lundi 16 février 2015

Témoignage sur l'exécution de René Péan, il y a 50 ans : "Yon Simagri".-


Je suis contre la peine de mort et contre toute initiative visant à enlever la vie humaine. Dans la Bible, c'est le seul commandement fini par un "point": Tu ne tueras point??? C'est triste de voir la vie de cette homme totalement maitrisé, être enlevée par ses semblables. Je suis contre la peine de mort en toute circonstance. Trop de tristes épisodes dans notre histoire de peuple... Je suis encore plus touché par son effort de rester fier, la tête haute, même ligoté, devant la mort. 

Ma mère vient de m'apprendre que Péan était accusé de sorcellerie. Lors de cet événement, elle était à l'école primaire. Les autorités exigeaient que tous les élèves des écoles de Cap-Haitian assistent, en uniforme, à l'exécution de 3 "condamnés", 2 assassins et Péan. Elle est restée marquée par ce spectacle qu'elle appelle: Simagri ! Comment peut-on juger et condamner quelqu'un pour sorcellerie? (Une accusation fantaisiste et sans fondement) Ala Pay!!! 

René Péan est sans doute victime d'un complot pour une histoire de femme, de biens ou de pouvoir.

Cyrus Sibert, Cap-Haitien, Haiti
16 février 2015
@reseaucitadelle
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Il y a 50 ans : René Péan était fusillé.-

(Photo : Au Champ de Mars du Cap-Haïtien, René Péan: Stoïque, imperturbable, affichant son mépris à la face du peloton d'exécution ! Dédaigneux du commandant macoute Robert Cox)

par Leslie Péan, 13 février 2015 --- Je n'avais alors que 15 ans et j'ai d'abord cru à une plaisanterie de mauvais goût. Puis, au cours des heures qui ont suivi, j'ai compris qu'il venait de se passer quelque chose de très grave. Je ne reverrais plus mon oncle René. Cinquante ans ont passé, mais il ne s'écoule jamais un 16 février qui ne m'apporte une raison de penser à lui. Stoïque, imperturbable, affichant son mépris à la face du peloton d'exécution ! Dédaigneux du commandant macoute Robert Cox qui lui ficelait les bras au poteau. L'événement a jeté un voile de mutisme et une peur jamais dissipés dans la famille. Décision scandaleuse et expéditive, s'il en est. Accusation floue, fantaisiste et cynique : kamoken, loup-garou, auteur du meurtre d'un tonton-macoute. Allégations affirmées par le pouvoir, mais entachées de doutes dans l'opinion publique.

Sous l'empire des pressions et machinations politiques bien connues du régime Duvalier, l'oncle René n'a eu droit ni à la présomption d'innocence ni au jugement d'un tribunal. Dans la presse locale, seul Le Nouveau Monde, alors publié uniquement au Cap-Haitien, fit brièvement mention de cette exécution, de sorte qu'on n'en entendit pas parler dans les autres villes du pays. À l'étranger, seul le New York Times fit état, dans son édition du 11 mars 1965, de l'exécution de René Péan, entrepreneur de pompes funèbres accusé d'avoir tué un tonton-macoute.

Quand les images de l'exécution au Champ-de-Mars du Cap-Haïtien nous sont parvenues, la porte était ouverte à toutes les interprétations. Tous les silences, toutes les déductions possibles. René était là, avec le regard impassible de celui qui affronte son destin avec courage. René a occulté la mort avec la même sérénité affichée par Marcel Numa et Louis Drouin Jr, exécutés trois mois avant lui à l'entrée du cimetière de Port-au-PrinceDes tragédies dont aucune des trois familles ne s'est jamais relevée. Écartelées entre la soif brûlante de justice et le besoin cuisant de vengeance. Déchirées par l'échec collectif d'une société qui, faute de repères, en arrive à douter de tout, même des raisons d'exister. Face au sentiment d'impuissance d'une population broyée par la dictature, chacun se demande comment dégager de nouvelles perspectives. Comment construire du sens devant des actes d'une telle barbarie ? Quelles règles de vie inventer quand le nihilisme fait disparaître tous les réseaux de sens ?

La métropole du Nord se relevait à peine du traumatisme causé par la rafale de mitraillette d'Adherbal Lhérisson qui faucha l'ex-député Tony Piquion au beau milieu d'une soirée de l'orchestre Septentrional au club Rumba. L'exécution de René, une semaine plus tard, plongea de nouveau la population du Cap dans le désespoir. Les attitudes variaient devant ces successions de drames sanglants. Dans le cas de René, au désespoir et au courage des uns succèdaient les déclarations d'allégeance des autres au pouvoir en place. Des formes de servilité et d'obédience qui ne sauraient masquer le tremblé de la déraison des flous d'âme.

François Duvalier venait à peine d'inaugurer la farce de la présidence à vie. Ce régime mortifère considérait comme de graves délits l'indépendance d'esprit et la force de caractère du citoyen. Des traits prépondérants dans le comportement d'une personnalité de la trempe de René. Aucune démarche auprès des instances judiciaires n'a pu conjurer ce destin tragique. Des sbires du régime avaient décidé de la mort du citoyen René Péan, parce que sa droiture, son indépendance d'esprit et sa réussite en affaires étaient un affront à leur pouvoir soutenu par la terreur. Une mort qui illustrait la nécessité de se battre contre un système qui a mis en marche la machine de destruction des corps, mais surtout des esprits, qui allait durer encore plusieurs décennies.

Pour parer au risque que le fragile bouche-à-oreille ne fasse perdre la mémoire d'une des multiples tueries de ce régime sanguinaire, j'ai décidé de prendre le chemin du roman pour raconter, en cette année du 50e anniversaire de l'exécution de René Péan, cette tragique histoire aux mille rebondissements.

Thérèse, l'épouse de René, est la narratrice de l'histoire qui raconte le complot pour tuer son mari et ses tiraillements dans toutes les directions pour tenter de le sauver. En faisant des démarches pour faire libérer René, on découvre avec Thérèse les manigances du régime. Elle est confrontée à une clique de brigands qui veut se débarrasser de René pour la faire tomber dans leurs filets. Le nœud de l'intrigue est dans la logique refusant d'impliquer directement François Duvalier dans le crime qu'il a pourtant ordonné. Et pour ne pas être harassés par la folie meurtrière qui se répand, les membres de la famille réagissent de diverses manières. Plongeon dans l'intérieur des êtres à la manière d'un magicien qui fait des tours avec un mouchoir. Certains choisissent de quitter l'enfer duvaliérien, d'autres optent pour le consentement. Les dédales obscurs du pèlin-tèt conduisent à la folie et on apprend à les contourner. Thérèse réalise que les commandants militaires, commissaires du gouvernement, députés, chefs macoute, etc. sont tous des serviteurs et hommes de main dont l'unique objectif est le maintien du duvaliérisme, à tout prix. La conscience des hommes devient une marchandise qui s'achète à un prix de plus en plus vil. De la recherche de la liberté et du sens dans le roman, on passe au récit de la solidarité entre les assassins.

L'objectif est de tirer René du silence et de l'oubli. Dans le décor des nuits noires du début de la présidence à vie, le roman retrace la vie amoureuse, familiale et professionnelle de René Péan, jusqu'au moment où les barons du duvaliérisme décident de sa mort. Question de réhabiliter un entrepreneur, un rude travailleur dont la réputation a été souillée par des saltimbanques au pouvoir. Question aussi de condamner des pratiques qui continuent dans notre quotidien.

Leslie Pean
Economiste - Historien

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RESEAU CITADELLE : LE COURAGE DE DIRE LAVERITE!!!
"You can fool some people sometimes, 
But you can't fool all the people all the time."
 (
Vous pouvez tromper quelques personnes, parfois, 
Mais vous ne pouvez pas tromper tout le monde tout le temps.
) dixit Abraham Lincoln.

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