des États-unis d'Amérique. L'afro-américain a pu, grâce à un système politique méritocratique remporter les élections. Ceux qui s'attendaient à un coup de force des conservateurs de l'establishment, ont eu la grande surprise: le mérite est l'idée directrice de l'hyperpuissance mondiale, les institutions sont adaptées en ce sens, leur renforcement a toujours été le souci des dirigeants américains. Elles sont là pour neutraliser les réflexes primaires des groupes ou des clans. Même là où le capital règne en maître, le peuple et son vote, légalement exprimé en toute liberté, constituent la base d'une démocratie.


Les élections ne sont pas un moyen de maintenir au pouvoir des régimes en faillite, des dirigeants voyous, comme on le voit dans plusieurs pays du tiers monde dont Haïti. Les lois sur le financement des partis empêchent aux riches et à la mafia d'imposer leurs candidats à coup d'argent sale. Le système de collecte de fonds de campagne reflète l'idée démocratique. Il permet aux citoyens de contrôler le système, grâce à leur contribution. On enquête sur la vie des candidats. Même avec des imperfections, on constate un souci de grande moralité dans le système électoral des États-unis. On est loin de ces élections de chez nous dont les candidats sont des repris de justice, des criminels de droits commun, des corrompus, des narcotrafiquants, des bandits de grands chemins, financés par la mafia et l'argent sale de la drogue, du kidnapping ou par des fonds occultes de pays amis comme le Taiwan. Les élections ne constituent pas un moyen de recycler les voyous et les nuls irresponsables qui à leur actif n'ont rien que la débauche et la perversion.


L'Institution électorale, pierre angulaire du projet démocratique haïtien.

Le mode de renouvellement des dirigeants à la tête de l'État constitue la pierre angulaire de la stabilité en Haïti. L'histoire des régimes dictatoriaux démontre le souci des tyrans de bloquer le cheminement des élites à des postes stratégiques au niveau de l'État. On cherche, comme aujourd'hui, à faire main basse sur la machine électorale. On se souvient encore de ces élections dirigées depuis le Ministère de l'intérieur, de ces résultats imposés par l'armée ou par la police – exemple 21 mai 2000. Les citoyens n'ont pas eu droit de vote. On utilisait toutes sortes de tactiques pour empêcher le vote populaire légalement exprimé et crier victoire avant même la proclamation officielle des résultats. En conséquence, le changement de régime et de politique se fait dans la rue. Dans l'impossibilité de s'exprimer, la subversion reste l'alternative. D'où l'instabilité que connaît Haïti depuis son indépendance. Les observateurs de la communauté internationale critiquent souvent les insurgés et les rebelles, les accusant d'être à la base des chambardements. Nous estimons ces critiques superficielles et irresponsables, car les observateurs ne sont pas sans savoir les dispositions de planification des fraudes électorales. Ils sont souvent complices. Le 14 novembre 2008, lors d'un point de presse du Chef Civil a.i. de la MINUSTAH Oumar BA dans le Nord, nous avions appris que l'appui de la MINUSTAH au Conseil Électoral Provisoire s'arrête à la sécurité et à la logistique. La Mission n'entend pas superviser tout le processus. C'est une affaire haïtienne. En réponse à la question: Pourquoi n'observez vous pas tout le processus, c'est à dire du recrutement du personnel de l'appareil aux opérations de vote? La réponse est: Notre travail s'arrête à la sécurité et à la logistique (transport et entreposage).


Une réponse inquiétante, vu que tout le monde est au courant des projets de main mise de la Présidence sur le Conseil Électoral Provisoire; déjà il est bruit que certains dossiers déposés par des jeunes diplômés pour intégrer l'appareil électoral au niveau des Bureaux Électoraux Communaux (BEC) du Nord sont portés disparus. L'ancien premier Ministre Jacques Édouard Alexis, à travers les cinq Ministères qu'il contrôle, finance déjà sa campagne électorale. Le Ministère de l'Intérieur se prépare à diriger comme aux temps des Duvalier, les élections. Les BED (Bureaux Électoraux Départementaux) seront aux mains des hommes du régime. Les présidents de bureau de vote seront des hommes d'Alexis. Toute la machine électorale actuelle sera dominée par le pouvoir en place. On s'achemine vers des élections officielles de jadis.


La démocratie n'avancera pas. Comme en 2000, les pressions du Palais national sur l'institution électorale en vue d'obtenir des élections officielles accoucheront la polarisation de l'espace politique, des conflits, des affrontements et l'instabilité.


Quel intérêt a un citoyen moral à participer à des joutes qui ne viseront qu'à redorer l'image des criminels, des trafiquants de drogue et des corrompus?


Dans le Nord, il est évident que les élections sénatoriales catapulteront Moise Jean-Charles, un homme accusé par une enquête de l"OEA d'incendies criminelles, impliqué dans le meurtre de Guy Salvant, le frère du Député de Limonade- Quartier Morin Hugues Célestin et Nawoon Marcelus ancien député Lavalas de la Grande Rivière du Nord accusé par l'Ambassade des États-unis de trafic de drogue. Car le CEP étant une succursale de Jacques Édouard Alexis, le peuple ne pourra pas s'exprimer en faveur d'autres candidats populaires.


La pédagogie des élections

Pourtant, les élections devraient constituer l'axe central du processus démocratique en Haïti. L'organisation de joute électorale devrait donner à la nation la possibilité de changer de politique sans violence, mais à travers les urnes. Le filtrage des candidats à partir de leur casier judiciaire et de leur niveau moral devrait servir d'exemple et encourager les jeunes à rejeter la délinquance. Les débats entre candidats devraient jouer un rôle d'éducation et de sensibilisation des citoyens face aux grands défis de la nation.


Les confrontations idéologiques devraient permettre de réduire les élans populistes d'explications faciles et de rejeter les approches manichéennes. En Haïti, nous sommes loin de cet objectif. Nous avons une démocratie sans le droit. Les résultats des élections de 1990 que l'on se tue à qualifier dans les milieux diplomatiques, de 1ère élection crédible dans l'histoire d'Haïti, ont été publiés sur les ondes de Radio France Internationale et les foules du candidat populaire Lavalas n'ont pas permis le respect scrupuleux de la loi électorale en ce qui concerne les protestations, le contrôle des procès-verbaux, etc. En 2006, la rue a encore une fois imposé le Président Préval avec 48% des votes exprimés, alors que la loi électorale réclamait 50% plus 1. Nous sommes loin d'avoir des élections crédibles en Haïti. Le processus électoral en reste une mascarade pour légitimer les criminels, les corrompus, les apprentis dictateurs et leur pouvoir personnel.


Conclusion

Le Président René Préval refuse de respecter les échéances constitutionnelles. Depuis son élection à la tête de l'État d'Haïti, il y a tout fait pour ne pas organiser des élections. Plusieurs diplomates qui le supportent ont abondé dans le même sens, répétant qu'Haïti organise trop d'élections. Ainsi, il n'a pas organisé les élections indirectes qui devaient renforcer la tradition électorale en élisant un Conseil Électoral Permanent, comme le veut la constitution en vigueur. Le parlement n'est pas renouvelé. Il avance vers un dysfonctionnement de fait, car en 2010, le Sénat sera amputé de 2/3. Devant ce constat des dérives de la part du Chef de l'État, le consensus trouvé pour sa nomination par la communauté internationale en 2006 ne tient plus. En lieu et place du renforcement de la démocratie, il s'entête à manœuvrer, à affaiblir les institutions, dans le but de garder le pouvoir directement ou indirectement. La stratégie des démocrates devrait être de continuer la logique de blocage du processus électoral, jusqu'à la fin du mandat du Président René Préval. Car, il est connu de tous que le Palais national s'active à contrôler les Bureaux Électoraux Départementaux, les bureaux au niveau communal et les bureaux de vote. Le premier Ministre sortant Jacques Édouard Alexis, à partir de cinq (5) Ministères dont l'Intérieur qu'il contrôle promet des élections officielles. A travers le pays, on recrute des bandits comme candidats, membres de l'appareil électoral et/ou hommes de gangs pour les prochaines violences électorales. Avec la position géographique d'Haïti comme voie de transit pour les narcotrafiquants et les criminels de tout poil, on devrait mettre sur pied une procédure de ''vetting'' sur les candidats afin de réduire les nombres de bandits au pouvoir. La fin du mandat de René Préval et son départ diminueront la pression de ses hommes corrompus sur le système électoral. Une formule Président Provisoire et Premier Ministre Michèle D. Pierre-Louis serait un consensus idéal, pour la poursuite du processus constitutionnel et le rétablissement de la neutralité électorale et de l'esprit de négociation qui existait en 2006, celle qui avait permis à un homme comme René Préval de devenir Président d'Haïti, pour un second mandat. On pourrait profiter de cette nouvelle situation spéciale pour poser à partir d'accords entre les protagonistes de la classe politique et de la société civile, l'amendement de la Constitution ou de l'adoption d'une nouvelle Constitution. La réforme judiciaire et l'organisation des élections sont deux éléments fondamentaux pour la bonne gouvernance et la stabilité en Haïti. On comprend mal que les Nations Unies qui se disent en mission de stabilisation en Haïti refuse de s'engager à fond dans l'institutionnalisation des institutions électorales et judiciaires.


"Ce qui compte, ce n'est pas ceux qui votent, c'est ceux qui comptent les votes." (Joseph Staline).


RÉSEAU CITADELLE (Ré.Cit.), le 02 Décembre 2008, 12 heures 05.

____________________

"La vraie reconstruction d'Haïti passe par des réformes en profondeur des structures de l'État pour restaurer la confiance, encourager les investisseurs et mettre le peuple au travail. Il faut finir avec cette approche d'un État paternaliste qui tout en refusant de créer le cadre approprié pour le développement des entreprises mendie des millions sur la scène internationale en exhibant la misère du peuple." Cyrus Sibert
Reconstruction d'Haïti : A quand les Réformes structurelles?