A la demande de M. Edwin Paraison, nous opinons sur la visite de Bill Clinton dans le Nord d'Haïti
Cher Edwin,
Sans faire une analyse approfondie de la situation, je réponds : nous devons profiter de ce momentum lancé par Bill Clinton. Ce dernier essaie de se racheter sur plusieurs sujets. Si aujourd'hui, cherchant à avoir la conscience tranquille pour sa contribution à la misère des familles haïtiennes, conséquences de la destruction de l'économie haïtienne par le renforcement de l'embargo sur Haïti en 1993 - alors qu'avec un Commando Delta, il pouvait renverser la situation comme Bush l'a fait en 2004- nous devons en profiter pour relancer certains secteurs porteurs de notre économie.
Je ne vois pas comment un esprit sain peut avancer une position chauviniste face à une telle opportunité donc contre le développement de l'économie nationale.
Je pense que la situation économique mondiale exige qu'on évolue en association régionale. L'économie asiatique en est une preuve. Même quand, nous avons nos contentieux avec la République Dominicaine, nous devons envisager de nous associer aux pays de la région pour pouvoir tirer nos revenus du marché touristique mondial. S'il y a en République Dominicaine 70,000 chambres d'Hôtel, nous devons les intégrer dans notre stratégie de relance. A moins d'une heure de vol, un touriste peut visiter Haïti, séjourner dans une ville du pays, visiter la Citadelle et d'autres sites historiques puis retourner en République voisine. Cela ne pose aucun problème.
Je suis partisan de l'ouverture du marché haïtien. Il ne peut y avoir d'investissement sans des crédits, pas de crédits sans des banques modernes et puissantes. En Haïti, nous sommes toujours à l'âge des banques de Familles qui accumulent l'épargne nationale au service de quelques familles aisées. Il faut moderniser ce secteur. S'il faut faire venir des banques de la République voisine, je n'ai pas de problème. Car nous savons tous que des jeunes n'ont pas accès au crédit ; les familles haïtiennes disparaissent faute de revenus. Il n'y a que deux moyens honnêtes pour un ménage d'avoir un revenu : ce sont l'emploi et/ou l'entreprenariat. Donc, il faut du crédit. Les commerçants du nord d'Haïti qui voyagent en république voisine, rapportent qu'il suffit d'acheter en trois occasions dans une maison de commerce dominicaine pour qu'à la 4e, le propriétaire vous invite dans son bureau boire un verre et vous propose une ligne de crédit : Un comportement moderne. La qualité de la vie aux Etats-Unis et en République voisine est basée sur l'accès au crédit : maison, voiture, meuble, enseignement supérieur…
Pourtant, en 2008, les monopoles proches du régime de René Préval ont pu faire pression pour empêcher à la Banco de Reservas de la République Dominicaine de s'établir en Haïti, alors qu'en Haïti on accorde les crédits sur une base de rang social, familiale et paternaliste. Des crédits de 25 à 40 % qui tuent dans l'œuf l'entreprise lancée. Donc, il faut faire un choix entre le statu quo et la souffrance des ménages. La famille est la base de la nation : peut-on accepter pour des questions idéologiques que les familles haïtiennes continuent d'évoluer vers le néant. La majorité des cadres qui abandonnent le pays le fait faute d'avoir accès au crédit. Car le seul moyen de mener une vie descente et propre en Haïti est de se livrer à la corruption, la criminalité, au trafic de stupéfiants… Ce qui augmente la délinquance et prédispose des jeunes sans espoir aux réseaux criminels, politiques (clientélisme) et subversifs…
La bourgeoisie haïtienne étant incapable conceptuellement et/ou financièrement de faire face à cette urgence, il faut libérer le marché financier et permettre à de vraies banques - pas de maisons de blanchiment d'argent ni des groupes cyniques protégés par l'Etat fonctionnant à base de rentes et de ponctions- d'encadrer le marché.
Je suis pour une modernisation des secteurs de la vie nationale.
J'ai l'habitude de prendre la DIGICEL comme exemple : un investissement étranger, des techniques de gestions modernes (étrangères) pour plus d'emplois, une démocratisation de la communication, un développement du marché de services avec la participation de la masse dans la chaine de vente comme vendeurs ambulants de cartes de recharges, de minutes, vendeurs ou réparateurs de matériels. Politiquement, cette compagnie a les moyens de parler aux acteurs politiques dans leur moment folie. Le président de la République est obligé de d'annuler la décision de son régime d'augmenter les taxes sur la communication parce que la DIGICEL s'y est opposé. Il faut plus de compagnie de grande taille pour contraindre les tapageurs politiques à se rendre compte qu'ils ne peuvent pas agir comme bon leur semble. Car dans un pays le plus important c'est l'économie, pas les parasites nihilistes qui s'amusent à semer le trouble avec la certitude qu'aucun secteur de la vie nationale n'est en mesure de les contraindre à adopter un comportement décent et civilisé.
Encore mieux, je l'ai observé récemment : l'alphabétisation - la masse s'adonne à écrire et à lire des SMS : De la créativité - le petit peuple s'adonne à composer des blagues et des histoires pour les publier à partir des téléphones portables, DIGICEL STRAS, un concourt jeunes artistes encourage les jeunes talents. On dira que le développement de ce secteur augmente la dépense en communication : pas de problème c'est un choix libre de l'individu. Au mieux, il le fait sans violence ni fraudes (comme lors de nos joutes électorales).
Avant l'arrivée de cette entreprise étrangère, la COMCEL et la Haïtel deux entreprises nationales faisaient payer les appels reçus. Un appareil de téléphone portable se vendait à des prix exorbitants parfois même en US. C'était un luxe, une marque de puissance et de supériorité. Aujourd'hui ces compagnies qui extorquaient les revenus des clients pour un service au rabais sont forcées de s'adaptent à la compétition de DIGICEL, sans pouvoir expliquer au public pourquoi il devait payer plus pour moins de service avant l'arrivée de la DIGICEL. Il n'y a pas chez nous une mentalité moderne d'entreprise ou du moins elle n'est pas encore généralisée. S'il faut la chercher ailleurs, pourquoi pas ?
La Chine est un rival des Etats-Unis. Ces deux pays ont plusieurs contentieux. Cependant, les dirigeants chinois profitent des avancées techniques, industrielles et commerciales tout en restant vigilant sur leur position politique.
Si, pour des gens qui évoluent en dehors du pays, il y a le temps nécessaire pour discuter sans agir, pour ceux qui habitent le pays, le temps presse. Ce que j'appellerai le ''temps conjoncturel''*. Il faut agir maintenant, sinon les avancées réalisées en termes de stabilité et de sécurité s'écrouleront comme un château de cartes.
* (Après avoir imaginé ce terme, je voir sur Google que Winnie Tomm, Margaret Lowe Benston of Calgary Institute for the Humanities dans The Effects of feminist approaches on research methodologies a utilisé le concept temps conjoncturel ou temps court)
Cyrus Sibert
Palm Bay, Florida
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Cher Cyrus,
Merci de l´envoi de cette note hautement importante pour les gens du nord comme toi et moi. Pourrais-tu nous faire part de tes commentaires personnels sur ce dossier? Je t´en remercie d´avance.
De ma part je peux te dire que le développement touristique de la RD (aujourd´hui qui compte + de 70,000 chambres) a pris le même chemin. D´importants investissements étrangers. Tenant compte des critiques de certains secteurs en rapport a la présence de Clinton, devrions nous profiter de ce momentum, ou maintenir des positions "patriotiques radicales"? Bon dimanche.
Edwin
dimanche 4 octobre 2009
Mes commentaires sur la visite de Bill Clinton dans le Nord. (by Cyrus Sibert)
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