Amis-lecteurs, Valet écrit : "Heureusement, il y avait ce peuple de braves et d'ingénieux pour nous convaincre que l'autre Haïti était possible." Malheureusement, il s'agit de l'autre nation, la démunie, la marginalisée qui ne sait pas encore s'affirmer dans le sens de ses intérêts profonds et mépriser le chant des sirènes qui depuis 200 ans l'induisent dans le chemin du chaos. Il s'agit de la nation qui a appris à survivre en dépit de la démission des élites. Elle continuera de survivre et de vivoter jusqu'au jour où son Toussaint émergera pour façonner l'homme nouveau qui construira le pays de demain. Aujourd'hui, les élites vont écrire encore l'histoire de ce pays avec l'assistance internationale, car le destin de la nation se joue à huis clos entre les représentants des élites et ceux de la communauté internationale sans interlocuteurs valables qui se sont prouvés dans la cause des masses. Dans leur entêtement à ne vouloir voir que le fond de leurs poches et les intérêts de leurs tribus, on se demande si elles auront cette fois-ci au moins la sagesse de miser sur leurs intérêts à long terme qui passent nécessairement par l'émancipation du peuple illétré. Émancipation des masses, tout le monde le sait. Les marxistes l'ont écrit en 1847. Washington, Jefferson, Adams, et Madison ont fondé les États-Unis sur la liberté individuelle et le consentement des masses. Alors ? Ces élites qui ont fait le 29 février 2004 avec leur groupe des 184 qui a trompé le peuple sont aujourd'hui ces mêmes élites qui vont définir une nouvelle page d'histoire. Alors que le peuple est préoccupé par l'exigence de survie, les élites s'occupent de ce qui est important pour l'avenir. Avenir de qui ? Voilà pourquoi l'éditorial de Valet qui regarde en face (peuple de braves) devrait regarder à l'intérieur et faire une sorte d'intropspection. On peut choisir de faire de la poésie ou de rêver comme Daly Valet. Ou bien on peut choisir d'affronter la réalité dure. L'internationale est en train de colmater la situation d'urgence, mais ses interlocuteurs demeurent les élites haïtiennes. Alors, il faut se demander : comment vont-ils s'y prendre pour construire un pays (qu'ils professent vouloir construire) avec la même mentalité qui l'a détruit ? Justement, quand des élites ne peuvent réaliser un rêve de société normale où chaque individu a l'opportunité de s'émanciper et de contribuer selon ses capacités à la richesse nationale, on ne peut que conclure comme Valet : "...cette Nouvelle Haïti...C'est à la fois notre pari et notre parti pris au Matin." Tel un casino, dirigé par les élites, où se présente la majorité, celle-ci ne peut jamais gagner en tant que collectivité, même quand certains éléments des masses se frayent un chemin dans la haute société. The house never loses! Contrairement à Daly Valet, j'invite mes compatriotes des élites qui veulent vivre l'équation de la crédibilité de Covey à travailler avec les masses et éviter le pari au Casino d'Ali Baba. Un pari ne veut rien dire. L'humain doit investir dans l'humain pour façonner la vie nouvelle. Le pari de Valet est un pari d'impuissance. On regarde en face "un peuple de braves et d'ingénieux" comme si, les mains nues, sans leaders, ces masses vont retrouver d'elles-mêmes la route qu'avaient jadis tracée jadis les Toussaint et Christophe. Quand je parle des élites, je ne parle pas d'un individu en particulier qui "brille sur le podium mondial". Je parle d'une collectivité dont l'une des missions historiques est l'émancipation des masses. Je parle de collaboration nationale pour la crédibilité nationale et internationale. Il nous faut dépasser le vernis de l'écriture pour dégager un comportement collectif qui fera des élites un partenaire de choix pour les masses et pour la communauté internationale dans un pays, qui, alors, aura retrouvé sa vocation originelle. Encore une fois: Crédibilité = intégrité + intention + capacité + résultats Et n'oubliez pas que intégrité + intention définissent le caractère de l'individu, de l'entreprise, d'un gouvernement. Ne faites pas comme ceux qui, retranchant l'intégrité de l'équation s'imaginent qu'ils peuvent maintenir la crédibilité qui fait défaut à ce pays. Ces experts de l'arithmétique primaire peuvent vous faire croire qu'en retranchant l'intégrité, l'intention et la capacité de la crédibilité, on peut obtenir des résultats. Le temps n'est plus aux paris mais à la preuve qu'en tant que compatriotes on veut et on peut collaborer pour recouvrer notre crédibilité 200 ans perdue. Le changement en Haïti ne peut se matérialiser sans un consensus national dans le cas idéal et dans l'immédiat ou sans un éclatement social qui sera plus terrible que le séisme du 12 janvier si les élites ne prennent pas au sérieux la gravité de la situation précaire des masses. Les plaisanteries ont assez duré. Cessez de miser sur les miracles. Travaillez pour être crédibles, individuellement et collectivement. Aucun pays dans l'état actuel d'Haïti n'a négocié un tournant décisif sans un compromis historique entre les différents secteurs de la vie nationale. Ray H. Killick |
lundi 8 mars 2010
Commentaires de Ray H. Killick sur l'Editorial de Daly Valet.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire