Piétinement ! Par Daly Valet Le Matin: 3 au 9 juin 2011 René Préval a laissé la République en mille morceaux. Il l'a amplement dépecée. Tout est à rapiécer, reconstituer et recomposer. Du prestige du pays à l'appareil d'État. Rares, dans notre histoire, sont les régimes à avoir fait si peu de cas de l'ordre républicain et de la morale publique. L'anarchie s'érigeait en principe de gouvernement. Son régime aimait également flirter avec le vide et le chaos. Il laissait pourrir les choses au point de laisser derrière lui un bilan pourri. La première moitié du mandat du président Préval promettait beaucoup. Ses initiatives et l'idée d'ouverture qu'il préconisait donnaient de bonnes raisons de croire que le renouveau était possible après les années d'enfer que le pays a vécues sous Aristide II. Mais à mi-mandat, René Préval n'était intéressé qu'à demeurer au pouvoir au travers d'élections scandaleusement frauduleuses. Il ne gouvernait pas. Il complotait plutôt contre la République. Indifférent aux malheurs et misères du pays, il a laissé le pays orphelin d'un chef et d'un président pendant neuf jours suite au séisme du 12 janvier 2010. Sauf les mots de pourrissement et de scandale peuvent définir adéquatement les deux dernières années de Préval au pouvoir. Au point de se demander si de telles dérives ne procédaient pas d'une certaine vision du monde et du pouvoir. Cette tranquille insolence dans la déstabilisation de l'État, la manipulation des âmes et des consciences, et dans la dislocation en accéléré des structures sociales, ne saurait être uniquement le fait de l'incompétence. Quelque chose de plus profond et insidieux semble avoir servi de socle idéologique à l'action de cet ancien homme fort. Des pans entiers de l'héritage empoisonné qu'il a laissé à son successeur au Palais national, Michel Martelly, sont, donc, à défaire. Ceci, sans arrière-pensée ni hésitation. Le président Martelly saisit-il assez le sens de son mandat et l'urgence de l'enjeu ? Ce rappel des années Préval est pour signifier à Michel Martelly qu'il n'a pas été élu pour continuer son prédécesseur dans son irresponsabilité ni Sweet Micky dans ses frasques langagières et comportementales. Le mandat est celui de la rupture. Rupture par rapport à ces deux contre-modèles. Sinon, le pays aurait souri et opté pour le souriant Jude Célestin, et tout Haïtien aurait, ainsi, pour Inite les yeux de René Préval. Par ailleurs, contrairement à ce que l'émerveillement naïf de l'homme de rue ordinaire, peu soucieux de normes conventionnelles et de convenances, pourrait laisser croire au nouveau chef d'État, tout le pays n'a pas toujours été en amour avec les grivoiseries d'un Sweet Micky. Autant dire qu'il n'y a aucune fierté à dupliquer le registre langagier de ce dernier dans des prestations publiques qui se veulent officielles. Les premiers jours de M. Martelly au pouvoir sont loin d'être rassurants. Il est partout. Il virevolte. Tantôt en super flic. Tantôt en Maire. Tantôt en amuseur public. Tantôt en assistant et accompagnateur ébahi d'ambassadeurs étrangers lors de banales inaugurations d'ouvrages publics. Ces circonvolutions lui ont fait perdre, évidemment, le sens des priorités de l'heure. Il piétinait alors qu'il aurait dû signaler très tôt son sens de l'État sur deux dossiers incontournables. D'abord la crise constitutionnelle, ensuite la crise électorale. M. Martelly a trop procrastiné dans la résolution de ces contentieux. Il a finalement agi. Mais c'est faire preuve de panne de leadership que d'agir sous pression. Tout cela n'a fait que renforcer les suspicions contre lui et susciter le doute sur ses intentions déclarées d'établir l'État de droit en Haïti. Résoudre la crise constitutionnelle et, s'il n'y est pour rien, renseigner la nation sur les auteurs intellectuels et matériels du crime d'État du 13 mai 2011 contre la constitution amendée et adoptée par l'Assemblée nationale, auraient dû être au top de son agenda une fois investi en tant que président. Car, un État de droit suppose avant tout un cadre constitutionnel, légal et réglementaire défini. Inexpérimenté et inadéquatement équipé pour bien assumer la plus haute fonction de l'État, M. Martelly devrait savoir qu'il n'aura pas de période de grâce. On le voit déjà avec ces critiques sévères et prématurées dont il fait l'objet. Il est surveillé de près, dès les premières heures de son intronisation comme président, par une presse sceptique et anxieuse, une classe moyenne orpheline et méfiante, et par une intelligentsia abasourdie et devenue plus hautaine et méprisante que jamais. Ces crispations s'alimentent du préjugé, apparemment indéracinable, que Michel Martelly ne peut que conduire le pays à la catastrophe. Les galas à dominante mulâtre à la Lescot, genre Karibe 14 mai 2011, ne sont pas non plus pour apaiser les esprits de ceux-là qui sont nombreux, dans les couches sociales intermédiaires, à voir dans l'élection de M. Martelly une revanche et un complot de l'élite bourgeoise et aristocratique au teint clair. Il n'y a pas qu'une demande de partage des responsabilités gouvernementales dans les cahiers de charge au président Martelly émanant du Groupe parlementaire pour le Renouveau (GPR), groupe que contrôle la plateforme Inite. De vieux préjugés, de vieilles peurs et des traumatismes collectifs coriaces sont aussi à l'œuvre dans les raidissements des uns et des autres. Par un curieux paradoxe, pour limité qu'il puisse être dans ses moyens et ses capacités, le président Martelly a tout l'air du pilote d'avion qui n'a pas droit à l'erreur. Le pays attend des résultats. Et surtout une Haïti post-Préval. Vite. D.V. |
dimanche 5 juin 2011
Le Matin: Piétinement ! par Daly Valet
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